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Dossier

46e Congrès annuel de la Société francophone du diabète

Un référentiel pour booster la vaccination des diabétiques

Publié le 03/04/2020
Un référentiel pour booster la vaccination des diabétiques


Prévu fin mars, le congrès annuel de la Société francophone du diabète a été reporté en septembre. En avant-première, focus sur quelques sujets phare de cette 46e édition, tel que le premier référentiel dédié à la vaccination des diabétiques. Grippe, pneumocoque, tétanos… ce document met en exergue l’importance du surrisque infectieux chez le diabétique et les bénéfices de la vaccination dans cette population.

Dans un référentiel publié récemment sous la houlette du Pr Ariane Sultan (Montpellier) et du Pr Bernard Bauduceau (Saint-Mandé), la Société francophone du diabète (SFD) met un coup de projecteur sur une question cruciale mais rarement évoquée : celle des complications infectieuses du diabétique et de leur prévention vaccinale. « On connaît la problématique du pied diabétique, indique le Pr Sultan, mais d’autres infections ont une incidence majorée au cours de cette pathologie. »

Un surrisque infectieux bien documenté

L’ensemble des études convergent et un registre canadien a établi que le diabète était associé à un surrisque d’infection de 21 % en moyenne. De plus, le diabète est un facteur de récidive et de sévérité de l’infection. Le taux de mortalité des suites d’une infection est aussi plus important.

Les explications à ce surrisque sont multiples. Le diabète induit un déficit immunitaire acquis modéré et plusieurs dysfonctionnements immunitaires ont été décrits (altération des neutrophiles et diminution des lymphocytes Natural Killer). En altérant la microcirculation, le diabète peut aussi retarder la réponse à l’infection. Une neuropathie végétative favorise la colonisation urinaire par des micro-organismes qui vont proliférer d’autant plus en cas d’hyperglycémie. Par ailleurs, certains germes sont plus virulents dans un milieu riche en glucose. En retour, les infections déséquilibrent le diabète, créant un cercle vicieux.

Grippe et pneumocoque au premier plan

Les infections respiratoires sont celles dont l’incidence est parmi les plus élevées en cas de diabète. Pour la grippe, une étude de cohorte chez les moins de 65 ans rapporte une augmentation de 6 % du risque d’hospitalisation pour complications de l’infection grippale chez le diabétique par rapport à la population générale. Le risque est accru en cas de diabète mal équilibré. Il n’existe pas d’études randomisées démontrant directement le bénéfice clinique de la vaccination anti-grippale en population diabétique. Toutefois, « des études cas-témoins et de cohorte confirment que la vaccination chez la personne diabétique est associée à une diminution du risque infectieux et de l'incidence d'hospitalisation pour grippe sévère », indique le Pr Sultan. Du point de vue des couvertures vaccinales, environ 30 % des moins de 55 ans et 60-70 % des plus de 65 ans seraient vaccinés (chiffres 2008-2011).

Concernant les infections invasives à pneumocoque (IPP), le risque est 2,3 fois supérieur chez le diabétique par rapport à la population générale et augmente considérablement avec l’âge. Malgré cela, la couverture vaccinale ne serait que de 20 à 30 % chez les diabétiques. Pourtant, contrairement à la grippe, il existe des études randomisées établissant l’efficacité de la vaccination antipneumococciquedans cette population.

S’agissant du zona, le risque est augmenté de 20 à 30 % en cas de diabète de type 2. La vaccination, encore confidentielle, est recommandée dans la fenêtre 65-74 ans. Elle a démontré une réduction sur l’incidence du zona et des douleurs post-zostériennes chez les plus de 60 ans. Quant au tétanos (71 % de couverture vaccinale auto-déclarée dans une enquête réalisée par la SFD), le diabète est l’un des deux principaux facteurs de risque, avec l’usage de drogues injectables. Enfin, le diabète étant probablement associé à un risque élevé d’évolution de l’hépatite B vers une maladie grave du foie, la vaccination est indispensable chez les diabétiques, tout particulièrement en cas d’insuffisance rénale. Or seuls 34 % se disent vaccinés.

Pour renverser la situation, « tous les ans au minimum, à l’occasion de la vaccination antigrippale, il faudrait faire le point sur la couverture vaccinale de ses patients diabétiques, recommande le Pr Bauduceau. Idéalement, 100 % des diabétiques devraient être protégés contre la coqueluche, le tétanos, le pneumocoque et la grippe ». Aucun vaccin n’est contre-indiqué spécifiquement dans cette population, rassure par ailleurs le Pr Sultan.

Hélène Joubert