L’hyperplasie bénigne de prostate, maladie très fréquente de l’homme âgé, débute très tôt dans la vie, chez l’adulte jeune, avec une accélération de la croissance au moment de la quarantaine, sans pour autant être symptomatique. Même si l’augmentation de la prévalence de pathologies exacerbant la croissance prostatique – comme le syndrome métabolique et ses composantes comme le diabète et le surpoids – favorisent, probablement, la recrudescence d’adénomes prostatiques gênants, plus tôt dans la vie.
Pièges diagnostiques
Il n’est ainsi pas rare qu’une symptomatologie urinaire se déclare au cours de la quarantaine. Les pièges diagnostiques sont alors multiples. En effet, des troubles mictionnels tout à fait comparables peuvent être provoqués par une hypertonie du col vésical, une sténose urétrale post-infectieuse ou post-traumatique mais aussi des habitudes de vie comme un tabagisme ou une consommation excessive de boissons énergisantes capables de déclencher une véritable hyperactivité vésicale.
Néanmoins, le premier facteur de risque de croissance de l’adénome prostatique étant l’âge, les signes apparaissent encore majoritairement entre 50 et 60 ans. Chez ces patients, d’autres pathologies miment les troubles mictionnels liés à une HPB. C’est le cas de polypes vésicaux, mais aussi de troubles neurologiques (les maladies de Parkinson, la sclérose en plaques, etc.) ou, tout simplement, le vieillissement d’organes, puisque, avec l’âge, le rôle capacitatoire de la vessie s’altère tandis que sa capacité contractile s’émousse.
Au total, pour près d’un million d’hommes en France, l’adénome prostatique (poids de la glande > 30 g) sera à l’origine de troubles urinaires à type de dysurie, de pollakiurie ou d’impériosités.
Traiter plus tôt ?
À l’heure actuelle, les médicaments classiques de l’HBP (alphabloquants et inhibiteurs de la 5 alpha réductase) sont introduits alors que le tableau mictionnel est déjà dégradé. à ce stade, ils améliorent clairement la qualité de vie chez la
majorité des patients.
Cependant, cette stratégie de traitement tardif pourrait être à l’origine d’une efficacité moindre, mais ce point reste discuté. « D’anciens travaux ont montré que l’obstruction chronique altère progressivement la vessie avec des lésions qui, à la longue, deviennent irréversibles même après la levée de l’obstacle, explique Pr François Desgrandchamps, chef du service d’urologie (hôpital Saint-Louis, Paris).
Ainsi, pour protéger la vessie, il serait tentant de traiter médicalement dès les premiers symptômes et d’envisager une intervention en cas de gêne malgré un traitement médical. Alors qu’à présent, le principe de prise en charge de l’hypertrophie bénigne de la prostate est de ne débuter le traitement médical qu’en cas de symptômes gênants et d’opérer en cas de gêne malgré le traitement ou en cas de
complication grave comme une rétention complète. »
Une chirurgie en évolution constante
Un autre argument, en faveur d’un traitement plus précoce en cas d’échec des médicaments, est l’évolution de la chirurgie. Les techniques plus anciennes (résection transurétrale de prostate et adénomectomie) perdent du terrain face aux lasers. Ceux-ci font aussi bien que les chirurgies conventionnelles en termes de résultats fonctionnels et de qualité de vie, avec néanmoins un risque hémorragique réduit.Or « le risque hémorragique des chirurgies conventionnelles était tel que l’on repoussait l’acte opératoire, retrace le Dr Vincent Misraï, chirurgien urologue (clinique Pasteur, Toulouse), membre du Comité des troubles mictionnels de l’homme de l’Association française d'urologie, tout en sachant que les résultats seraient bien moins bons. Comme avec les médicaments, il faut changer notre manière de voir et traiter tôt, en particulier avec les lasers, au tout début des troubles urinaires pour obtenir de bien meilleurs résultats ».
Comme pour toute chirurgie, il existe avec les lasers des risques même minimes de traumatisme de l’urètre (sténose), d’incontinence urinaire transitoire, mais aussi de troubles de l’éjaculation (éjaculation antégrade) définitifs. Si ces derniers sont paradoxalement un témoin de la bonne désobstruction de l’urètre, en revanche c’est une conséquence difficile à accepter, surtout chez les hommes « jeunes ». On peut limiter ce risque en limitant la désobstruction (par vaporisation laser) au strict minimum, quitte à réopérer cinq à dix ans plus tard. « Aujourd’hui, poursuit Vincent Misraï, ce type de chirurgie partielle est une réelle tendance. C’est un compromis entre l’amélioration des troubles urinaires en vue de retrouver un confort de vie acceptable sans médicament et la perte des fonctions éjaculatoires. »
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