LA GUERRE en Syrie se livre aussi sur Internet. Par la propagande et la désinformation. C’est Médecins Sans Frontières qui en fait principalement les frais. L’association prix Nobel de la Paix avait signalé le 24 août des symptômes neurotoxiques observés sur 3 600 patients dans trois hôpitaux dans la région de Damas, trois jours après le bombardement de la capitale syrienne. Le secrétaire d’État américain John Kerry dénonçait alors l’emploi du gaz sarin contre les civils en citant MSF et son communiqué. Si bien que l’association a incrusté un bandeau sur son site Internet pour dénoncer « les fausses informations citant Médecins sans frontières (qui) circulent sur Internet » et « l’exploitation de ses rapports par le gouvernement américain et les responsables d’autres pays ».
« Nous intervenons dans 6 hôpitaux, 4 centres de santé et plusieurs cliniques mobiles dans le Nord et l’Est syrien, précise au « Quotidien » le Dr Mego Terzian, président de MSF, mais nous ne sommes pas présents à Damas. Nous avons relayé des informations transmises par des médecins syriens avec lesquels nous collaborons via des associations, sans avoir pu identifier les agents toxiques incriminés et encore moins établi la responsabilité de l’exposition à ces substances chimiques. Nous refusons donc que nos déclarations soient utilisées comme un substitut à l’enquête des Nations Unies, ou comme une justification à une action militaire. »
Appel à une solution négociée
La communication de MSF est d’autant plus compliquée que son ancien président Rony Brauman, pourtant connu pour son intransigeance contre le droit d’ingérence des gendarmes du monde autoproclamés, en appelle à une intervention visant des pistes aériennes, des stocks de munition et autres installations de matériels militaires. « Les exigences politiques et morales de l’humanitaire fournissent autant d’arguments en faveur du discours interventionniste que du discours non-interventionniste, explique-t-il au « Quotidien ». Ma position est celle d’un citoyen observateur attentif et elle ne se réclame pas de MSF, qui sortirait de son rôle en appelant à une intervention. »
En écho, le Dr Terzian souligne qu’il « n’approuve pas les déclarations de son prédécesseur, qui intervient en qualité de professeur à Sciences Po et non comme notre ancien président et icône de l’association. Quant à nous, nous restons sur notre position de médecins par vocation opposés à toutes les violences : on ne peut pas résoudre une violence par une violence. Et nous appelons à une solution négociée. Nous nous étonnons d’ailleurs que la communauté internationale ait pu imposer en trois jours la visite d’experts dans la zone infectée et qu’elle ne soit toujours pas à même d’engager des discussions. »
Avec neuf structures de soins animées par 50 personnes et des moyens triplés en deux ans sur le territoire syrien, principalement au Nord, « Médecins du Monde s’oppose aussi à l’instrumentalisation publique de la parole humanitaire, déclare Gilbert Potier, son directeur des opérations internationales. Nous ne demandons pas une intervention militaire, mais des moyens pour accéder aux camps où s’entassent plus de trois millions de déplacés dans des conditions médicales et sanitaires tragiques. »
500 000 doses d’atropine.
« Nous sortirions de notre mandat si nous appelions à une action militaire extérieure, estime également le directeur de la communication de Première urgence-Aide médicale internationale (PU-AMI), Jean Javogues, dont l’association intervient en partenariat avec le Croissant rouge local, avec deux expatriés et une équipe nationale de 56 personnes. Rony Brauman est sorti du rôle des humanitaires, qui est de secourir les civils victimes d’une crise majeure et non de solliciter des engagements militaires. »
À l’instar d’Action contre la Faim, les autres intervenants humanitaires s’abstiennent de prendre des positions publiques. La Croix Rouge attendra les conclusions des experts onusiens. Son ancien président, le Pr Marc Gentilini, se déclare d’ores et déjà « plutôt hostile à une intervention isolée de la France » et regrette qu’« une solution politique n’ait pas été recherchée plus activement depuis deux ans ».
Pour l’heure, les équipes des ONG ont été alertées sur la possibilité d’une action militaire occidentale. « Nous sommes prêts à intensifier nos opérations de secours en fonction des événements », annonce le Dr Terzian. Mêmes préparatifs à PU-AMI où un redéploiement des moyens de distribution alimentaires et non alimentaires est en cours dans les zones critiques de Damas, Homs et Lattakia.
MDM a acheminé plus de 500 000 doses d’atropine pour répondre aux fortes demandes qui lui sont parvenues. Face à ce que le HCR (Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés) qualifie de « la grande tragédie de ce siècle », aucune ONG n’envisage un repli ou une évacuation.
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