La santé au travail comporte un volet préventif très important. « Les actions de prévention mises en place dans les entreprises ont pour objectif de faire connaître des risques auxquels sont exposés les salariés sans en avoir toujours conscience. Pourquoi doivent-ils se protéger et comment, sont des informations essentielles. Cependant, en France, on a longtemps considéré que le simple fait de passer ces messages était efficace a priori, sans vraiment vérifier par la suite si les employeurs et les salariés avaient réellement changé leur comportement, et, dans le cas contraire, pourquoi ils ne l’avaient pas fait », regrette le Pr Jean-Marc Soulat, chef du pôle santé publique et médecine sociale du CHU de Toulouse.
« Il est important de comprendre quels sont les freins à ces changements : si l’on veut obtenir leur levée, ils doivent d’abord être clairement identifiés, souligne-t-il. Ils peuvent être propres à une profession et/ou à une entreprise. Par exemple, dans le BTP, l’une des mesures de prévention préconisée est que les charpentiers couvreurs mettent un filet de protection et s’accrochent dès lors qu’ils travaillent en hauteur, sur un toit. Dans les faits, ils ne le font pas, pour des raisons diverses : le temps nécessaire à la mise en place de cette protection n’est pas forcément compatible avec les contraintes économiques et les délais du chantier et par ailleurs, l’aspect culturel peut aussi jouer (avec la notion qu’un vrai charpentier n’a pas besoin de filet), etc. C’est pourquoi il ne faut pas se contenter de passer des messages préventifs, mais trouver les nouveaux leviers qui vont permettre aux salariés de changer leurs comportements. Cela demande une bonne connaissance du milieu de travail, de ces salariés et de leurs contraintes techniques, psychologiques, économiques, etc. »
Participation, évaluation
La directive-cadre européenne de 1989 insistait déjà sur cet aspect de promotion de la santé. Il s’agit donc vraiment d’apprendre aux salariés à se protéger et faire en sorte qu’ils se protègent. « La démarche peut être participative, en proposant aux salariés de travailler sur un thème, quitte à leur demander comment ils pourraient faire, car ce sont eux qui connaissent le mieux leur métier. Mais même dans ce contexte participatif, il faut ensuite évaluer comment a été perçu le message et s’il a bien été suivi d’un changement de comportement à court, moyen et long terme. Finalement, plusieurs interventions sont nécessaires. Il faut faire preuve de beaucoup de pragmatisme », insiste le Pr Soulat.
« Autant cette démarche est bien développée en santé publique, autant elle n’en est qu’à ses balbutiements en médecine du travail où l’on est longtemps parti de l’a priori que les messages délivrés étaient efficaces, note-t-il. Pour améliorer son efficacité en prévention, le médecin du travail doit donc s’approprier ce type de méthode sans oublier de contextualiser son action en fonction de l’entreprise car les freins au changement peuvent varier en fonction de nombreux critères ».
Entretien avec le Pr Jean-Marc Soulat, chef du pôle santé publique et médecine sociale du CHU de Toulouse
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