Rapport de l’OPECST sur la gestion des pandémies

32 remèdes pour mieux faire

Publié le 01/07/2010
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Crédit photo : AFP

APRÈS UN AN de travail, l’OPECST a rendu son rapport sur la gestion des pandémies. D’abord centrés sur l’impact sur la société de la mutation des virus, les travaux de l’Office ont été élargis à la gestion des pandémies, et en particulier de la pandémie grippale A(H1N1)v. « L’objectif est plus large que celui poursuivi par les autres commissions d’enquête », a souligné Jean-Pierre Door, député UMP rapporteur de l’OPECST et, par ailleurs, rapporteur de la commission de l’Assemblée nationale chargé d’enquêter sur « la manière dont a été programmée, expliquée et gérée la campagne de vaccination contre la grippe A(H1N1) » – qui rendra son rapport le 15 juillet. Environ 150 témoins ont été entendus et plusieurs missions ont été effectuées au siège de l’OMS à Genève, à Londres, à Stockholm ou à Hongkong mais aussi au laboratoire P4 de Lyon. Dans le cas de la pandémie A(H1N1)v, « nous avons assisté à une construction de la défiance par rapport à une mesure sanitaire », a souligné Marie-Christine Blandin, sénatrice (Verts), l’autre rapporteur qui fait également partie de la mission du Sénat sur « le rôle des firmes pharmaceutiques dans la gestion par le gouvernement de la grippe A(H1N1)v » (rapport le 28 juillet).

Gestion autoritaire.

Les 32 mesures préconisées par le rapport visent à restaurer cette confiance, notamment vis-à-vis de la vaccination, qui a été « mise à mal », lors de la pandémie. Jean-Pierre Door propose des états généraux de la vaccination sur le modèle de ceux de la bioéthique. De même, il suggère de renforcer la place de la vaccinologie dans les études médicales. À propos de la vaccination, Marie-Christine Blandin a regretté que la mise en œuvre ait été confiée au ministère de l’Intérieur avec pour conséquence de mettre à l’écart les médecins généralistes, « qui n’ont pas contribué à faire de la pédagogie » ou à repérer les personnes vulnérables qui devaient bénéficier de la vaccination. La sénatrice regrette aussi une « gestion autoritaire », avec quelques couacs, comme celui du médecin qu’on est venu chercher avec des gendarmes, confondant « réquisition militaire et réquisition médicale », souligne-t-elle. Le conditionnement des vaccins en multidoses (10) a aussi contribué à la mise hors jeu des médecins. Selon l’OPECST, les vaccins en unidose devraient être la règle et le vaccin multidose réservé en cas de réelle pandémie aux campagnes d’urgence.

L’Office souhaite que plus de flexibilité soit donnée au plan national Pandémie, qui devra s’appuyer sur les professions médicales mais aussi les chercheurs en sciences sociales et les associations de malades, lesquels devront être associés à l’élaboration des décisions.

L’OMS dans sa tour d’ivoire.

La sénatrice propose également que les différentes phases du plan Pandémie soient redéfinies et que le critère de létalité soit restauré. « Le fait que l’OMS change de définition de la pandémie n’a pas favorisé la confiance », regrette Marie-Christine Blandin. Le rapport recommande, par ailleurs, de « sortir du cercle contraignant du niveau 6 de l’OMS, pour éviter qu’il conditionne l’obligation pour les firmes de fabriquer des vaccins et l’autorisation pour les États de vacciner ». En effet, rappelle la parlementaire, « les contrats de précommande signés en 2005 auprès des firmes indiquaient que les pays pourraient déclencher la commande de vaccins dès que l’OMS passerait au niveau 6. Ce qui introduit une articulation entre la proclamation du niveau d’alerte et le démarrage de la fabrication des vaccins ». Concernant l’expertise, elle estime que l’instance prévue lors du Grenelle I, mais toujours non créée, devrait aider à plus de d’indépendance et à plus de transparence. L’OMS est, là aussi, particulièrement visée, puisque les rapporteurs jugent qu’il faut exiger « davantage de transparence et de distance vis-à-vis des firmes pharmaceutiques ». D’une manière générale, « l’OMS doit sortir de sa tour d’ivoire et se rendre compte qu’elle doit faire avec l’opinion publique », insiste Jean-Pierre Door.

En ce qui concerne la gestion de l’épidémie en France, les deux rapporteurs se prononcent sur un pilotage unique de la crise et proposent la création d’un Haut Conseil de lutte contre le risque épidémique ou biologique, qui serait une section du Haut Conseil de santé publique. « En effet, une certaine méconnaissance de ce risque existe au sein du HCSP », relève Jean-Pierre Door.

Soutenir la recherche.

Le rapport insiste enfin sur le développement de la recherche afin d’améliorer la fiabilité des données. « Nous nous sommes aperçus que l’impact de la vaccination sur l’épidémie (effet barrière) qui détermine le pourcentage de personnes à vacciner ne faisait pas l’objet d’un consensus, même si beaucoup admettent une proportion de 30 % », note la sénatrice des verts. Une des leçons de l’épidémie A(H1N1)v est que « des financements doivent être prêts à être mobilisés pour soutenir la recherche en cas de besoin », note Jean-Pierre Door.

En a-t-on trop fait ? Les deux rapporteurs ont une analyse différente de la question. « Je vois mal un gouvernement faire différemment compte tenu de ce qui se fait partout ailleurs », estime Jean-Pierre Door, qui rappelle que tous les gouvernements européens, exceptés la Pologne, ont adopté des stratégies similaires. Marie-Christine Blandin souligne le climat de « vigilance exacerbée » qui a conduit à une « politique du pire », notamment en ce qui concerne la commande de vaccins.

 Dr LYDIA ARCHIMÈDE

Source : Le Quotidien du Médecin: 8802