Pathologie coronaire

Il n’y a pas de petit tabagisme

Publié le 03/12/2012
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LE TABAGISME chez les femmes progresse et crée dans cette population une augmentation des infarctus du myocarde (IDM) chez les femmes jeunes. Selon les estimations françaises 2012, si un décès sur quatre lié au tabagisme est cardio-vasculaire, c’est plus de un sur trois chez les femmes (1). « Ceci est à rapprocher de l’analyse de l’évolution annuelle des hospitalisations en France pour IDM selon le sexe et la classe d’âge entre 2002 et 2008 : elle révèle une augmentation significative des IDM pour les femmes entre 35 et 54 ans alors qu’il y a une baisse significative pour l’ensemble de la population (2). Cette évolution est bien corrélée à la progression de 7 points du pourcentage de fumeuses entre 45-65 ans (3) », souligne le Pr Daniel Thomas.

Il faut noter que, si l’obésité et le diabète sont également en progression chez les femmes de ces âges, ce sont des facteurs de risque à terme. Alors que, comme le fait remarquer D. Thomas, « les accidents cardio-vasculaires liés au tabac apparaissent de façon très rapide avec l’augmentation de la population fumeuse ». On remarque également que le risque relatif de décès pour maladie cardio-vasculaire liée au tabagisme est d’autant plus important que les sujets sont jeunes (5,5 pour les hommes de 30-44 ans contre 1,88 pour les 60-69 ans et 3,78 pour les femmes de 45 à 59 ans contre 1,68 pour les 70 à 79 ans) (1).

Une métaanalyse a recensé toutes les études comparant l’incidence du risque de maladie coronaire liée au tabagisme chez les hommes et chez les femmes : elle montre une augmentation de 25 % du risque cardio-vasculaire chez les femmes fumeuses par rapport aux hommes fumeurs (4).

Arrêt toujours bénéfique.

L’étude « one million women » démontre que les fumeuses perdent 11 ans d’espérance de vie par rapport aux non fumeuses. On remarque qu’à l’âge de 60 ans par exemple, 4 % des femmes non fumeuses et 10 % des fumeuses sont décédées. À 70 ans, la situation est encore plus caricaturale puisque 9 % des femmes non fumeuses et 24 % des fumeuses sont décédées (5). En outre, cette même étude montre que l’arrêt avant l’âge de 40 ans élimine 90 % du surrisque de décès cardio-vasculaire lié au tabagisme et 100 % du surrisque si l’arrêt survient avant l’âge de 30 ans. « De toute façon, insiste le Dr Thomas, quel que soit l’âge, l’arrêt du tabac est bénéfique. Par ailleurs, quel que soit le nombre de cigarettes fumées par jour, le risque existe ; il n’y a pas de petit tabagisme ».

Après un IDM.

La persistance d’un tabagisme après un IDM est un facteur pronostique majeur de décès. Une étude italienne évalue à 62 % le taux de rechutes du tabagisme à un an et montre que le risque de décès est d’autant plus important que la rechute survient précocement (x 5,3 pour les rechutes immédiates) (6). D’où l’intérêt pour les patients que leur addiction soit prise en charge lors du séjour en unité de soins intensifs cardiologiques.

Entretien avec le Pr Daniel Thomas, institut de cardiologie, GH La Pitié-Salpêtrière

(1) Hill C. Épidémiologie du tabagisme. Rev Prat 2012;62:325-9.

(2) de Peretti C et coll. Bull Epidemiol Hebd 2012 n°41 / 6 novembre 2012:459-65.

(3) Sources : Baromètres Santé 2005 et 2010, INPES.

(4) Huxley RR, Woodward M. Lancet 2011;378:1297-305.

(5) Pirie K et coll. Lancet online 2012 Oct27.

(6) Colivicchi F et coll. Am J Cardiol 2011;108:804-8.

Dr Brigitte MARTIN

Source : Le Quotidien du Médecin: 9199