Préparer ses vieux jours avec le PER

Réforme épargne retraite : les nouveaux plans changent la donne

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Publié le 10/10/2019
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Le PER entre en vigueur ce mois-ci. Objectif : doper l'épargne retraite, alors que les dispositifs de type Madelin n'y sont pas arrivés. Faut-il pour autant s'engoufrer dans les nouveaux «Plans épargne retraite» ? Il convient au préalable de bien réfléchir aux options fiscales avant de s'engager. Et la souplesse du calendrier permet ne pas se précipiter.

Crédit photo : BURGER/PHANIE

À la suite de la loi PACTE de mai 2018, les nouveaux « plans d’épargne retraite » (PER) sont entrés en service le 1er octobre. Nous vous donnons les grandes lignes de cette réforme sur le long terme, qui vise à corriger les nombreux défauts des produits d’épargne antérieurs (PERP, Madelin, Préfon, COREM, CRH, PERCO et article 83).

Ces défauts, le gouvernement en a dressé la liste en présentant la réforme. Et ils expliquent pourquoi l’épargne retraite ne rassemble que 230 milliards d’encours, contre 1 700 milliards pour l’assurance-vie et 400 milliards pour les livrets réglementés…

L’offre actuelle est peu lisible, chaque produit d’épargne étant régi par des règles et des fiscalités différentes. L’épargne est difficilement « portable », ce qui entraîne chez beaucoup d’épargnants un cumul de produits qu’il est difficile de transférer ou de regrouper. Les modalités de sortie sont généralement rigides. Celle-ci se fait dans la plupart des cas en rente viagère. Le niveau de frais est élevé et les rendements insuffisants. Enfin, cette épargne est peu investie en actions alors que les entreprises en auraient besoin pour financer leur croissance. Le PER répond point par point à ces critiques.

La réforme met en place trois nouveaux plans : un PER individuel et deux PER d’entreprise. Le « plan d’épargne retraite individuel » succède aux contrats PERP et Madelin. Les deux PER d’entreprise sont le « plan d’épargne retraite collectif facultatif » qui prend la place de l’actuel PERCO ainsi que le « plan d’épargne retraite d’entreprise obligatoire » qui se substitue aux « articles 83 ». On ne connaît pas encore les abréviations « officielles » de ces différents plans… À noter que le PEE (plan d’épargne d’entreprise) n’est pas concerné par la réforme et continuera son existence.

Le PER individuel

Le PER individuel est ouvert à tous, que l’on ait ou non une activité professionnelle. Il est alimenté essentiellement par des versements volontaires effectués en numéraire ou par le transfert de vos anciens contrats (PERP, Madelin, etc.).

La première nouveauté de ce plan, c’est que vos versements sont déductibles de votre revenu imposable (avec les mêmes plafonds que ceux des contrats Madelin ou du PERP) mais que vous pouvez renoncer à leur déduction si vous voulez réduire votre fiscalité à la sortie. Attention, il faudra indiquer votre choix au gestionnaire du plan avant d’effectuer votre versement.

Votre épargne sera bloquée jusqu’à votre départ en retraite. Toutefois, elle pourra être débloquée dans les cinq cas déjà existants (décès du conjoint ou du partenaire pacsé, invalidité, surendettement, expiration des droits au chômage, cessation d’activité suite à liquidation judiciaire), ainsi que dans un nouveau cas : l’achat de la résidence principale.

Le PER individuel pourra prendre la forme d’un contrat d’assurance ou d’un compte titres. Vous pourrez donc le souscrire auprès d’une banque, d’une compagnie d’assurance ou d’un gestionnaire d’actifs, l’idée du gouvernement étant de faire jouer la concurrence pour abaisser les frais.

La sortie du plan

L’autre grande nouveauté PER, c’est de pouvoir sortir son épargne en capital. Alors que les contrats Madelin ne permettent qu’une sortie en rente, le PER individuel offre toutes les possibilités ; sortir 100 % de son épargne en capital ou 100 % en rente ou une partie en rente et une autre partie en capital. Il faudra toutefois tenir compte de la fiscalité pour choisir la meilleure solution.

La fiscalité à la sortie

L'imposition dépendra du mode de sortie de l’épargne (rente ou capital) ainsi que du choix initial entre déductibilité et non déductibilité.

