Passage de témoin

La Carmf entre dans l'après-Maudrux

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Publié le 27/11/2015
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Le sortant était retraité, ex-spécialiste en secteur 2, le nouvel élu est généraliste secteur 1, toujours en activité. L’ancien et le nouveau président de la Carmf différent sûrement aussi par leur caractère. Mais les deux assurent que la ligne restera la même à la Caisse de Retraite des Médecins de France.
maudrux-lardenois

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Crédit photo : DR

À la Carmf, c’est un scénario parfaitement rodé qui s’est mis en branle la semaine dernière pour organiser la succession de Gérard Maudrux. Cela faisait en effet six mois que ce dernier se savait menacé et deux mois qu’il avait officiellement adoubé Thierry Lardenois pour lui succéder. Bref rappel des faits. Début mai, les élections à la Carmf confirment la ligne Maudrux, mais, fin mai, un projet de décret interdit de facto au président de la CARMF de se représenter. Le texte est publié en juillet, ce qui n’empêche pas Gérard Maudrux de se faire réélire mi-septembre avec déjà son successeur désigné comme premier vice-président. Las ! Début octobre, le bureau de la caisse est suspendu, prélude à une démission surprise début novembre de l’urologue qui aura, finalement, tenu 18 ans les rênes de la Carmf. Autant dire que l’élection vendredi dernier de Thierry Lardenois est tout sauf inattendue.


« Il n’y aura pas de changement de cap à la Carmf. L’esprit restera le même. Les valeurs que je défendais continueront à être défendues », confirme le  Dr Maudrux qui se dit  « serein » pour la suite : « La Carmf est sur de bons rails. Je sais que les confrères se font du souci ; mais, moi, je ne m’en fais pas », assure d’ailleurs l’urologue qui a été fait président honoraire et, surtout, personnalité qualifiée, ce qui lui permettra de continuer à assister aux réunions du bureau de la Carmf. Sur le profil du successeur, pas de regrets non plus : « Thierry Lardenois est quelqu’un d’honnête qui, comme moi, ne se fera pas marcher sur les pieds. Il a encore quelques lacunes sur le plan technique, mais cela s’apprend. Et puis, on a tellement dit que la politique
de la Carmf était faite par un spécialiste secteur 2. Alors, je suis très content de voir à sa tête un généraliste secteur 1… Et qui fera la même  ! » 

Quel rapport avec la tutelle ?


Sûr d’avoir correctement accompli sa mission, le désormais ex-président rappelle que, quand il est arrivé, il y avait 4 cotisants pour 1 retraité contre 1,5 pour 1 aujourd’hui. « Désormais, les régimes sont sur les rails. On est à peu près tranquille sur le long terme, sans qu’un doublement de la cotisation ait été nécessaire. Pour le régime complémentaire, ça s’est fait dans la douceur. Pour l’ASV davantage dans la douleur et le problème demeure que ce régime soit financé à moitié par un tiers – l’Assurance Maladie – qui est en quasi-faillite. »

Le plus gros sujet d’inquiétude de l’ancien patron de la caisse concerne cependant les rapports aux autorités de tutelle : « Elles font tout pour nous empêcher de travailler en sortant des textes en permanence. L‘autonomie des caisses ne cesse de diminuer. Là-dessus, je plains mon successeur qui va devoir faire avec de plus en plus de difficultés administratives ».

Ce n’est pas le seul défi que devra relever Thierry Lardenois, médecin de campagne de 54 ans, dont le nom semble s’être imposé assez naturellement, peut-être parce que ses neuf ans de CA en faisait l’un des plus expérimentés : « C’est le fruit d’un consensus dont j’ai la fierté de bénéficier et en aucun cas une manipulation comme j’ai pu l’entendre », précise l’intéressé. D’ailleurs, ce quinquagénaire au tempérament posé, troisième médecin d’une fratrie de quatre garçons, et qui explique avoir  toujours voulu devenir généraliste, semble suffisamment têtu pour mener ses projets jusqu’au bout.

La paix avec les syndicats ?


S’il n’a jamais été tenté par le syndicalisme, celui qui est élu Carmf depuis 15 ans et conseiller ordinal dans son département, vit le corps médical comme « une grande famille ». Ses combats sont locaux – cette semaine, contre les réquisitions de confrères en Moselle – et, surtout, nationaux. Pour la Carmf, il est à l’origine d’un recours contre la réversion imposée aux médecins et après l’échec de celui-ci fait désormais du régime complémentaire de retraite sa priorité numéro un. « Nous empêcherons toute spoliation des confrères », martèle-t-il par avance à toutes fins utiles, à propos du seul des trois régimes que gère finalement la Carmf.

Au-delà, la réforme « à la carte » de ce régime, à partir de 62 ans, est toujours en attente d’un feu vert des pouvoirs publics, faute de consensus syndical sur le sujet. Mais le nouveau président de la Carmf ne désespère pas et a même senti comme un frémissement sur ce dossier jusque-là hautement polémique, mais qu’il estime, quant à lui, pionnier. « Je ressens moins d’hostilités. Peut-être sera-t-il possible de se présenter unis devant le gouvernement pour lui demander d’améliorer les choses », avance prudemment le nouveau président. Une paix des braves entre Carmf et syndicats opposants ? Ce serait un effet inattendu, mais après tout envisageable, de la passation de pouvoirs à la Carmf…

Paul Bretagne

Source : Le Généraliste: 2738