Le point de vue du Dr Anas Taha

4e année en ambulatoire : une opportunité pour tous !

Publié le 06/09/2018
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Crédit photo : DR

Les discussions autour des modalités de mise en place de la 4e année du diplôme d’étude spécialisé (D.E.S.) de médecine générale (MG) se font désormais dans des conditions apaisées. On ne peut que s’en réjouir tant le sujet est important pour la discipline. Le Syndicat national des enseignants de médecine générale (SNEMG) a été le premier acteur à revendiquer cette 4e année.

Personne n’oserait aujourd’hui contester que la médecine générale est une spécialité exigeante dont la place est cruciale. Le médecin généraliste est qualifié par nos responsables politiques comme un « pivot » du système de santé. Prise en charge globale, coordination pluri-professionnelle, gestion des demandes de premier recours, suivi au long cours : telles sont (quelques-unes) des missions attribuées par le législateur à la médecine générale. Elles nécessitent une formation adaptée.

Le seul internat à ne durer que trois ans

Pourtant, le D.E.S. de médecine générale reste la seule formation du 3e cycle des études médicales à ne durer que trois ans. Elle est également la seule à ne pas comporter de phase de consolidation (phase finale du 3e cycle). Après la remise de leur diplôme, les jeunes médecins généralistes sont peu nombreux à s’installer. Beaucoup éprouvent le besoin de parfaire leur expérience à travers une période de remplacement et beaucoup sont directement recrutés par le secteur hospitalier dans lequel les internes sont encore aujourd’hui majoritairement formés. Cette fuite aboutit à amplifier et à aggraver les problèmes d’accès aux soins par la population dans les territoires.

Dans ce contexte, on peut s’étonner de ne pas voir plus de moyens alloués à la formation en médecine générale. Soyons clairs, la 4e année du D.E.S. n’est pas le remède unique à l’installation des jeunes en médecine générale et à la résolution des difficultés d’accès aux soins. Elle constitue cependant une mesure indispensable et un très fort levier pour faciliter d’autres évolutions qui devront, elles, intervenir dans le champ professionnel.

La demande légitime des représentants des internes est que cette 4e année se fasse dans un contexte où l’encadrement serait suffisant. En 2018, le SNEMG recense 9 440 maîtres de stage des universités. Ils sont 1 577 de plus (+20 %) qu’il y a 3 ans seulement. Cette dynamique, permise par le recrutement et la formation actuelle des MSU, rend envisageable le passage à la 4e année dans un avenir proche.

Un maître mot, la professionnalisation

Mais, pour être efficace et utile, la 4e année telle que les enseignants la proposent ne doit se faire que sous conditions bien particulières. Selon l’avis conjoint du SNEMG et du CNGE, cette 4e année doit être :

Ambulatoire. Les définitions internationales de la discipline identifient la médecine générale comme une discipline ambulatoire. C’est là que la médecine générale y est exercée, c’est là que les apprentissages se font et c’est là que les internes doivent y être formés.

Professionnalisante. Poursuivre la formation pour que l’installation paraisse naturelle à l’issue du D.E.S. est l’enjeu majeur de la 4e année. Il est important de réfléchir à développer l’apprentissage d’éléments de l’exercice professionnel peu abordés les trois premières années. On peut citer le suivi d’une patientèle, la formation à la pluri professionnalité, la confrontation aux exigences administratives de l’exercice. Pour cela, il est cohérent de songer à un système permettant aux internes en formation d’avoir une rémunération liée à leur activité de soins.

Adaptée aux besoins des territoires. Une attention particulière doit être apportée aux territoires. Depuis plusieurs années, plusieurs élus revendiquent, parfois de bonne foi, la nécessité de réguler les installations des jeunes médecins de façon coercitive. Le monde médical sait que cette mesure aboutira à un fiasco démographique mais les difficultés des territoires doivent être entendues. Il est néanmoins important que cette formation au sein des territoires ne se fasse pas au détriment de la qualité de la formation ou des conditions de vie des internes. Les territoires doivent être prêts à les accueillir.

La 4e année doit participer au renforcement de la qualité de la formation des futurs médecins généralistes en consolidant leur professionnalisation, en les rapprochant plus encore des territoires où les apprentissages sont formateurs et où les besoins des patients sont criants. Étudiants, internes, territoires, patients, médecins, tutelles : Tout le monde y gagne !


Source : Le Quotidien du médecin: 9678