EN FRANCE, la surveillance des méningites bactériennes est réalisée par trois systèmes complémentaires : l’InVS (EPIBAC), les centres nationaux de référence et l’observatoire du GPIP/ACTIV. Ce dernier, mis en place en 2001, regroupe 252 services de pédiatrie (soit 65 % des services en France) et 168 services de microbiologie.
Entre 2001 et 2009, 3 769 cas de méningites bactériennes ont été recensés, dont 44 % à méningocoque (B : 60 % ; C : 27 %). Le pneumocoque vient en deuxième position, avec 29 % des cas, suivi du streptocoque du groupe B (14,3 %), d’E. Coli (6 %) et d’Haemophilus influenzae de sérotype b (3 %). L’épidémiologie diffère selon l’âge, avec une prédominance du streptocoque du groupe B chez les nourrissons de plus de 28 jours et de moins de 2 mois (51,1 %), tandis que le pneumocoque est retrouvé dans plus de 45 % des cas chez les nourrissons de 2 à 12 mois. Après l’âge de un an, c’est le méningocoque qui est le plus souvent en cause (63,7 %).
Les taux de mortalité sont de 7 % pour le méningocoque, de 11 % pour le pneumocoque et le streptocoque du groupe B, 10 % pour E. coli.
Pneumocoque, question de valences.
Entre 2001 et 2009, le nombre de méningites à pneumocoque n’a pas diminué, sauf en 2006, sous l’impact du vaccin conjugué à sept valences. Les sérotypes vaccinaux de ce vaccin (4, 6B, 9V, 14, 18C, 19F et 23 F) ont quasiment disparu : ils sont passés de 65 % à 3 % des cas… Mais ils ont été remplacés par d’autres sérotypes, non vaccinaux, qui culminaient à 77 % des cas en 2009. Chez les moins de 2 ans, le 19A était ainsi impliqué dans 27 % des cas en 2009 (contre 12 % en 2001). De même, le 2F est passé de 1 à 24 % durant cette période. Le même mouvement a été observé chez les plus de 2 ans, avec des sérotypes non vaccinaux grimpant de 9 à 61 % des cas, et une forte émergence des sérotypes 3 (14,7 %), 35B (11,8 %), 19A (9 %) et 7F (9 %).
Ainsi, la couverture potentielle du vaccin conjugué à 7 valences est passée de 66 % en 2001 à 3 % en 2009. Comme l’a souligné le Dr Édouard Bingen, il était urgent de remédier à cette émergence des sérotypes de remplacement. La couverture potentielle conférée par le vaccin pneumococcique conjugué à 13 valences, disponible en France depuis juin 2010, est de près de 60 % pour les enfants de moins de 2 ans et de 44 % pour les plus de 2 ans.
Méningocoque C : pas encore de protection collective.
Concernant les méningites à méningocoque C, aucun cas n’a été rapporté chez des enfants vaccinés. En France, le Comité technique des vaccinations et le Haut conseil de santé publique ont recommandé, depuis avril 2009, une dose de vaccin conjugué chez tous les sujets âgés de 1 à 24 ans, en attendant l’impact de la vaccination des nourrissons de 12 à 24 mois sur l’installation d’une immunité de groupe. Pour l’instant, il n’a pas été observé de diminution du nombre de cas de méningites à méningocoques, comme cela est rapporté au Royaume-Uni où la vaccination généralisée mise en place en 1999 s’est accompagnée d’une diminution très nette des infections invasives à méningocoques.
En France, la stratégie 2010 pourrait toutefois être réévaluée car la couverture vaccinale peine à augmenter, alors que l’expérience issue d’autres pays souligne la nécessité, pour espérer une immunité de groupe, d’une montée rapide de cette couverture.
Par ailleurs, l’arsenal vaccinal s’est récemment enrichi d’un vaccin conjugué tétravalent A, C, Y, W135 (Menveo, Novartis). Il est indiqué à partir de 11 ans, préférentiellement (1) chez les sujets exposés pour raisons professionnelles (personnels de laboratoire) ou chez ceux exposés de façon transitoire : pélerinage à La Mecque ou en zone d’endémie (Afrique subsaharienne notamment) ou d’épidémie. Dans l’attente d’une extension, son utilisation hors AMM est également recommandée, de 2 à 11 ans, chez les enfants à risque : porteurs d’un déficit génétique ou acquis en fraction du complément ou en properdine, ou d’une asplénie anatomique ou fonctionnelle
À long terme, « les données récentes sur la durée de protection vaccinale contre le méningocoque C suggèrent une diminution de l’efficacité après 5 ans, ce qui a conduit certains pays, comme les États-Unis, à recommander un rappel chez les adolescents. Il est établi qu’un taux élevé d’anticorps est indispensable pour le maintien de la protection à moyen terme et que la performance du vaccin n’est pas la même selon l’âge », a précisé le Pr Emmanuel Grimprel.
Chez les sujets ayant reçu antérieurement un vaccin polyosidique non conjugué, un délai minimum de 3 ans est recommandé avant une revaccination avec le vaccin tétravalent conjugué.
Quant au méningocoque B, il n’y a pas d’espoir de développement d’un vaccin polyosidique. Les premiers vaccins protéiques développés, de type OMV (Outer membran vesicle), ont été élaborés avec une seule souche et ne sont donc pas universels. Les recherches se sont attachées à identifier d’autres protéines, ayant une couverture plus large. Un premier vaccin développé par Novartis (Bexsero) contient trois protéines ainsi que la fraction de type OMV du vaccin néo-zélandais. Un dossier a été déposé devant les autorités européennes fin 2010. Un autre vaccin candidat, en phase 3 de développement, est élaboré à partir de deux protéines fHbp.
Ces vaccins protéiques universels suscitent beaucoup d’espoir, mais leur évaluation sera difficile en raison de la faible incidence des infections invasives à méningocoque B dans la population générale. « On ne pourra sans doute pas se passer d’études secondaires d’efficacité sur le terrain », a conclu le Pr Emmanuel Grimprel.
D’après les communications du Pr Édouard Bingen, GPIP Paris, et du Pr Emmanuel Grimprel, Paris lors de la session « Méningites du nourrisson et de l’enfant : mise au point en 2011 ».
(1) HAS. Avis de la commission de transparence 1er décembre 2010.
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