Entretien avec la chargée de l'Enseignement supérieur de l'ANEMF

Loona Mathieu : « Le déroulement de la réforme est encore incertain »

Par
Publié le 18/09/2020
Article réservé aux abonnés
Pour la vice-présidente de l'Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF), les effectifs élevés, le flou sur certains points de la réforme (partiels, oraux) et le contexte sanitaire compliquent cette rentrée.

Crédit photo : DR

LE QUOTIDIEN : La rentrée des PASS et des LAS a eu lieu depuis trois semaines. Quelles sont les remontées de terrain ?

LOONA MATHIEU : Globalement, le contexte sanitaire a compliqué cette rentrée. D'autant que les étudiants sont nombreux. C'est difficile de faire des cours en présentiel en faisant respecter les gestes barrières et la distanciation sociale. La majorité des facs accueillent les étudiants mais certaines ont opté pour une rentrée à distance car elles n'ont pas assez d'amphis et ne peuvent pas respecter les normes sanitaires. Ça peut créer du stress d'autant que le déroulement de la réforme des études – notamment des partiels à distance et du contenu des oraux de sélection – est encore incertain.

Y a-t-il d'autres difficultés ? 

La gestion des capacités d'accueil a posé problème. Sans bac cette année [en l'absence d'épreuves finales sur table, près de 96 % de candidats au bac 2020 l'ont obtenu, NDLR], il y avait davantage d'étudiants sur Parcoursup...

Dans ce contexte, j'ai reçu des messages d'étudiants n'ayant été reçus nulle part – ni en PASS [parcours spécifique santé], ni en LAS [licence avec option accès santé]. C'est aussi arrivé à des étudiants en PACES adaptée à Paris [cursus testé dans cinq facultés parisiennes depuis 2018]. Ce dispositif ne permet pas le redoublement et des étudiants se sont alors tournés vers une LAS pour leur deuxième chance mais certains d'entre eux n'ont pas été admis par manque de place. Ils retenteront l'année prochaine. On remontera cette problématique au ministère.

Enfin, sur la réforme en elle-même, le programme du PASS est proche de celui de la PACES. Or, ce n'est pas ce que prévoit la réforme ! Les enseignements devraient inclure des thématiques plus larges, sur la société, le relationnel ou les sciences humaines et sociales. On n'a pas l'impression que ce soit fait.

Quelles ont été les LAS et PASS les plus prisés ?

Nous n'avons pas les chiffres définitifs de Parcoursup. On peut imaginer que le domaine des sciences de la vie et de la terre a été plébiscité car c'est un champ dans lequel les étudiants en PACES se réorientaient volontiers et sont intéressés naturellement. Mais on peut aussi se douter qu'au vu des difficultés à gérer les capacités d'accueil en PASS comme LAS, tous les bacheliers inscrits n'ont pas eu ce qu'ils voulaient !

Avec la réforme de l'accès aux études médicales, comment s'organisent les tutorats ? 

Ils s'adaptent. En PASS, au lieu de préparer au concours PACES, les tutorats préparent les étudiants aux partiels avec des entraînements aux QCM mais aussi aux oraux de sélection.

C'est un défi. Les tutorats étaient habitués à entraîner les étudiants sur des sujets techniques. Aujourd'hui, ils doivent apprendre à les accompagner en vue de futurs oraux et autour du développement de compétences dites « transversales ». La difficulté est qu'aujourd'hui, ces oraux sont encore flous dans les facultés qui n'ont pas toutes dévoilé leur contenu. Néanmoins, les tuteurs peuvent se rapprocher des facs ayant expérimenté les PACES adaptées où existent déjà des oraux – même si les modalités peuvent différer. Les tutorats peuvent aussi s'occuper du module santé des licences LAS et proposer leur aide aux étudiants concernés. Ils gèrent par ailleurs les derniers étudiants PACES en cette année transitoire.

Enfin, les tutorats sont amenés à revoir leur organisation. Certaines facultés ont développé des antennes [sites éloignés de la faculté permettant de suivre le PASS à distance, NDLR]. Les tutorats décident de s'y déplacer, ou bien de tout faire à distance en numérique. 

Propos recueillis par Sophie Martos Exergue1. Le programme du PASS est proche de celui de la PACES. Or, ce n'est pas ce que prévoit la réforme Exergue 2. Sans bac cette année, il y avait davantage d'étudiants sur Parcoursup.

Source : Le Quotidien du médecin