Certificats sportifs : six généralistes sur dix redoutent d'être poursuivis selon notre sondage

Par
Publié le 15/11/2017
Consultation

Consultation
Crédit photo : GARO/PHANIE

La rédaction d'un certificat de non contre-indication à la pratique d'un sport est loin d'être un acte anodin. La récente poursuite engagée contre son généraliste par un ex-rugbyman professionnel devenu tétraplégique, a fait réagir de nombreux confrères sur legeneraliste.fr.

59 % des 225 praticiens qui ont répondu à notre dernier sondage en ligne ont reconnu avoir peur désormais lorsqu'ils établissent un certificat. À l’inverse, 27 % se sont pas inquiets, 14 % disent ne pas s'être posé de question.

« Depuis la publication de votre article, je ne signe plus aucun certificat pour la pratique du rugby jusqu'à épilogue de cette affaire, commente sur legeneraliste.fr le Dr Joseph Le V. Médecin du sport à Morlaix (Finistère), il approuve la position de l'UFML-S invitant les généralistes à user de leur droit de réserve sur les certificats pour les sports à risque.

« Quand on est médecin de terrain, on sait qu'on ne signe pas un certificat à la légère. Nous allons nous retrouver d'ici peu avec des demandes de licences qui ne se seront signées par aucun médecin et on verra le nombre de licenciés diminuer énormément », pronostique le praticien, fataliste.

Le certif en fin de consultation, un classique

Le Dr Christophe P. appelle lui aussi les confrères à la plus grande prudence devant certaines demandes de patients pour le « twirling bâton ou le yoga au rugby et à la plongée... en faisant ces certificats avec rigueur et surtout en ne cédant jamais aux entraîneurs (surclassement) ou aux parents », au moindre doute. « Le certif en fin de consultation, ce n’est pas possible, conclut-il. Sinon c’est pour notre pomme. »

« Je crois qu'effectivement, il faut qu'on arrête de faire ce genre de papiers, abonde le Dr Marie-Jo G. Les patients n'ont qu'à voir le médecin de leur fédération. La médecine n'est pas un art divinatoire ! »

Même les généralistes expérimentés s'interrogent, à l'instar du Dr Dominique B., 36 ans de métier : « Je pense que je vais m'abstenir dorénavant de signer tout certificat d'aptitude aux sports dangereux (rugby, sports de combat...). Ça ne peut rapporter que des ennuis avec la justice si un sinistre survient... et tout ça pour 25 euros ! »

Tous les médecins n'adoptent cependant pas cette posture. « Pourquoi un acte médical devrait-il entraîner un sentiment de peur ?, s'interroge le Dr Henri B. Le problème est dans le flou qui entoure ces certificats sportifs où seul le médecin engage sa responsabilité. Pour le patient, c'est un simple papier que réclame le club pour se couvrir. » Le généraliste de St Martin d'Ardèche suggère que « pour chaque sport le patient présente à son médecin le certificat-type fourni par la fédération concernée ». Ainsi, le médecin orienterait son examen en fonction de chaque item, et demanderait éventuellement les examens complémentaires ou spécialisés qu'il jugerait utiles.

Ainsi, il signerait, ou non, le certificat « en toute tranquillité s'il a bien fait son travail » et le sportif devrait également signer « pour certifier sa sincérité dans les réponses qu'il a fournies au cours de l'interrogatoire et des examens ».  

« Pourquoi pas une grève des certificats ? » 

Le Dr Anne Y., elle, ne se pose pas de question. « Soit on examine correctement son patient, avant de délivrer ledit certificat, soit on ne fait pas de certificat, assène-t-elle. Si on a peur de son ombre, peut-être faut-il changer de métier ? »

Pour certains, la poursuite engagée par l'ancien rugbyman doit entraîner une mobilisation de tous les généralistes. « Et pourquoi pas faire la grève des certificats de sport jusqu'à nouvel ordre ?, avance Yves A., qui exerce à Angoulême. Tant pour ceux bidons des salles de sport qu'aux sportifs de haut niveau ? »

Les médecins sont nombreux à soutenir leur confrère attaqué auquel ils ne peuvent manquer de s'identifier et à vouloir connaître l'issue de l'affaire. « Je remercie Le Généraliste de suivre cette affaire jusqu'au bout et nous tenir informés », conclut le Dr Alain D.


Source : lequotidiendumedecin.fr