Dès 9 heures, ce jeudi, une foule de généralistes se pressait devant l’accueil de la salle du Palais des Congrès de Paris pour récupérer leur badge et découvrir le riche programme de cette 17e édition intitulée « Mythes et réalités en médecine générale ». Pas de temps à perdre, les premiers ateliers et sessions d’une heure et demie débutant dès 9 h 30 chacun, comme « statuts et contrats des généralistes en centres de santé », « Les clés pratiques et actualisées pour commencer à remplacer » ou encore « Nomenclature : au-delà des cinq actes les plus courants ».
Ambiance détendue mais aussi studieuse dans les salles d’intervention. Point d’orgue de cette première matinée, la cérémonie d’ouverture du Congrès, avec en maîtres de cérémonie, le président du Collège de la médecine générale, le Pr Paul Frappé, et le Dr Cyril Bègue, président du comité scientifique du CMGF.
« Qui est l’ennemi ? L’hôpital ? L’assurance-maladie ? Les politiques ? »
Déjà bien rodé à cet exercice, le généraliste de Saint-Étienne s’est rapidement mis la salle dans la poche, le Pr Frappé alliant dans son discours inaugural, sens de l’humour et interrogations de fond sur le sens du métier, déplorant la polarisation croissante et le cloisonnement des acteurs du système de santé. « Qui est l’ennemi ? , interroge-t-il, l’Assurance-maladie ? L’hôpital ? Les autres professions de santé ? Les politiques ? Les patients qui posent des lapins ? ».
« Il nous faut déconstruire ces explications faciles et ces mythes, a-t-il recadré. Mais cette polarisation et le manque d’empathie politique qui l’accompagne sont dévastateurs ». Carton à l’applaudimètre dans la salle, prête, justement, à écouter l’intervention de l’acteur politique du jour, le ministre délégué chargé de la santé et de la Prévention Frédéric Valletoux. Ce dernier a eu un peu moins de succès que son prédécesseur même si le néo-ministre a accepté de jouer le jeu des questions-réponses avec quatre représentants du CMGF sur l’estrade.
En substance – mais pouvait-il en être autrement ? –, le locataire de Ségur a affirmé sa confiance aux médecins généralistes, souhaitant restaurer leur place et leur rôle de « boussole » au sein du système de santé, tout en rappelant que sa mission était aussi d’« améliorer la prise en charge des Français ». « Je ne vais pas révolutionner le système de santé (…) Il faut adapter les organisations à la réalité de terrain », a-t-il plaidé.
Silence poli dans la salle, qui a montré davantage d’intérêt lorsque Frédéric Valletoux a affirmé être prêt à s’engager aux côtés des médecins pour réduire… les certificats médicaux inutiles. Des omnipraticiens qui ont aussi apprécié le sens de l’autodérision du ministre évoquant le manque de longévité des locataires de Ségur. « Je ne suis ministre que depuis cinq semaines, j’espère que nous aurons le temps de mieux nous connaître ».
À l’ouverture du congrès, un chercheur mise sur l’intelligence collective
Mouvements de panique lors de rassemblements, bousculades au moment du Black Friday… Le collectif - ou tout du moins la foule - est souvent perçu comme source de comportements péjoratifs ou irrationnels. Pourtant, si les conditions sont réunies, « le groupe peut aussi être synonyme d’intelligence collective », a rassuré le chercheur en science collective Mehdi Moussaid (Institut Max-Planck, Berlin), lors de la session d’ouverture du CMGF. Une bonne nouvelle alors que l’évènement s’apprête à réunir pendant trois jours plusieurs milliers de participants !
Pour Mehdi Moussaid, tout l’enjeu est d’identifier, selon la situation, la manière la plus appropriée pour fusionner les jugements de plusieurs personnes en une seule réponse commune. En d’autres termes, trouver de façon scientifique la « fonction d’agrégation » la plus pertinente selon la nature du problème posé, la taille et la composition du groupe. Vote, discussion libre, etc. : les méthodes d’agrégations sont multiples mais chacune peut souffrir de nombreux biais. Par exemple, un consensus issu d’une discussion peut être faussé par des inégalités du temps de parole, les rapports d’autorité, etc. entre les différents membres du groupe. Et si le vote à majorité semble un bon moyen d’adresser de façon collective certains problèmes de logique, il peut être beaucoup moins performant pour agréger des connaissances. En témoigne une étude ayant testé les performances collectives de quarante dermatologues sur une question de dermatoscopie. Les participants étaient invités à juger, sur simple photographie, du caractère malin ou non de 108 lésions pigmentaires dont certaines étaient particulièrement trompeuses. Faussant ainsi le résultat collectif puisque la majorité des répondants est tombée dans le piège…
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