Patients frileux, médecins réservés

La CNAM passe à l’offensive pour relancer les génériques

Publié le 11/06/2012
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Crédit photo : S Toubon

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Crédit photo : S TOUBON

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MOBILISATION générale ! Alertée par la baisse du recours aux médicaments génériques (le taux de substitution est tombé à 72 % en avril 2012 contre près de 80 % fin 2010), la Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM) a lancé l’opération reconquête. Les enjeux sont lourds puisque le recours aux génériques (614 millions de boîtes vendues en 2011 en baisse de 3 %) représente une économie de 1,4 milliard d’euros d’économies. Optimiste, la caisse juge encore possible d’atteindre l’objectif d’un taux de substitution de 85 % à fin 2012 « avec une forte mobilisation de tous ». Pour y parvenir, l’assurance-maladie a pris plusieurs initiatives en direction du grand public, des pharmaciens et des médecins.

Le générique, pas un médicament « au rabais ».

Après le rapport fracassant de l’Académie de médecine qui avait mis en doute, en février dernier, l’efficacité de certains génériques par rapport au princeps, il s’agit en premier lieu de redorer le blason du générique. C’est chose faite, veut croire la caisse, qui a mené une étude de grande ampleur comparant l’efficacité du princeps de la Simvastatine (Zocor/Lodales) et ses versions génériques. Résultat : les taux de décès, d’AVC et d’infarctus sont similaires chez les patients utilisant un anticholestérol de marque ou son générique. « L’étude réalisée, conclut l’assurance-maladie, confirme qu’il n’existe pas de différence entre ce médicament princeps et ses génériques pour atteindre leur finalité : éviter la survenue d’événements cardiovasculaires graves, et de décès ». Les travaux avaient porté sur près de 100 000 patients, âgés de 40 à 79 ans, ayant débuté un traitement par Simvastatine 20 mg. Le taux de survie à l’issue de l’étude était rigoureusement le même pour les patients sous princeps que pour ceux sous générique, à 97,5 %. De la même manière, le taux de patients ayant subi un AVC ou un infarctus était de 0,5 % pour les deux groupes. Le Pr Hubert Allemand, médecin-conseil national de la CNAM, a précisé que de nouvelles études seraient prochainement menées par l’assurance-maladie sur d’autres classes thérapeutiques comme les hypotenseurs. L’objectif est le même : démontrer que le générique n’est pas un médicament au rabais.

Bonnes pratiques dans les officines.

Deuxième axe : la nouvelle convention pharmaceutique. Elle valorise l’engagement des pharmaciens dans la délivrance des génériques en mettant en place un système de rémunération sur objectifs et cible 31 molécules en fonction de leur potentiel de substitution. Cette convention renforce aussi le dispositif tiers payant contre génériques. Autre objectif : stabiliser la délivrance des génériques pour les personnes âgées. « Les plus de 75 ans ne se verront plus proposer qu’une seule marque de génériques pour leurs traitements chroniques, explique le directeur de l’assurance-maladie Frédéric van Roekeghem. Dans 3 à 5 % des cas, ils se voyaient délivrer des marques distinctes de génériques. Ca va sécuriser l’observance des traitements. Les syndicats de pharmaciens ont accepté le principe de sanctions financières pour ceux d’entre eux qui ne respecteraient pas cette bonne pratique ».

Les médecins avertis.

Troisième axe : les comportements des médecins prescripteurs. Pour partie en effet, le recul des ventes de génériques s’explique par le développement de la mention « non substituable » (NS) sur les ordonnances. Selon une étude d’envergure portant sur 12 000 ordonnances, 4,2 % d’entre elles portent cette mention NS. On est certes très loin du taux avancé par les industriels des médicaments génériques sur la foi d’un sondage contestable (le GEMME faisait état de 22 % de « NS » sur la base de 200 ordonnances...). Il n’empêche : la CNAM juge que « des marges de progrès existent pour réduire l’utilisation de cette mention NS aux seuls cas appropriés », dans le cadre de la réglementation (raisons particulières tenant exclusivement au patient comme par exemple l’intolérance à certains excipients à effet notoire). La caisse voudrait surtout endiguer les dérives non justifiées du NS car certaines molécules enregistrent des taux de non substitution très élevés (jusqu’à 12,6 % pour le clopidogrel - Plavix). Quid des tampons « NS » offerts par les laboratoires aux médecins ? «On me dit que ça existe, ça peut être une stratégie marketing, on va faire une étude sur ce point », annonce le directeur.

La caisse atteindra-t-elle ses objectifs de substitution ? Certains facteurs expliquent la moindre pénétration des génériques. L’arrivée de grosses molécules dans le répertoire abaisse mécaniquement le taux de substitution.

C.D. et H.S.R.

Source : Le Quotidien du Médecin: 9139