Le speculum, ce n’est pas automatique

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Publié le 16/02/2023
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L’examen pelvien est remis en cause depuis quelques années dans le suivi des femmes en gynécologie et obstétrique. Sa place a fait l’objet de recommandations.
Le choix final revient toujours à la patiente

Le choix final revient toujours à la patiente
Crédit photo : GARO/PHANIE

Le collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) a rédigé des recommandations pour la pratique clinique (RPC) sur l’examen pelvien dans le cadre du suivi des femmes. Chez les femmes asymptomatiques, l’interrogatoire seul occupe une place essentielle et cet examen ne doit pas être systématique.

Lors d’une consultation pour initier une contraception chez une femme asymptomatique, les recommandations diffèrent selon le type de contraception. Les RPC ne préconisent pas d’examen pelvien systématique en sus de l’interrogatoire dans le seul but d’initier une contraception hormonale. Avant la mise en place d’un diaphragme — qui est contre-indiqué en cas de prolapsus ou de malformation vaginale — aucune recommandation n’est formulée, en l’absence d’études ayant évalué l’examen pelvien dans ce contexte. Pour la mise en œuvre d’une contraception par dispositif intra-utérin (DIU), un examen pelvien préalable (pose de spéculum et toucher vaginal [TV]) est recommandé, car il peut permettre de dépister certaines malformations ou une rétroversion utérine et d’améliorer le vécu de la pose du DIU chez les jeunes nullipares.

Pour le suivi de contraception chez une femme asymptomatique, il est recommandé de ne pas pratiquer d’examen clinique pelvien de façon systématique, dans le seul but de dépister les complications de celle-ci. Il n’y a pas de recommandation pour le suivi d’une contraception par diaphragme, en l’absence d’études. L’examen clinique pelvien au spéculum est en revanche recommandé pour le suivi d’une contraception par DIU, afin de vérifier la présence des fils, une recommandation dictée par les résultats d’une étude de cohorte de 2017, qui avait montré qu’un tiers des perforations utérines survenaient après un an d’utilisation du DIU et étaient diagnostiquées dans la moitié des cas lors d’un examen pelvien de routine chez une femme asymptomatique.

Incontinence urinaire, boule vaginale

Chez une femme consultant pour incontinence urinaire, un examen physique pelvien (évaluation de la trophicité vulvovaginale et de la mobilité cervico-urétrale et test à la toux) est recommandé, afin d’orienter la prise en charge et l’informer sur les chances de succès des traitements.

Cet examen reste également le mètre étalon, et est donc recommandé, chez une femme consultant pour une sensation de boule vaginale faisant suspecter un prolapsus, afin d’améliorer le diagnostic et l’efficacité de la prise en charge.

En raison du faible nombre de données, les RPC ne se prononcent pas sur la place de l’examen physique pelvien chez une femme non enceinte et asymptomatique, consultant pour le dépistage des infections sexuellement transmissibles (IST) en population générale. Les experts recommandent en revanche de réaliser soit un autoprélèvement vaginal soit un prélèvement vaginal ou cervical sous spéculum dans le cadre du dépistage des infections à C. trachomatis et N. gonorrhoeae et de ne pas réaliser d’autoprélèvement urinaire.

Dépistage des cancers

Pour le dépistage du cancer du col de l’utérus chez les femmes asymptomatiques, il est recommandé de réaliser un examen pelvien au spéculum conduisant au prélèvement (cytologique ou HPV) entre 25 et 65 ans, tous les trois à cinq ans selon la tranche d’âge. Cette recommandation tient compte de l’organisation actuelle du dépistage en France (texte cytologique réflexe sur hétéroprélèvements) pour le triage. Pour les femmes échappant au dépistage organisé, il est recommandé de proposer des autoprélèvements à la recherche d’HPV oncogènes.

Enfin, il n’est pas recommandé de réaliser systématiquement un TV dans le seul but de détecter un cancer de l’ovaire (pas de recommandation pour le cancer de l’endomètre faute de données suffisantes), ni de faire d’échographie pelvienne ciblée systématique pour la détection des cancers de l’ovaire et de l’endomètre chez une femme asymptomatique sans antécédent personnel ou familial de cancer gynécologique.

Dans tous les cas, le CNGOF recommande de questionner les patientes sur l’existence de violences actuelles ou passées, l’examen pelvien étant moins bien vécu chez les femmes ayant des antécédents de violence que chez celles n’en présentant pas.

Exergue : Lorsque les preuves manquent, aucune recommandation n’est formulée

Communications des Drs Marie Lambert (Bordeaux), Thibault Thubert (Nantes) et Hortense Baffet (Lille)

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du médecin