Sur les 433 000 nouveaux cas de cancers en 2023, plus d’un patient sur deux a eu une radiothérapie. « Les progrès technologiques ont permis de limiter la toxicité radio-induite : modulation de l’intensité des doses, délivrance de doses différentielles au sein de la tumeur, réduction des marges, technique rotationnelle, contrôle par l’image, collimateur multilame (MLC), utilisation de nouvelles énergies, etc. », explique Gaëtan Sutre (manipulateur radiologie, Institut Curie, Paris).
Cependant, des effets secondaires sont toujours possibles, notamment lors d’irradiations au niveau des seins, de la tête et du cou (sphère ORL). Les radiodermites surviennent généralement en milieu de traitement, de manière progressive. Ce sont des lésions aiguës qui, sauf exception, disparaissent ou cicatrisent plusieurs semaines après la fin des séances. « Pour le sein, on utilise désormais surtout un fractionnement des doses : 40 Gy en 15 séances. Les effets secondaires sont alors décalés une à deux semaines après la fin de la radiothérapie, précise le manipulateur. Les patientes ne viennent alors plus à l’hôpital, ce qui peut être source de nouveaux problèmes. »
D’autres effets cutanés sont plus tardifs, apparaissant plusieurs mois, voire années, après la fin de la radiothérapie, chez des personnes généralement âgées ayant été irradiées avec d’anciennes techniques. Ils sont non résorbables (radionécrose) et nécessitent une chirurgie avec lambeau.
Les soins d’hygiène sont essentiels à rappeler : stopper les applications de lait, crème pour le corps 24 heures avant le début des séances. Pendant le traitement : douche quotidienne avec un savon neutre, sécher délicatement (surtout les plis), éviter la transpiration, les frottements de vêtements, les parfums, l’exposition au soleil… « Et surtout pas de voyage au soleil à la fin du traitement. Pas d’exposition solaire pendant un an », ajoute Isabelle Fromantin (infirmière, experte plaies et cicatrisation, Institut Curie, Paris).
Grades 1-2, le plus souvent
La sévérité de la radiodermite varie de l’érythème léger à la nécrose, qui n’est aujourd’hui pratiquement jamais observée. On distingue ainsi :
- le grade 1 : érythème léger ou desquamation sèche ;
- le grade 2 : érythème folliculaire ou modéré, ou desquamation suintante, surtout au niveau des plis cutanés, non confluente, œdème modéré ;
- le grade 3 : desquamation suintante, confluente (ailleurs qu’au niveau des plis cutanés) ; saignement de contact ;
- le grade 4 : ulcération, nécrose, hémorragie spontanée.
Ces lésions altèrent beaucoup la qualité de vie des patients
Isabelle Fromantin, infirmière plaie en oncologie
« Seuls les deux premiers degrés se rencontrent en pratique habituelle. Ces lésions aiguës sont le plus souvent transitoires, mais elles altèrent beaucoup la qualité de vie des patients, et il convient de les accompagner et les rassurer, conseille Isabelle Fromantin. Pour hydrater et soulager l’érythème, on peut appliquer un émollient après les séances (ne pas l’appliquer le matin du jour de la séance, pour éviter le risque d’effet bolus). Les crèmes dermocorticoïdes ou à l’acide hyaluronique ne sont pas conseillées : elles ne sont pas plus efficaces. » Un pansement gel doux en plaque Hydrotac transparent (ne pas prescrire les formes adhésives), qui calme la douleur par un effet frais, peut être porté jusqu’à la séance suivante ; on peut utiliser aussi des pansements régulateurs d’humidité : hydrofibres ou mousse hydrocellulaire fine et siliconée (Mepilex).
« Au grade 3, le radiothérapeute décidera d’arrêter, ou non, la radiothérapie. L’interdisciplinarité entre manipulateur radio et infirmière est essentielle », souligne Isabelle Fromantin. Si elle est poursuivie, on peut appliquer un pansement gras avec de la vaseline uniquement le week-end (arrêt le dimanche matin). Si elle est interrompue ou arrêtée, on appliquera de la Flammazine avec un pansement gras (ou interface). Le stade 3 se rencontre plus souvent en cas d’association à une chimiothérapie ou dans des localisations particulières (périnée, canal anal), pour lesquelles un gel de morphine est alors indiqué.
« La radiodermite n’est pas une plaie grave mais, pour le patient, elle génère beaucoup d’anxiété. Elle doit être, tout comme la douleur, bien évaluée tout au long du traitement », insiste Isabelle Fromantin.
Module « Prévention et prise en charge des plaies et brûlures liées à la radiothérapie »
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