En France, l’aphasie touche environ 300 000 personnes, et 30 000 nouveaux cas post-AVC sont recensés chaque année. Environ un tiers des patients ayant subi un AVC sont aphasiques en phase initiale. L’évolution habituelle va dans le sens d’une récupération spontanée et rapide sur trois à neuf mois, suivie d’une phase de plateau, décrite au-delà de 12 mois ; la rééducation orthophonique semble positive sur le long terme (Robey 1998).
L’orthophonie, une intervention complexe
En 2016, une revue de la littérature Cochrane (MC Brady et al.) a confirmé, sur la base de 57 études portant sur 3 002 personnes aphasiques post-AVC, que l’orthophonie améliorait la communication, la lecture, l’écriture et l’expression, par rapport à l’absence de traitement. Il existe des données indiquant que le traitement à haute intensité, à dose élevée, pourrait être bénéfique. L’intensité compterait plus que la durée. Ces interventions ne sont néanmoins pas forcément tolérables par tous.
Quant au délai post-AVC, aucun résultat significatif n’apparaît lors des comparaisons délai précoce versus tardif. La Rotterdam aphasia therapy study-3 a cherché à évaluer l’efficacité d’une orthophonie très précoce après AVC, par le biais d’un traitement cognitif-linguistique intensif, versus une absence de traitement. Les résultats ont montré que quatre semaines de traitement cognitif-linguistique intensif, initié dans les deux semaines suivant un AVC, n’étaient pas plus efficaces que l’absence de traitement du langage pour la récupération. « Les études ne sont pas toutes comparables. L’orthophonie est une intervention complexe, personnalisée, avec des pratiques variables et il est difficile dans les études de l’évaluer contre placebo. Cela explique les difficultés de preuve formelle d’efficacité de l’orthophonie ainsi que celle d’une fenêtre temporelle », prévient le Pr Xavier de Boissezon (Toulouse).
« Pour autant, il ne faut pas attendre », préconise-t-il. L’étude InfoCom a démontré l’utilité d’un travail précoce après l’AVC, sur la communication, notamment non verbale, avec le patient aphasique et son entourage. Les méthodes de communication non verbale, l’utilisation de stratégies palliatives ou de suppléances doivent être apprises aux proches du patient.
Éviter la pneumopathie et la dénutrition
Les troubles de la déglutition correspondent à une difficulté de transport d’une ou plusieurs substances de la bouche vers l’œsophage et/ou une difficulté de protection des voies aériennes, y compris lors de la survenue de régurgitations.
La dysphagie concerne en moyenne la moitié des patients en phase aiguë de l’AVC (dans les 48 heures). Elle s’améliore généralement spontanément en quelques jours mais la récupération dépend de nombreux facteurs, notamment la localisation de l’AVC. « Les AVC sus-tentoriels sont de meilleur pronostic (10-12 % de séquelles à un an) que les AVC sous-tentoriels (58 % de séquelles à un an) », a précisé la Dr Emmanuelle Cugy (Bordeaux).
Il y aurait également une augmentation de la fréquence de la dysphagie après thrombolyse. Il faut ainsi évaluer la déglutition avant toute prise orale (échelle DSRS, Fois). Un recours aux évaluations instrumentales peut être nécessaire (vidéofluoroscopie, fibroscopie, manométrie, échographie…). Les objectifs de la réadaptation sont de prévenir les pneumopathies d’inhalation et de reprendre une alimentation et une hydratation sécurisée. La prise en charge doit être multidisciplinaire et prendre en compte les déficiences associées.
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