Disséquer l’histoire naturelle de la BPCO

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Publié le 25/01/2024
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Une terminologie nouvelle pour caractériser certaines étapes fondamentales de l’histoire naturelle de la BPCO vient d’être proposée par le Gold.

La compréhension de l’histoire naturelle de la BPCO s’est considérablement améliorée

La compréhension de l’histoire naturelle de la BPCO s’est considérablement améliorée
Crédit photo : VOISIN/PHANIE

Les notions de pré-BPCO, de BPCO précoce ou encore de BPCO du sujet jeune sont apparues, qui pourraient à terme améliorer la prise en charge des patients.

Pré-BPCO : une définition large, un groupe de patients hétérogène

Le terme de « pré-BPCO » est utilisé pour identifier les individus à risque de développer une bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO). Selon le Global Initiative for Chronic Obstructive Lung Disease (Gold), il s’agit d’individus présentant des symptômes respiratoires chroniques (toux, expectorations, dyspnée, exacerbations) et/ou des anomalies structurelles au scanner (emphysème, épaississement des parois bronchiques, piégeage) et/ou des anomalies fonctionnelles respiratoires (troubles de la diffusion, distension, hyperinflation dynamique), quel que soit leur âge, et en l’absence d’obstruction bronchique à la spirométrie (VEMS/CVF ≥ 0,7).

« Le concept de patient à risque n’est pas si nouveau puisqu’en 2001, il existait un stade Gold 0 « à risque » (symptômes cliniques, exposition à des facteurs de risque, pas de trouble ventilatoire obstructif). Ce stade avait finalement été abandonné en 2006, tous les patients Gold 0 n’évoluant pas vers le Gold 1, explique la Dr Lucile Regard (hôpital Cochin, AP-HP). La définition Gold 2023 de la pré-BPCO étant très large, on a donc affaire à une population très hétérogène. »

De nombreuses études issues de grandes cohortes se sont intéressées à ces patients et ont permis de préciser quels étaient les risques (évolution vers la BPCO mais également mortalité, comorbidités, hospitalisation…). « Cependant, au niveau individuel, il est encore difficile de prédire, à niveau d’exposition tabagique identique par exemple, quel patient évoluera, ou non, vers une BPCO. Par ailleurs, l’aspect thérapeutique fait l’objet de nombreuses interrogations. Il reste encore du chemin à faire pour pouvoir proposer une prise en charge optimale à ces patients à risque », souligne la Dr Regard.

Il est encore difficile de prédire quel patient évoluera ou non

Dr Lucile Regard

BPCO précoce, à ne pas confondre avec celle du sujet jeune

Le terme BPCO précoce, « early COPD » dans le rapport de Gold, fait référence aux mécanismes physiopathologiques mis en jeu au tout début de la maladie. La BPCO précoce ne doit pas être confondue avec la BPCO du sujet jeune (« young COPD »), qui désigne les patients présentant une BPCO avérée entre l’âge de 20 et 50 ans, et ce, quelle que soit la gravité du trouble ventilatoire obstructif. Il s’agit d’une tranche d’âge où le taux de sous-diagnostic est souvent élevé, la BPCO restant encore une maladie du sujet de plus de 50 ans dans l’esprit collectif.

« Dans notre langage de clinicien, il faut bannir ce terme de BPCO précoce, avertit la Dr Regard. Il s’agit d’un concept biologique qui fait référence aux anomalies physiopathologiques mises en jeu à la phase précoce de la maladie et qui ne sont pas forcément liées à l’apparition des premiers signes cliniques. C’est un concept à réserver à la recherche fondamentale. »

« Notre compréhension de l’histoire naturelle de la BPCO s’est considérablement améliorée. On sait maintenant qu’elle résulte de l’accumulation d’interactions (allant de la vie in utero jusqu’au décès) entre un individu et son environnement (tabac, pollution, infections respiratoires, etc.), résume la Dr Regard. Prédire quel individu développera une BPCO et pouvoir alors imaginer prévenir une telle évolution fait partie des nombreux défis que nous avons à relever dans l’avenir. »

Entretien avec la Dr Lucile Regard (Hôpital Cochin, AP-HP)


Source : lequotidiendumedecin.fr