Réactions locorégionales aux piqûres d’hyménoptères

Pour les Américains, la désensibilisation peut s'envisager

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Publié le 22/05/2018
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abeille

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Crédit photo : PHANIE

« Il n’existe pas de définition internationale consensuelle de la réaction locorégionale aux piqûres d’hyménoptères, mais une définition européenne », a rappelé la Dr Evelyne Girodet (Bron). Il s’agit d’une réaction centrée sur le point de piqûre, marquée par un œdème de plus de 10 cm de diamètre persistant plus de 24 heures, accompagné d’autres signes inflammatoires (douleur, érythème, chaleur) et de prurit. Il n’y a pas de signes systémiques. La réaction, typiquement immédiate dans les trente minutes après la piqûre, peut toutefois survenir de façon retardée. Elle est le plus souvent IgE médiée.

La prévalence de ce type de réaction dans la population générale varie de 2,4 à 26,4 % selon les études, et peut atteindre 43 % chez les apiculteurs, groupe à risque bien connu. Les études en pédiatrie sont peu nombreuses, mais les quelques données disponibles rapportent une prévalence de 19 %.

Un risque systémique moindre

Ces réactions sont donc relativement fréquentes, et toute la question porte sur l’éventuel risque de réaction systémique ultérieure. En fait, de façon paradoxale, les sujets ayant des réactions locorégionales ont un risque de réaction systémique estimé de 0,8 à 14 % chez l’adulte, et de 2 à 4 % chez l’enfant, soit moins que celui de la population générale sensibilisée asymptomatique, chez laquelle ce risque est de 17 %. Et, en pratique, les sujets ayant des réactions locorégionales initiales ont le plus souvent le même type de réactions lorsqu’ils sont à nouveau piqués.

Faut-il faire un bilan ? Ce dernier est positif dans 80 % des cas : de 70 à 90 % de positivité pour les tests cutanés, et de 26 à 43 % pour le dosage des IgE spécifiques. Jusqu’alors, il ne paraissait pas utile de faire un bilan, puisque les recommandations américaines de 2002 ne préconisaient pas de désensibilisation, que les tests soient positifs ou négatifs. Mais, depuis, de nouvelles données ont été publiées, ce qui a conduit l’Académie américaine d’allergie, d’asthme et d’immunologie à proposer en 2017 de discuter la désensibilisation dans certaines circonstances particulières. « Cette notion reste assez floue dans les recommandations, a rapporté la Dr Girodet. Il s’agit d’une exposition fréquente, d’une altération de la qualité de vie et de l’existence d’un terrain délétère, que l’on peut extrapoler à partir des facteurs de risque d’aggravation d’une réaction générale lors d’une nouvelle piqûre : sujet âgé, pathologie cardiovasculaire associée, prise de bêta-bloquants, mastocytose et/ou taux élevé de tryptase sérique basale. »

Il semble en pratique important de rechercher des facteurs de risque, notamment une HTA, d’évaluer le risque de nouvelles piqûres, et d’apprécier le retentissement sur la qualité de vie en recourant à des questionnaires (en anglais, aucun n’étant validé en français). Un bilan paraclinique pourrait être justifié en cas de circonstances particulières ou de réactions locorégionales s’aggravant au fil du temps, avec dans ce cas l’intérêt d’un dosage basal de la tryptasémie. Mais il n’y a pas de caractéristique biologique qui permette de différencier les patients à risque de faire une réaction systémique de ceux qui continueront à faire des réactions locorégionales.

Il faut noter que les recommandations européennes ne vont pour l’instant pas dans ce sens-là.

Communication de la Dr Evelyne Girodet (Bron)

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du médecin: 9666