Détersion

Quelle place pour la larvothérapie ?

Publié le 11/02/2013
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MÉTHODE locale de traitement des plaies chroniques, le recours à des larves de mouche se développe depuis quelques années. Le concept n’est pas nouveau : l’utilisation médicale de larves date de la fin des années 1920, mais avait été quasi-abandonnée avec l’arrivée des antibiotiques. Cette approche connut un regain d’intérêt au début des années 1990, notamment grâce aux progrès effectués dans la production « stérile » de larves et dans le développement de nouveaux conditionnements, à la fois plus pratiques pour le personnel soignant et plus acceptable par les patients. Les larves de Lucilia sericata sont aujourd’hui conditionnées en flacon, pour une utilisation en liberté, ou en sachets de gaze, ce qui évite leur manipulation.

Les larves présentent l’intérêt de se nourrir uniquement de fibrine et de respecter les tissus sains. Elles permettent une détersion protéolytique par production enzymatique, qui provoque la liquéfaction de la fibrine. Les larves absorbent la fibrine liquéfiée et leur taille peut être multipliée par un facteur 4 en 3 jours. Elles ont également un effet anti-infectieux, exception faite de pseudomonas aeruginosa, et une action sur les biofilms. Il n’y a pas d’effet mécanique, donc pas de sensation de morsure ou de « grouillement », ni de gêne ressentie par le patient.

Leur utilisation se fait sur la base d’une ATU (Autorisation temporaire d’utilisation) nominative et donc essentiellement en milieu hospitalier.

Les bénéfices de la larvothérapie ont été évalués dans 3 essais randomisés contrôlés et cinq essais non randomisés, portant sur un petit nombre de patients. Ces études ont mis en évidence la rapidité de détersion des plaies, sans qu’il n’y ait toutefois d’amélioration du délai de cicatrisation. Le recours aux larves ne majore pas les douleurs.

L’expérience acquise à l’hôpital Bagatelle à Talence au cours des huit dernières années porte sur quelque 150 patients, chez lesquels la larvothérapie a été utilisée dans des plaies difficiles en association à une détersion chirurgicale, une thérapie par pression négative ou une électrostimulation dans le but d’accélérer la détersion et réduire le délai de cicatrisation. Les seules contre-indications étaient le refus du patient, pour des motifs psychologiques, ou la présence d’une nécrose sèche. Les données confirment l’efficacité du recours aux larves pour la détersion des plaies. Notamment, chez 15 patients souffrant d’angiodermite nécrosante évoluant depuis plus de 20 semaines, la plaie était nettoyée à J4 dans 70 % des cas, sans qu’aucun cas d’aggravation inflammatoire ne soit observé. À J60, le taux de cicatrisation complète était de 80 %. Dans le pied diabétique, l’objectif du traitement était le sauvetage du membre. Un échec a été rapporté dans 9 % des cas, le plus souvent pour un problème logistique (manque d’hydratation ou compression accidentelle des larves) ou pour une mauvaise indication (nécrose en particulier).

Session communications orales « Plaies chroniques ». D’après la communication de Véronique Bocquet, hôpital Bagatelle, Talence

 Dr I. H.

Source : Le Quotidien du Médecin: 9217