Traitement des petites tumeurs rénales

La néphrectomie partielle est une option à retenir en priorité

Publié le 29/04/2011
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UNE TUMEUR rénale est considérée comme petite lorsque son diamètre est inférieur à 4 cm, quel que soit son stade. Cette définition correspond donc en principe à la définition d’une tumeur de classe T1a, mais peut aussi s’appliquer à une tumeur de classification T3a, c’est-à-dire avec envahissement de la graisse périrénale. Par ailleurs, certaines tumeurs de plus de 4 cm peuvent être traitées de manière identique. Ces tumeurs sont asymptomatiques dans la majorité des cas.

Ces vingt dernières années, l’incidence des petites tumeurs rénales n’a cessé d’augmenter, leur incidence s’étant accrue de 50 % entre 1983 et 2002 (1).

La tomodensitométrie (TDM) abdominale, thoracique et pelvienne est l’examen de première intention avant l’intervention. Une imagerie cérébrale et/ou osseuse est réalisée en cas de symptomatologie suspecte. Une imagerie par résonance magnétique nucléaire peut être nécessaire en cas de doute sur un processus malin évolutif.

Dans la plupart des cas, le diagnostic est confirmé par l’examen anatomopathologique de la pièce opératoire. Mais dans certaines circonstances, une biopsie percutanée peut être réalisée, si son résultat peut modifier la conduite à tenir, en cas de suspicion de tumeur secondaire (lymphome, métastase) et si un traitement médical néoadjuvant est envisagé dans le cadre d’un essai clinique. Une biopsie percutanée peut également être discutée si une lésion bénigne est suspectée (2).

Le patient doit participer au choix de la stratégie thérapeutique.

La stratégie thérapeutique dépend de la tumeur elle-même (classification TNM, taille, localisation, grade, histologie), du patient (état général, âge, fonction rénale, comorbidités notamment) et des disponibilités locales en termes de plateau technique (chirurgie mini-invasive, cryothérapie, chirurgie robotisée, etc.). Dans tous les cas, l’information du patient doit être complète. Celui-ci doit participer au choix et être informé des risques de l’intervention, notamment de l’éventualité d’une possible chirurgie radicale ou à ciel ouvert, et des suites opératoires.

Les principales options sont la surveillance active, la néphrectomie, à ciel ouvert ou laparoscopique, radicale ou partielle, et les techniques mini-invasives (cryothérapie, ablation par radiofréquence ou ultrasons focalisés à haute intensité, par exemple).

Pour le traitement des petites tumeurs, la néphrectomie partielle est l’option qui doit être retenue en priorité. Celle-ci est actuellement le plus souvent faite en chirurgie ouverte en raison de la difficulté de cette chirurgie en laparoscopie, robot assistée ou non, du risque hémorragique et d’une durée de clampage de l’artère trop longue pour avoir une bonne conservation de la fonction rénale. Si la néphrectomie partielle n’est pas retenue, la préférence va à la néphrectomie radicale laparoscopique.

La voie laparoscopique devient la technique de référence.

Globalement, la morbidité de ce type d’intervention est de 17 % et sa mortalité de 0,3 %. La néphrectomie radicale par voie laparoscopique, qui reproduit pas à pas les étapes de la chirurgie à ciel ouvert, elle devient de plus en plus la technique de référence pour des tumeurs pouvant atteindre jusqu’à 14 cm. Les résultats au long cours des deux techniques sont en effet superposables, de même que la durée de l’intervention, mais les suites opératoires sont plus simples et la récupération plus rapide après laparoscopie (3). Pour certains auteurs, les résultats de la néphrectomie radicale par voie laparoscopique seraient même supérieurs à ceux de la chirurgie à ciel ouvert (4). La néphrectomie partielle semble avoir des résultats oncologiques équivalents à ceux de la néphrectomie radicale (5). De plus, elle réduirait la mortalité générale et préserverait le capital néphronique. Malheureusement, les résultats de la seule étude prospective sur ce point ne confirment pas ces données (6). Ses indications électives, dans lesquelles ses résultats sont convaincants, nécessitent un rein controlatéral normal, la tumeur doit être facilement accessible et elle doit mesurer moins de 4 cm (7). Toutefois, les tumeurs de plus de 4 cm sont résécables si elles sont exophytiques et, inversement, les petites tumeurs peuvent être difficiles à réséquer si elles sont centrales.

Enfin, l’énucléation, avec dissection le long de la pseudocapsule, n’est pas recommandée en raison de son risque élevé de marges positives.

Les techniques telles que la cryothérapie ou la radiofréquence percutanées sont actuellement en évaluation. La surveillance active a sa place pour les petites tumeurs asymptomatiques chez les patients à espérance de vie courte.

D’après un entretien avec le Pr Didier Jacqmin (Service de chirurgie urologique, hôpitaux universitaires, Strasbourg)

(1) Hollingsworth JM, et coll. Rising incidence of small renal masses: a need to reassess treatment effect. J Natl Cancer Inst 2006;98(18):1331-4.

(2) Shannon BA, et coll. The value of preoperative needle core biopsy for diagnosing benign lesions among small, incidentally detected renal masses. J Urol 2008;180(4): 1257-61.

(3) Berger A, et coll. Laparoscopic radical nephrectomy for renal cell carcinoma: oncological outcomes at 10 years or more. J Urol 2009;182(5):2172-6.

(4) Thompson RH, et coll. Radical nephrectomy for pT1a renal masses may be associated with decreased overall survival compared with partial nephrectomy. J Urol 2008;179(2):468-71.

(5) Huang WC, et coll. Partial nephrectomy versus radical nephrectomy in patients with small renal tumors--is there a difference in mortality and cardiovascular outcomes? J Urol 2009 ; 181 (1) : 55-61.

(6) Van Poppel H, et coll. A prospective, randomised EORTC intergroup phase 3 study comparing the oncologic outcome of elective nephron-sparing surgery and radical nephrectomy for low-stage renal cell carcinoma. Eur Urol 2011;59(4): 543-52.

(7) Touijer K, Jacqmin D, et coll. The expanding role of partial nephrectomy: a critical analysis of indications, results, and complications. Eur Urol 2010;57(2):214-22.

Dr GÉRARD BOZET

Source : Le Quotidien du Médecin: 8952