Les lipides, indispensables pour le système nerveux

Publié le 26/03/2015
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Lipides totaux, des apports insuffisants

Les lipides représentent la moitié de l’énergie apportée par le lait maternel, aliment de référence. Pour se rapprocher de ce modèle, l’EFSA (1) et l’ANSES (2) recommandent depuis 2011 que les lipides constituent 45 % voire 50 % des apports énergétiques avant l’âge de 3 ans. Ce qui est loin d’être le cas selon les données de l’étude Nutri-Bébé SFAE 2013 (3) qui a mis en évidence une aggravation de l’insuffisance des apports en lipides chez les 0-3 ans, déjà constatée en 2005.
La peur des matières grasses chez les adultes semble, en effet, avoir été transposée dans les choix alimentaires des parents pour les moins de 3 ans alors que, chez ces derniers, les besoins en lipides sont nettement supérieurs. L’enquête montre ainsi que, à l’âge de 12 mois, les apports en lipides sont en moyenne inférieurs à 30 % au lieu des 45 % recommandés. Entre 75 % et 100 % des enfants de moins de 3 ans ont des apports lipidiques insuffisants et cette insuffisance est plus marquée après l’âge de 1 an.
En moyenne, les besoins sont couverts par le lait maternel ou la préparation pour nourrisson jusqu’à 4 mois, tant que les bébés ne reçoivent que du lait. Ensuite, commence la diversification et les apports deviennent insuffisants dès l’âge de 5 mois, tendance qui ne fait que s’accentuer avec l’âge.
L’idéal est de donner au nourrisson du lait maternel et, si la mère ne peut ou ne veut pas allaiter, une préparation pour nourrisson ou de suite, puis chez le petit enfant du lait de croissance jusqu’à l’âge de 3 ans, et de ne pas avoir peur des huiles végétales dans l’alimentation (1 cuillerée à café dans les légumes entre 5 et 12 mois, 2 cuillerées à café entre 1 et 2 ans, 3 cuillerées à café entre 2 et 3 ans).
Si le petit enfant reçoit du lait de vache au lieu du lait de croissance pourtant recommandé jusqu’à l’âge de 3 ans et même au delà, il faut absolument donner du lait entier, le lait demi-écrémé réduisant de moitié l’apport de lipides déjà insuffisant, même si les matières grasses du lait de vache ne sont pas celles que l’on souhaite idéalement pour un jeune enfant (prédominance de graisses saturées et pauvreté en acides gras essentiels [AGE], surtout oméga-3).
 

Les acides gras essentiels et leurs dérivés à longue chaîne, indispensables

Les acides gras essentiels (AGE) sont ainsi dénommés parce qu’ils ne peuvent être synthétisés par l’homme. L’acide linoléique et l’acide α-linolénique sont les précurseurs de deux grandes familles d’acides gras polyinsaturés (AGPI) respectivement les oméga-6 et les oméga-3, dont les dérivés supérieurs sont les AGPI à longue chaîne (AGPI-LC), l’acide arachidonique pour les oméga-6, l’EPA (acide eicosapentaénoïque) et le DHA (acide docosahexaénoïque) pour les oméga-3. Ces AGPI-LC jouent un rôle essentiel dans la maturation du système nerveux et de la rétine et sont impliqués dans la synthèse des prostaglandines.
Malgré les recommandations de l’ANSES, seulement un tiers des préparations pour nourrissons, quelques laits de suite et quelques rares laits de croissance sont enrichis en AGPI-LC alors que le lait maternel apporte des AGPI-LC quel que soit l’âge du bébé allaité.
Dans l’alimentation diversifiée, les précurseurs sont présents dans les huiles végétales, avec un bon rapport oméga-3/oméga-6 dans les huiles de colza et de noix, qui doivent de ce fait être privilégiées. L’huile d’olive, intéressante chez l’adulte dans le cadre d’un régime méditerranéen, a peu d’intérêt nutritionnel chez le petit, mais participe à la formation du goût. Les graisses lactiques (beurre et crème), longtemps proscrites chez l’enfant, peuvent être consommées, crues, de temps en temps, pour leur apport en certains acides gras.
Les AGPI-LC sont retrouvés dans les poissons gras : saumon, maquereau, sardine et hareng. Il est recommandé de consommer deux portions de poisson par semaine, une de poisson maigre type colin, merlan ou sole et une de poisson gras, mais seulement deux fois du fait de la possible présence de polluants (PCB et métaux lourds).
 

Les acides gras trans, à éviter

Les acides gras trans, produits lorsque les graisses sont chauffées à haute température, sont potentiellement néfastes au niveau cardio-vasculaire. Viennoiseries et fritures doivent donc être évitées chez l’enfant.
De la même façon, les margarines, qui peuvent constituer une source d’acides gras trans, suite à l’hydrogénation d’huiles végétales, sont déconseillées.
 

L’huile de palme

Cette huile est très présente dans l’industrie agro-alimentaire pour quatre raisons : augmentation de la durée de conservation du produit, amélioration de sa texture, faible coût et alternative aux huiles hydrogénées ; mais, elle est décriée pour son effet athérogène et son impact écologique. L’huile de palme est utilisée dans la plupart des laits infantiles pour sa teneur en acide palmitique, acide très présent dans le lait maternel. Le Comité de nutrition de la Société française de pédiatrie (SFP) estime qu’aux doses utilisées le recours à l’huile de palme ne présente pas de risque réel pour la santé des bébés. À terme, d’autres sources d’acide palmitique seront utilisées.
 

Dr Isabelle Hoppenot



D’après un entretien avec le Dr Alain Bocquet (pédiatre à Besançon), responsable du « groupe nutrition » dans l’Association française de pédiatrie ambulatoire (AFPA).
 
(1)   EFSA. Scientific Opinion on Dietary Reference Values for fats, including saturated fatty acids, polyunsaturated fatty acids, monounsaturated fatty acids, trans fatty acids, and cholesterol. EFSA Journal 2010 ; 8 : 1-107. http://www.efsa.europa.eu/fr/efsajournal/doc/1461.pdf
(2)   ANSES. Actualisation des apports nutritionnels conseillés pour les acides gras. Rapport d’expertise collective. 2011. http://www.anses.fr/Documents/NUT2006sa0359Ra.pdf


Source : lequotidiendumedecin.fr