Pénurie des médicaments, formation des médecins, transparence des liens d’intérêts… Frédéric Collet a répondu à vos questions sur le sujet pendant plus d’une heure au cours d’un Live chat sur lequotidiendumedecin.fr.
Le président du LEEM (Les entreprises du médicament) et de Novartis France reconnaît la nécessité d’améliorer le dialogue entre les acteurs du monde de la santé pour éviter de nouvelles affaires Lévothyrox. Il est également favorable à une refonte du site sur la transparence des liens d’intérêts afin d’en améliorer et d’en simplifier le fonctionnement. Sur la question de la pénurie des médicaments, Frédéric Collet invoque la complexité de la situation, mais il assure que l’industrie a la volonté d’améliorer l’informations aux médecins en cas de rupture d’un produit.
Le Live chat va bientôt commencer. Nous accueillons aujourd’hui Frédéric Collet, président du LEEM (Les entreprises du médicament) et de Novartis France. Comment établir une relation saine entre les médecins et les laboratoires pharmaceutiques, loin des suspicions et des polémiques ? C’est le thème de ce Live chat. Frédéric Collet répondra à vos questions en direct pendant près d’une heure.
Le thème de notre entretien est celui d'une relation saine et sans polémiques. Ce dialogue est essentiel. Nous contribuons tous à une même tâche qui est de soigner et d'établir la confiance dans les traitements mis à disposition des patients que nous sommes tous. C'est dans un dialogue collectif et ouvert que nous pouvons y parvenir.
Comme vous le soulignez, ces ruptures sont d'origines très diverses et peuvent intervenir sur l'ensemble de la chaîne de fabrication et de mise à disposition du médicament. La première cause des ruptures est d'abord liée à une demande mondiale en très forte expansion, liée à l'évolution de l'ensemble des systèmes de santé et à la prise en charge des patients.
D'autres facteurs sont liés à la complexification de la chaîne de production, des technologies, des contrôles et des obligations réglementaires.
Nous avons publié en février 2019 des recommandations partagées avec la ministre de la Santé de l'époque pour répondre à ces questions et s'assurer que les patients disposent en toutes circonstances des traitements dont ils ont besoin. La crise actuelle montre combien c'est essentiel.
On peut retenir trois axes prioritaires dans ces mesures : le premier pour identifier les médicaments pour lesquels les obligations de sécurisation doivent être renforcés, la seconde pour favoriser la localisation en Europe et l'autonomie sanitaire, et la troisième pour structurer et favoriser le partage d'informations pour l'ensemble des acteurs. C'est cette mesure qui répond particulièrement à la question que vous soulevez.
Je souligne une nouvelle fois que les causes sont multiples et que l'ensemble des acteurs doivent se mobiliser.
Cette question illustre la nécessité du dialogue entre les autorités de santé, en l'occurence l'ANSM, les laboratoires, les patients et les médecins qui les prennent en charge.
Je rappelle que le changement de formulation a eu lieu à la demande des autorités de santé et que ce changement n'a pas été suffisamment accompagné et expliqué pour assurer la confiance nécessaire des patients. Ce n'est donc pas le traitement lui-même ni son efficacité qui étaient en cause, mais je comprends l'émotion des patients suivant un traitement chronique dont on modifie la composition.
Ce dossier nous amène à repenser globalement le cadre de l'information des patients et du dialogue avec les médecins prescripteurs et les autorités de santé.
Ces informations sont disponibles en temps réel sur le site de l'ANSM à l'intention des professionnels de santé.
La mise en place du DP rupture vise à améliorer significativement le partage de l'information. Je suis conscient que ce point reste sensible et qu'il y a une volonté partagée de l'ensemble des acteurs pour améliorer encore cette situation.
Concernant la capacité d'innovation, elle n'a jamais été aussi fertile qu'aujourd'hui. Je cite par exemple l'immunothérapie dans le domaine du cancer, les thérapies géniques et cellulaires en ophtalmologie, hématologie ou certaines maladies rares, et également plus généralement les médicaments de biotechnologies qui représenteront bientôt 50 % de la pharmacopée.
Je vous invite à consulter sur le site leem.org le rapport "Santé 2030" qui fait un état passionnant de l'innovation scientifique et technologique des dix prochaines années. Ce rapport est le fruit d'un travail d'une trentaine de scientifiques éminents et souligne combien la question qui s'adresse à nous aujourd'hui est plus des conditions dans lesquelles nous pouvons assurer l'accès de ces traitements très innovants à tous les patients qui les attendent.
La seconde partie de votre question concerne l'évaluation et la reconnaissance de l'innovation. Le LEEM, dans le contexte de cette accélération de la science et du progrès thérapeutique, considère que les conditions de l'évaluation doivent être revues, en commençant par l'évaluation scientifique (SMR/ASMR).
Je suis personnellement favorable à ce que la question de l'évaluation européenne puisse progresser pour assurer une cohérence entre les pays.
Il est de la responsabilité d'un laboratoire qui cherche, développe, fabrique et commercialise un médicament de s'assurer également de son bon usage et c'est le rôle de la visite médicale.
La visite médicale est très encadrée, conformément à la charte que nous avons signée avec le Comité économique des produits de santé (CEPS). C'est un métier qui évolue profondément, notamment du fait de l'arrivée du digital et de l'évolution des traitements que nous développons.
L'innovation thérapeutique a aujourd'hui pour caractéristiques de s'adresser à des populations de plus en plus ciblées et avec des traitements de plus en plus complexes et personnalisés, et requiert donc un accompagnement adapté de la part des entreprises qui les développent pour assurer leur bon usage. Je souligne qu'un des rôles de la visite médicale est également de participer à la chaîne de pharmacovigilance.
Nous demandons toutefois que la consultation, le fonctionnement de ce site et l'usage de ces données soient améliorés et simplifiés pour assurer pleinement toutes les conditions de la transparence.
Le choix de la prescription reste pleinement celui du médecin, qui use de son libre arbitre pour choisir les traitements adaptés aux besoins de son patient.
Il s'agit aujourd'hui de reconstruire en parallèle les conditions de la compétitivité des entreprises locales par rapport à la concurrence asiatique en particulier, et de l'attractivité de notre pays pour qu'y soient développés et produits les molécules et les traitements de la nouvelle pharmacopée.
Le plan de relance annoncé par le gouvernement confirme la reconnaissance du caractère stratégique des entreprises de santé et les mesures annoncées sont un signal positif en ce sens. Je souhaite qu'elles nous permettent de renforcer l'autonomie sanitaire de l'Europe.
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