Urgences : « Non, les libéraux ne sont pas démissionnaires ! », le coup de gueule d’une généraliste

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Publié le 30/03/2018
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Crédit photo : SPL/PHANIE

Oui la crise des urgences est grave et il est nécessaire d’agir rapidement pour éviter le pire. Mais le Dr Julie Mazet refuse que les pouvoirs publics donnent l’impression que les médecins libéraux ont démissionné. La secrétaire générale des Généralistes-CSMF avait déjà peu goûté la sortie de la ministre de la Santé sur les soins non programmés cet hiver. « C’est bien de saluer le travail hospitalier, mais les discours politiques donnent parfois l’impression qu’en ville nous ne faisons rien, alors qu’on prend déjà en charge les soins non programmés », rappelle la généraliste de Monnetier-Mornex (Savoie). La jeune médecin a de nouveau peu apprécié la dernière sortie de la ministre de la Santé, dimanche dernier, sur France Inter, qu'il fallait « réorganiser » la médecine de ville pour « désengorger les urgences » où sont prises en charge une « majorité de personnes qui ne devraient pas y être ».

Pour autant, le Dr Mazet est loin d’une vision idyllique de la situation : « Nous sommes tout à fait conscients qu’il faut un travail sur les soins non programmés, pour notre syndicat cela fait partie des priorités. Nous sommes effectivement prêts à mieux nous coordonner », souligne-t-elle. Le Dr Mazet met d’ailleurs en avant de nombreux libéraux déjà « particulièrement dynamiques » sur le sujet et qui « ne baissent pas les bras ».

Passer à la caisse

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Fin avril, le député Thomas Mesnier, lui-même médecin urgentiste, doit rendre son rapport à Agnès Buzyn sur les soins non programmés. Mais selon elle, avancer sur le sujet nécessitera à un moment donner de passer à la caisse du côté du ministère. « Nous réclamons par exemple de pouvoir intégrer le samedi matin à la permanence des soins, mais pour l’instant les pouvoirs publics nous opposent une fin de non-recevoir car il refuse de le financer. Quand on connaît le prix d’un passage aux urgences c’est complètement incohérent », explique-t-elle.

Elle estime aussi que si les libéraux peuvent éventuellement être prêts à réserver deux à trois places par jour à des soins non programmés, cela ne peut pas se faire à 25 euros. « Lorsque l’on reçoit un patient dont on n’est pas médecin traitant, qu’on ne connaît pas, cela prend plus de temps de connaître ses antécédents, d’ouvrir un dossier etc ». Et aujourd’hui, ce qui est mis en place est inadapté selon elle « la nouvelle majoration MRT, lorsqu’un patient est adressé par le Samu, nous concerne très peu ».

Un travail d'éducation

Lorsqu’il s’agit de soins non programmés, le Dr Mazet estime aussi qu’il est indispensable de parler d’éducation. « On doit expliquer aux patients qu’il n’est pas forcément nécessaire de consulter tout de suite pour tout. » Et alors que le tiers payant vient d’être remis sur la table, la généraliste rappelle que le tout gratuit participe aussi à l’engorgement des urgences. « Ce n’est pas la généralité, mais il y a effectivement un réflexe consumériste d’une partie des patients. Aux urgences, on voit par exemple régulièrement des personnes venir pour un certificat sportif », explique-t-elle. Voisine de la Suisse, elle constate que chez les Helvètes, où les patients ont une franchise de 2 500 euros, la consommation de soins n’est pas la même. « Aux Pays-Bas également vous ne pouvez pas voir le médecin si vous n’avez pas eu 39°, trois jours d’affilée », raconte-t-elle. « En France nous avons accès facilement à un médecin et c’est très bien, mais cela peut aussi avoir des effets pervers ».


Source : lequotidiendumedecin.fr