Justice

Mediator : le procès en appel s’ouvrira en janvier prochain

Publié le 14/06/2022
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Plus d’un an après le verdict du procès du Mediator, l’appel du parquet de Paris se précise. Le procès devrait débuter en janvier 2023 et porter sur « l’escroquerie » dont les caisses d’Assurance maladie et les mutuelles s’estiment victimes.

Crédit photo : VOISIN/PHANIE

Ce sera l’événement médico-judiciaire du début de l’année prochaine. Selon nos informations, le procès en appel du Mediator aura lieu à partir du 9 janvier 2023, et il durera quatre mois et demi, pour se terminer le 24 mai 2023. Plusieurs avocats représentants des parties civiles ont été reçus récemment par le parquet de Paris, à l’origine de l’appel, et qui leur a fait part de ces dispositions envisagées.

Ce médicament fabriqué par le laboratoire Servier a été consommé par plus de cinq millions de personnes entre 1976 à 2009. Des centaines de personnes qui ont subi des dégradations graves de leurs valves cardiaques suite à la prise de ce produit, sont concernées par ce procès en appel. « C’est une très bonne nouvelle », nous confie Irène Frachon, la pneumologue de Brest, qui a la première levé le voile sur ce scandale hors-norme.

Quel est le vrai enjeu du procès d’appel ? Irène Frachon estime que « la question clé porte sur l’escroquerie, dont auraient été victimes les caisses d’Assurance maladie et les mutuelles, de la part de Servier. On ne comprend pas pourquoi le jugement en première instance a rejeté ces demandes qui semblent fondées ». L’addition potentielle se chiffre à 350 millions d’euros. Il s’agit des montants versés par les caisses aux patients, suite à l’achat de ce médicament, et aux opérations chirurgicales qu’elles ont dû rembourser, pendant ses 35 ans de mise sur le marché. Le laboratoire Servier, qui a lui aussi fait appel, devra-t-il payer une addition plus lourde que prévu, ou s’en sortira-t-il mieux ? Ce sera l’intérêt majeur de ce deuxième acte du procès Mediator.

Un premier procès entre 2019 et 2020

Le procès en première instance s’était étalé sur dix mois, entre le 23 septembre 2019 et le 6 juillet 2020. Dans son jugement du 29 mars 2021, le tribunal correctionnel de Paris a condamné l’ancien numéro 2 du groupe Jean-Philippe Seta à une peine de quatre ans d’emprisonnement avec sursis, et six sociétés du groupe Servier à payer chacune 375 000 euros chacune, soit 2,25 millions d’euros, pour les délits de « tromperie aggravée, homicides involontaires, blessures involontaires ».

Le tribunal avait alors considéré que les laboratoires Servier et M. Seta sont « les auteurs d'une fraude d'une ampleur considérable et inédite, dont ont été victimes des milliers de patients », alors qu'ils « disposaient, à partir de 1995, de suffisamment d'éléments pour prendre conscience des risques mortels qu'ils faisaient courir » aux utilisateurs du Mediator.

L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM, ex-Afssaps) a été condamnée pour les délits d’homicides involontaires et blessures involontaires à une amende de 225 000 euros. Plusieurs experts ont été condamnés à des peines de prison avec sursis et au paiement d’amendes pour « atteinte à la probité ». L’ANSM et les experts n’ont pas fait appel, seuls donc seront rejugés les laboratoires Servier, et M. Seta.

Par ailleurs, le tribunal a condamné Servier à payer des réparations civiles à plus de 4 000 personnes, à hauteur de plus de 200 millions d’euros. « On imagine que les sommes qui leur ont été versées ne leur seront jamais réclamées ultérieurement », ose espérer Charles Joseph-Oudin, un des avocats vedette de ce procès.

Marc Payet


Source : lequotidiendumedecin.fr