L’adénomyose, encore mal connue

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Publié le 16/02/2023
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Pathologie bénigne, l’adénomyose peut entraîner des symptômes invalidants, à type de ménorragies, métrorragies et dysménorrhées. Le point sur les différentes approches thérapeutiques médicales.
La prise en charge se fait en fonction des symptômes et de la localisation des lésions

La prise en charge se fait en fonction des symptômes et de la localisation des lésions
Crédit photo : GARO/PHANIE

Parfois qualifiée d’endométriose interne compte tenu de ses points communs avec l’endométriose, l’adénomyose est une pathologie utérine bénigne, caractérisée par la présence anormale de glandes endométriales et de stroma au sein du myomètre, souvent entourées de cellules musculaires lisses hyperplasiques. Elle se traduit par une hypertrophie diffuse ou localisée de l’utérus.

Le diagnostic se fonde sur l’imagerie (IRM et échographie), l’hystéroscopie et l’histologie.

Plusieurs hypothèses physiopathogéniques

La genèse de cette maladie, asymptomatique dans un tiers des cas, est peu connue et peu étudiée, mais il s’agit d’une pathologie hormonodépendante et plusieurs hypothèses physiopathogéniques sont avancées : l’altération de la signalisation des stéroïdes sexuels, avec surexpression du récepteur aux estrogènes bêta, le caractère invasif de l’endomètre, une réponse immunitaire anormale, des facteurs génétiques ou épigénétiques, notamment des troubles de la méthylation.

À l’imagerie, on distingue l’adénomyose interne, qui peut être superficielle ou profonde (et alors diffuse ou segmentaire), l’adénomyome, une forme focale de glandes adénomyosiques localisées dans le myomètre, qui peut être intramural, intramuqueux ou sous-séreux, et enfin l’adénomyose externe, qui correspond à une endométriose profonde, qui peut s’invaginer dans le myomètre, en position antérieure ou postérieure. Les formes focalisées surviennent avec un pic de prévalence à 30 ans, tandis que les formes diffuses sont un peu plus tardives, touchant plutôt les femmes âgées de 37 à 38 ans.

La prise en charge de l’adénomyose ne concerne que les formes symptomatiques (et non pas les formes de découverte fortuite à l’imagerie, qui ne nécessitent pas de traitement). Elle dépend du phénotype, des pathologies associées, des symptômes (douleurs, saignements), de la tolérance aux traitements au long cours, de l’âge de la patiente et des projets de grossesse.

Des traitements non spécifiques

Les traitements symptomatiques non spécifiques font appel aux anti-inflammatoires non stéroïdiens, qui agissent par un effet antalgique et par une diminution du flux menstruel. Ils ont fait la preuve de leur efficacité, comparativement à un placebo et au paracétamol, mais exposent à des effets secondaires à type de troubles digestifs, céphalées et somnolence et ne sont pas recommandés au long cours.

L’acide tranexamique permet de réduire le flux menstruel comparativement à un placebo ; il est contre-indiqué en cas d’antécédent de thrombose veineuse.

Les traitements hormonaux ont surtout été étudiés chez les femmes ayant une adénomyose interne diffuse. Le dispositif intra-utérin au lévonorgestrel a fait la preuve de son efficacité dans une analyse systématique d’études prospectives : amélioration du taux d’hémoglobine, du volume utérin et de l’épaisseur endométriale. Sa tolérance est globalement bonne, mastodynies et kystes fonctionnels étant les effets indésirables le plus souvent rapportés.

Autre progestatif étudié dans ce contexte : le diénogest, qui a une AMM dans l’endométriose. Ce dérivé de la 19-nortestostérone, dénué d’activité estrogénique, a démontré, dans un essai randomisé japonais, son efficacité sur la douleur, l’intensité des symptômes et le recours aux antalgiques. Il faut attendre plusieurs semaines d’utilisation pour juger de sa tolérance, car le changement de climat hormonal peut induire des effets secondaires en début de traitement.

Une étude récente ayant comparé le diénogest et le DIU au lévonorgestrel conclut à une supériorité du diénogest sur la réduction du volume des règles à 6 et 12 mois. La molécule s’est montrée également supérieure à une contraception estroprogestative dans un autre essai randomisé, au prix de davantage d’effets indésirables.

Enfin, les analogues de la GnRH ont également démontré leurs bénéfices sur les symptômes, les ménorragies et le volume utérin, mais leur impact délétère sur l’os, le système cardiovasculaire et les signes climatériques en limitent leur utilisation au long cours.

D’autres pistes thérapeutiques sont en cours d’évaluation : antagonistes de la GnRH (linzagolix, qui a donné de bons résultats dans une étude pilote sur huit femmes), inhibiteurs de l’aromatase ou, encore en expérimentation animale, un inhibiteur de l’histone désacétylase (l’acide valproïque) et un inhibiteur de la thromboxane A2.

Exergue : DIU au lévonorgestrel et diénogest ont fait la preuve de leur efficacité

Communication des Drs Élodie Chantalat (Toulouse) et Lorraine Maitrot-Mantelet (Paris)

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du médecin