Défiscalisation : le vrai prix de revient d’une dépense professionnelle

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Publié le 12/11/2021
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Le médecin libéral sait qu’une dépense professionnelle déductible de ses recettes diminue d’autant son revenu imposable, et donc son impôt personnel. Et la dépense diminuant aussi l’assiette de ses cotisations sociales obligatoires, il obtient dans la foulée une « défiscalisation » sociale en prime. Oui, mais de combien en réalité ?

Crédit photo : GARO/PHANIE

L‘impact réel des prélèvements obligatoires fiscaux et sociaux évités par une dépense professionnelle est souvent fantasmé en raison de la complexité à le calculer correctement.

Les grands principes

■ Sous réserve que la dépense soit bien de nature professionnelle (ou admise comme telle par le fisc) et donc déductible, la défiscalisation obtenue sur le duo « impôt + cotisations sociales obligatoires (CSO) est toujours plus puissante qu’une défiscalisation de type privée (dite patrimoniale) qui ne porte en général que sur le seul impôt (IRPP). C’est pourquoi, quand on recherche une défiscalisation, il est toujours plus intéressant de privilégier celles à caractère professionnel : location à soi-même de son propre local professionnel, épargne salariale, CESU, chèques vacances, chèques cadeaux, chèques restaurant, complémentaire santé d’entreprise, crèches et gardes d’enfants, même si certaines sont complexes à mener.

■ La puissance de la défiscalisation professionnelle est individuellement variable : elle dépend de vos taux d’imposition à ces prélèvements obligatoires fiscaux et sociaux, eux-mêmes mouvants selon vos revenus professionnels attendus et ceux de votre foyer fiscal. 

Attention aux leurres – Certaines dépenses professionnelles, réalisant une défiscalisation, ne sont pas déductibles sur le plan social car elles sont à réintégrer dans l’assiette de calcul de vos prélèvements sociaux obligatoires. Les prototypes en sont vos (éventuelles) cotisations sociales dites facultatives : tous vos versements dans le cadre de contrats Madelin (retraite mais aussi prévoyance professionnelle), certains versements d’épargne salariale, et enfin tous vos rachats de cotisations et points de retraite.

Les outils pour faire vos calculs

Sur le versant fiscal, le simulateur d’IRPP de www.impots.gouv.fr est un moteur de calcul fiable et facile d’accès. Désormais, il traite bien les situations fiscales complexes comportant une grande diversité de catégories de revenus pour un même foyer fiscal. Vous pouvez donc facilement apprécier vous-même l’impact fiscal de votre dépense déductible en quelques clics.

Sur le versant social, c’est une toute autre histoire ! Malgré ce que vous lirez ou entendrez, il n’existe aucun outil (commercialisé ou libre) disponible pour faire vos calculs en raison de l’extrême complexité d’apprécier tant l’assiette que le taux de presque chacun de vos prélèvements sociaux dus. Cela vaut pour vous et pour les professionnels du chiffre qui vous assistent. En effet, en raison de leurs incessantes modifications (réformes + aides conventionnelles), il n’existe à ce jour en France aucun éditeur de logiciel capable de fournir un outil intégré exact de calcul des cotisations sociales du médecin libéral à jour. Le seul existant ayant tenté de relever le défi, utilisé par les cabinets comptables, calcule faux chaque année et n’est pas mis à jour correctement, chez les professions de santé dépendant du système conventionnel. 

Les grands repères chiffrés 2021

Le tableau ci-contre vous donne les résultats issus de nos calculateurs internes de cinq situations courantes concernant un médecin libéral célibataire, selon son BNC habituel et son secteur d’exercice, en métropole et déclarant au réel.

Il montre que, par le jeu subtil des prélèvements fiscaux ou sociaux, le prix de revient réel d’une dépense professionnelle de 1 000 € est chez tous de l’ordre de la moitié de son coût et cela de manière stable. Étonnant. Pourquoi ?

■ Lorsque le BNC est bas, ce sont les (hauts) prélèvements sociaux qui diminuent le plus le prix de revient de la dépense. Et inversement, plus le BNC grimpe, plus les (de plus en plus hauts) prélèvements fiscaux en diminuent le prix de revient. Mais dans ce cas de figure, les prélèvements sociaux tendent à devenir relativement moins élevés du fait de divers (et hauts) plafonds de toutes les cotisations Carmf. 

■Attention : dans le rare cas d’une dépense professionnelle importante et déductible en une seule fois, votre TMI (taux marginal d’imposition) ne serait plus le critère fiscal le plus approprié pour en calculer le prix de revient réel. Il faudrait alors vous servir du taux d’imposition moyen de votre foyer fiscal, toujours plus faible mais plus régulier.

INSERRER ICI LE TABLEAU Prix de revient réel d’une dépense professionnelle supplémentaire de 1 000 € en 2021

Nos orientations – La publication de ce constat n’est pas de vous pousser à réaliser des dépenses professionnelles inutiles même si, sur la foi de nos chiffres, vous pouvez escompter une réduction réelle avoisinant les 50 %, sauf situation fiscale ou/et sociale particulière. Mais au contraire de vous inviter à vous interroger sur les meilleurs moyens d’en augmenter paradoxalement leur prix de revient réel ! C’est-à-dire de chercher s’il n’est pas avant tout possible de diminuer nettement la pression de vos prélèvements obligatoires fiscaux et sociaux. Comment ? Essentiellement par les défiscalisations professionnelles citées en début d’article : location à soi-même, épargne salariale, CESU, etc. Sans oublier les autres pistes déjà signalées ici depuis début septembre 2021.

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Pascal Lamperti plamperti@media-sante.com
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Source : Le Quotidien du médecin