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Vérification de comptabilité, ce qu'il faut savoir

Publié le 20/11/2020
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Même si les contrôles fiscaux sont moins fréquents depuis la création des AGA, les médecins libéraux peuvent toujours faire l'objet de ce type de procédures. Quelles sont les démarches à effectuer et comment faire valoir vos droits lorsque l'inspecteur des impôts se manifeste ?

Crédit photo : PHANIE

Depuis la création des associations agréées, le nombre des vérifications de comptabilité a énormément diminué. Il est bien loin le temps – fort heureusement ! – où un contribuable pouvait faire l’objet de plusieurs contrôles consécutifs ! Contrôles qui portaient de plus sur quatre années, au lieu de trois actuellement.

Mais les procédures de vérification sont toujours en vigueur et les professionnels libéraux peuvent encore être soumis à une telle vérification, même s’ils ne sont plus systématiquement dans le collimateur de l’administration. Voici pourquoi nous vous donnons les principales informations à connaître pour surmonter au mieux ce qui reste un mauvais moment à passer.

Toute vérification commence par la réception d’un courrier. Un beau jour, vous recevez en recommandé avec avis de réception un pli émanant de l’administration fiscale qui contient un « avis de vérification de comptabilité ».

Reprise et FEC

L’avis indique tout d’abord les années qui seront vérifiées. Car l’administration est soumise aux règles de la « prescription ». En effet, le « délai de reprise », c'est-à-dire le délai pendant lequel l’administration peut faire des redressements, expire à la fin de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l’imposition est due.

Ainsi, à partir du 1er janvier 2021, vous pourrez faire l’objet de rehaussements sur les années 2018, 2019 et 2020. Une exception toutefois : compte tenu de l’année blanche, l’exercice 2018 pourra être redressé sur quatre années, et non trois (donc jusqu’au 31 décembre 2022).

Dans cet avis, un agent de l’administration vous annonce sa prochaine visite et vous demande de lui préparer certains documents. Il vous demande notamment de mettre à sa disposition une copie de vos « fichiers des écritures comptables » (FEC) pour les années soumises à vérification. Bien entendu, si vous tenez votre comptabilité manuellement, vous n’avez rien à lui fournir.

Attention, si votre comptabilité est informatisée et si vous ne présentez pas au vérificateur vos FEC, vous risquez une amende de 5 000 euros !

Le déroulement

L’inspecteur va venir un certain nombre de fois, généralement une fois par semaine. Il est difficile d’indiquer avec précision combien de temps peut durer la vérification sur place.

Elle est malgré tout limitée à trois mois si vos recettes pour chaque année vérifiée ne dépassent pas 279 000 euros. Ce qui est une des garanties qui vous sont offertes par le code général des impôts.

Parmi ces garanties, figure également la possibilité de vous faire assister par un conseil et l’obligation qui est faite à l’administration de vous en informer.

Le vérificateur va donc examiner votre comptabilité. Le premier rendez-vous doit impérativement se dérouler sur votre lieu d’exercice (il est généralement bref et dure environ une heure). Votre présence est indispensable lors de ce premier contact (l’inspecteur va vous poser des questions sur votre exercice professionnel), ensuite vous pourrez laisser faire votre expert-comptable (les rendez-vous peuvent avoir lieu à son cabinet s’il en est d’accord).

Vous allez ensuite recevoir une « proposition de rectification ». Ces redressements pourront être effectués selon deux procédures très différentes. Et le choix de ces procédures aura une grande importance pour le déroulement ultérieur du contrôle.

Il est également important que vous ayez un contact avec le vérificateur avant qu’il n’envoie la notification de redressement. Car ce qui figure par écrit dans la notification est toujours difficile à modifier par la suite.

Si l’administration n’a rien de grave à vous reprocher, elle utilisera la procédure normale dite « contradictoire ». Vous aurez alors trente jours pour présenter par écrit vos observations au vérificateur et lui indiquer, la plupart du temps, que vous n’êtes pas d’accord avec les redressements qu’il se propose d’effectuer ! Pendant ces trente jours, vous pourrez demander à rencontrer l’inspecteur pour lui présenter vos arguments et essayer de vous mettre d’accord avec lui. Le vérificateur vous adressera ensuite une « réponse aux observations du contribuable » dans laquelle il indiquera les redressements qu’il abandonne et ceux qu’il maintient.

La commission départementale

Cette réponse mentionne également la possibilité que vous avez de demander que le litige soit soumis à la « commission départementale des impôts directs ».

Cette commission composée d’un juge du tribunal administratif, de quatre représentants des contribuables et de trois représentants de l’administration, est compétente pour donner un avis sur les problèmes de fait. Il est donc inutile de lui soumettre des questions de droit, puisqu’elle se déclarera alors incompétente.

L’avis de la commission vous sera communiqué par l’administration qui vous indiquera si elle suit l’avis de la commission ou si elle maintient sa position initiale (ce qui arrive très rarement). C’est la partie qui conteste l’avis de la commission qui supporte la charge de la preuve dans l’instance ultérieure.

Quelques mois après avoir reçu l’avis de la commission ou, si vous ne l’avez pas saisie, la réponse aux observations du contribuable, vous recevrez l’avis de mise en recouvrement des impositions complémentaires.

La réclamation préalable

Vous pouvez alors, si vous estimez avoir été redressé à tort, adresser une « réclamation » au directeur des services fiscaux dont dépend votre service des impôts. Une simple lettre suffit, dans laquelle vous exposerez vos arguments et demanderez en outre à bénéficier du sursis de paiement pour les sommes contestées.

Il y a de fortes chances pour que votre réclamation soit rejetée (on ne voit pas pourquoi l’administration changerait d’avis !). Mais il reste encore un recours : dans les deux mois de la notification du rejet, vous pouvez saisir le tribunal administratif. Là encore, les formalités sont réduites au minimum : il suffit d’adresser votre demande en trois exemplaires au greffe du tribunal. Et vous pouvez demander à conserver le sursis de paiement accordé lors de la réclamation.

Après un échange de « mémoires » avec l’administration, le tribunal tranchera l’affaire et si la décision ne vous convient pas, il vous restera un recours devant la « cour administrative d’appel » puis, si vous n’avez toujours pas obtenu satisfaction, un ultime recours devant le Conseil d’État !

La procédure d’office

Le vérificateur peut, dans certains cas (déclaration de résultats souscrite en retard, rejet de la comptabilité, non remise des FEC) utiliser une autre procédure pour effectuer les redressements, la « procédure d’office ».

Comme dans la procédure normale, il vous adressera une proposition de rectification. Mais il ne vous sera pas possible de demander l’avis de la commission départementale des impôts. De plus, il pourra effectuer la mise en recouvrement de l’impôt supplémentaire 30 jours après la réception de la notification, sans être obligé de tenir compte de votre réponse.

Enfin, vous ne pourrez vous défendre ultérieurement qu’en démontrant que le bénéfice fixé par l’inspecteur est exagéré, ce qui est toujours difficile à faire.

On voit donc que l’utilisation d’une procédure d’office enlève aux contribuables des moyens de défense importants. D’où l’intérêt primordial d’une comptabilité bien tenue et de déclarations déposées dans les délais.

Jacques Gaston-Carrère abcliberal@orange.fr

Source : Le Quotidien du médecin