Si vous reprenez en capital des sommes qui ont été déduites de votre revenu imposable, leur montant sera soumis à l’impôt sur le revenu (sans abattement). Les plus-values réalisées seront taxées au PFU (prélèvement forfaitaire unique), soit à 30 %. Si vous ne les avez pas déduites, seules les plus-values seront imposées à 30 %.

Pour une sortie en rente, si les sommes initiales ont été déduites, la rente servie sera imposée comme une rente viagère à titre gratuit (taxation à l’impôt sur le revenu après abattement de 10 % et prélèvements sociaux au taux de 17,2 %). Si elles n’ont pas été déduites, elles seront imposées en tant que rente viagère à titre onéreux (c'est-à-dire après un abattement variant selon l’âge du débirentier).

On voit qu’avant de déduire ou non les versements effectués dans le PER individuel, il sera prudent d’évaluer les conséquences fiscales à la sortie.

Le PER d’entreprise collectif

Il est alimenté par l’épargne salariale (intéressement, participation, abondements de l’entreprise, conversion des droits du compte-épargne temps) ou le transfert d’un PERCO. Le forfait social a été ramené à 0.

Vous pourrez déduire vos versements volontaires (mais pas ceux versés par l’employeur) ou bien choisir de ne pas les déduire. Toutefois, les sommes versées par l’employeur seront exonérées d’impôt sur le revenu. Seuls les gains seront soumis aux prélèvements sociaux.

En cas de sortie en rente, s’il n’y a pas eu déduction lors du versement des sommes correspondantes, la rente perçue sera soumise au régime des rentes viagères à titre onéreux. En cas de sortie en capital, seules les plus-values subiront les prélèvements sociaux.

Le PER d’entreprise obligatoire

Il sera alimenté par les versements obligatoires des contrats d’assurance-vie ouverts par les entreprises pour leurs salariés, dits « article 83 ».

À l’entrée, ces contrats sont exonérés d’impôt sur le revenu et le forfait social est ramené à 16 %.

La sortie ne peut se faire qu’en rente viagère, soumise à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux.

Le transfert des contrats

Si vous êtes salarié et si vous changez d’entreprise, votre PER d’entreprise (collectif ou obligatoire) pourra être soit conservé, soit transféré sur le PER d’une autre entreprise, soit, pour le PER collectif, sur votre PER individuel. Le transfert peut être fait à tout moment sur les PER individuels.

En cas de transfert après cinq ans de détention du plan, le transfert sera gratuit. Avant cinq ans, les frais facturés seront de 1 % de l’encours au maximum.

Et pour inciter les épargnants à transférer leurs contrats d’assurance-vie sur un PER, tout rachat effectué sur un tel contrat de plus de huit ans, fera l’objet d’un abattement doublé, à condition que les sommes soient réinvesties dans un PER et que le rachat soit réalisé au moins cinq ans avant le départ en retraite.

La gestion pilotée

Le gouvernement insiste beaucoup sur l’intérêt que présentera pour les épargnants la gestion pilotée des PER qui doit être adaptée à l’horizon de placement. Lorsque le départ en retraite sera encore loin, l’épargne pourra être investie dans des actifs plus risqués pour obtenir une meilleure rémunération. Puis, au fur et à mesure de l’approche de la retraite, elle devra être sécurisée dans des supports sans risques.

De plus, les organismes proposant des PER devront créer un canton comptable dédié à l’épargne retraite qui offrira aux épargnants un privilège sur les autres créanciers de l’organisme en cas de défaillance de celui-ci.

Le calendrier de la réforme

Inutile de vous précipiter chez votre banquier ou votre assureur, la réforme de l’épargne retraite va se mettre en place progressivement et il est même préférable d’attendre un peu pour avoir un choix plus large de produits d’épargne.

Il sera d’ailleurs prudent de bien faire étudier vos contrats Madelin pour savoir si vous avez intérêt ou non à les abandonner pour un PER.

Depuis le 1er octobre, vous pouvez transférer vos anciens contrats dans un PER. Au 1er octobre 2020, les anciens produits d’épargne retraite ne seront plus commercialisés. Toutefois, vos anciens contrats seront toujours actifs et vous pourrez, par exemple, continuer à y faire des versements.

Jacques Gaston-Carrère jgastoncarrere@orange.fr

Source : Le Quotidien du médecin