Quatre mois avec sursis requis contre un médecin jugé pour la mort d'un gardé à vue

Publié le 29/01/2016
JUSTICE

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Crédit photo : S. TOUBON

Quatre mois de prison avec sursis ont été requis ce jeudi à l'encontre d'un ancien médecin de 81 ans, qui avait prescrit de la méthadone à un homme gardé à vue retrouvé mort le lendemain dans sa cellule du commissariat de Rouen en avril 2009. Le médecin lui avait d'abord prescrit des anxiolytiques, puis de la méthadone.

Jugé pour homicide involontaire devant le tribunal correctionnel de Paris, le médecin a expliqué à la barre que le jeune homme lui avait affirmé qu'il prenait par lui-même de la méthadone, provenant très probablement du marché noir.

Mais sans cette prescription, estime la procureur dans son réquisitoire, « le décès ne serait pas survenu ». Pour elle, le médecin a délivré une « prescription compassionnelle » au gardé à vue, prescription « fautive » de 80 mg de méthadone, qui n'aurait pas dû être aussi élevée pour un patient ne prenant pas ce produit dans le cadre d'un suivi médical.

Des conditions de travail extrêmement difficiles

Le praticien octogénaire a répété qu'il avait « assuré la continuité des soins ». La continuité des soins, ce n'est « pas ça », a rétorqué la représentante du ministère public, elle s'inscrit dans un « cadre particulier, dans le respect des règles, de la pratique ».

Tout en reconnaissant les conditions « extrêmement difficiles » dans lesquelles intervient le médecin en garde à vue, et ses « années d'exercice qui ont été exemplaires », la magistrate s'en est prise au refus du prévenu d'admettre qu'il a commis une « erreur de prescription ».

Un collège d'experts a estimé que la mort a été causée par un surdosage de méthadone – produit soumis à des règles strictes de prescription – associé aux médicaments pris précédemment. Mais pour la défense, une incertitude demeure. Le décès est-il dû à la méthadone, ou au Tranxen qu'un deuxième médecin a prescrit plus tard, s'est interrogée l'avocate du médecin.

« La réponse, vous ne pouvez pas la trouver » sans des examens qui n'ont pas été faits, a lancé la défense. « Faute de lien de causalité certain et déterminant », le médecin doit être relaxé, a plaidé l'avocate.

Le jugement sera rendu le 17 mars.

Le gardé à vue décédé était un père de famille de 21 ans. Il était au moment des faits entre les mains de la police, qui enquêtait sur la mort, deux ans plus tôt, de sa dernière fille, âgée de deux mois. L'enfant présentait les symptômes du bébé secoué.

(Avec l'AFP)

Source : lequotidiendumedecin.fr