La mesure continue s’invite dans le type 2

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Publié le 19/05/2023
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Alors qu’elle est largement majoritaire dans la prise en charge du diabète de type 1, la mesure continue du glucose reste rare chez les diabétiques de type 2, en particulier ceux non traités par insuline. Pourtant, de plus en plus d’études prouvent son intérêt, pour individualiser le traitement et lutter contre l’inertie thérapeutique.
Des données à traduire en termes d'objectifs thérapeutiques

Des données à traduire en termes d'objectifs thérapeutiques
Crédit photo : VOISIN/PHANIE

« Les avis sur le bénéfice potentiel de la mesure continue du glucose [MCG] dans le diabète de type 2 non-insulinodépendant [DT2NI] divergent. La question se pose de ce qu’on peut vraiment en attendre, et elle est souvent écartée, recommandation étant faite aux médecins d’éviter à ces patients les soins non nécessaires, remarque le Dr Richard Bergenstal (Minneapolis). On tend aussi à considérer que les DT2 seraient moins à même d’utiliser les nouvelles technologies que les DT1. » Pourtant, de plus en plus d’études indiquent que la MCG améliorerait la prise en charge des DT2NI.

Une étude a montré que la MCG, en favorisant l’adaptation de l’hygiène de vie, permettait de diminuer sensiblement l’HbA1c. Chez 5 760 patients, la MCG a permis d’obtenir une baisse de l’HbA1c à six mois chez 65 % de ceux dont la valeur initiale était comprise entre 7 et 9 %, et chez 96 % de ceux qui dépassaient les 9 % (1). Les patients les plus bénéficiaires étaient les plus jeunes et ceux ayant des antécédents de néphropathie.

Ces résultats sont confirmés en vraie vie. Dans un registre de 1 440 DT2 suivis 1,9 an après le début du recours à la MCG, l’HbA1c est passée de 7,21 à 7 %, tandis que l’IMC restait inchangé (2). Cela amène les auteurs à suggérer « de renforcer la préparation des patients et des médecins à la technologie du diabète dans le DT2 » ainsi qu’une « plus grande ouverture de l’Assurance-maladie pour couvrir les coûts en fonction des avantages prouvés. »

Lutter contre l’inertie thérapeutique

La MCG constituerait aussi une aide bienvenue pour lutter contre l’inertie thérapeutique, chez des patients dont le temps dans la cible (TIR) se situe généralement autour de 41 %.

Dans un essai portant sur trois types de traitements du DT2 — sulfonylurée, incrétine ou insuline, avec ou sans metformine — l’HbA1c diminue plus fortement et il y a moins d’hypoglycémies (<0,5 g/l) dans le groupe MCG, en particulier chez les sujets prenant de l’insuline ou des sulfamides (3).

L’indice de gestion du glucose (GMI pour glucose management indicator) émerge pour personnaliser l’HbA1c. Il permet d’évaluer de façon prospective sa valeur attendue en fonction des données glycémiques enregistrées. Soit, ce que serait l’HbA1c si les chiffres de glycémie actuels étaient maintenus. Cet indice permet donc d’ajuster le traitement, il fait le lien entre l’HbA1c et le profil glycémique, obtenu grâce à la MCG, et devrait devenir un standard thérapeutique pour l’Association américaine du diabète (ADA).

Dans le programme Onduo, mené pendant quatre mois et comprenant MCG, application mobile, consultations de télémédecine, conseils sur l’hygiène et vie et adaptation thérapeutique chez des DT2 avec une HbA1c comprise entre 8 et 12 %, on constate une diminution de celle-ci de 1,6 %, sans augmentation marquée des hypoglycémies et un TIR majoré de 10,2 % (4). Parmi les 55 participants, 87 % ont eu une modification de leur traitement : 31 % ont vu le nombre de molécules augmenter. Les agonistes du GLP1 ont été prescrits à 56 vs. 25 % des patients initialement, les sulfamides diminuaient, de 56 à 33 % et les iDPP4 de 17 % à 6 %, sans modifications notables sur les autres traitements, en particulier l’insuline.

TIR, HbA1c et MCG : le trio gagnant

L’étude Immediate a montré que, chez les DT2NI, le recours à la MCG est associé à une amélioration des résultats glycémiques par rapport à l’autocontrôle seul (5). Chez 116 DT2NI mal contrôlés par au moins un traitement, avec un diabète depuis dix ans et une HbA1c moyenne de 8,6 %, le TIR moyen augmente significativement de 9,9 % (soit 2,4 heures) à 4 mois, avec significativement moins de temps (1,9 heure) en hyperglycémie (TAR) et une réduction de l’HbA1c de 0,3 %. Le temps passé sous la cible (TBR) était faible, les épisodes hypoglycémiques peu nombreux, sans différence entre les deux groupes. La satisfaction des patients était meilleure dans le groupe MCG.

« Pour qu’elle devienne une norme de soins chez les DT2NI, il faut déterminer comment les données d’HbA1c et de MCG s’articulent dans la gestion du diabète, définir les résultats que nous voulons atteindre et son rôle dans l’aide à la sélection des meilleures molécules et pour modifier l’hygiène de vie », souligne le Dr Bergenstal.

Session plénière n° 1 « MCG use in type 2 diabetes and beyond » 

(1) S Kamrudin et al. ATTD 2023, P 695

(2) S Lanzinger et al. Diabetes Technol Ther, 2022 Oct;24(10):763-9

(3) RM Bergenstal et al. J Diabetes Complications. 2022 Mar;36(3):108106

(4) Majithia AR et al. JMIR Form Res 2022;6(4):e31629

(5) Ronnie Aronson et al. Diabetes Obes Metab. 2023 Apr;25(4):1024-1031

Dr Maia Bovard-Gouffrant

Source : Le Quotidien du médecin