Recommandations ESC 2016

L’importance des comorbidités

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Publié le 06/02/2017
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L'IMPORTANCE

L'IMPORTANCE
Crédit photo : PHANIE

La mise à jour des recommandations de la Société européenne de cardiologie (ESC) sur l’insuffisance cardiaque (IC) comporte plusieurs évolutions importantes, portant notamment sur la classification des patients, avec l’apparition d’une IC à fraction d’éjection moyennement altérée (FEVG entre 40 et 49 %), un nouvel algorithme pour le diagnostic et un autre pour le traitement de l’IC aiguë, des recommandations pour la prévention et pour la resynchronisation, des indications pour l’association sacubritil/valsartan ou encore une liste de médicaments non recommandés ou contre-indiqués.

Ces nouvelles recommandations rappellent l’importance de considérer le patient dans sa globalité et donc de traiter correctement les comorbidités. Elles stipulent ainsi de rechercher systématiquement les comorbidités cardiovasculaires ou non, dont les traitements peuvent aggraver l’IC ou engendrer des interactions médicamenteuses parfois délétères.

Chez les sujets diabétiques et insuffisants cardiaques, les experts recommandent de contrôler la glycémie de façon graduelle et modérée, en privilégiant les antidiabétiques oraux qui ont fait la preuve de leur efficacité et sécurité d’emploi dans ce contexte, tels que la metformine. Ils rappellent que l’insuline retient le sel ce qui, en association avec une glycosurie réduite, peut entraîner l'aggravation de l’IC par rétention hydrosodée. De même, les sulfonylurées doivent être utilisés avec précaution, car ils peuvent aggraver l’IC.

Autre comorbidité fréquente en pratique : la cachexie, qui peut concerner tous les compartiments de l’organisme (masse maigre, masse grasse et os) et qui touche de 5 à 15 % des patients IC, en particulier lorsque la fraction d’éjection est altérée. Elle doit être suspectée en cas de perte de poids non liée à des œdèmes et non volontaire de plus de 6 % du poids corporel au cours des 6 à 12 derniers mois.

Une angiographie coronaire n’est pas recommandée en routine chez tous les patients IC, mais elle doit être réalisée chez ceux ayant un angor résistant au traitement médical, sous réserve qu’ils puissent bénéficier si besoin d’une revascularisation, chez ceux ayant des troubles du rythme ventriculaires symptomatiques ou encore en cas d’ischémie lors d’un test de stress non invasif.

Dépister l'anémie

L’anémie, fréquente dans l’IC, doit être recherchée et corrigée car elle est associée à plus de symptômes, un moindre statut fonctionnel, un risque accru d’hospitalisation et de décès. Un bilan étiologique est indiqué, bien qu’aucune cause spécifique ne soit retrouvée chez la majorité des patients. Le déficit en fer, à différencier de l’anémie, mais qui est, comme cette dernière, associé à un moins bon pronostic, peut être corrigé par des injections intraveineuses de carboxymaltose ferrique, dont les bénéfices, notamment sur le statut fonctionnel et le risque d’hospitalisation, ont été confirmés dans deux études cliniques.

Des troubles du sommeil chez un tiers des patients

La recherche et l’analyse des troubles du sommeil, qui touchent un tiers des patients, voire plus en cas d’épisode aigu, font partie intégrante du suivi des insuffisants cardiaques. Ces troubles sont le plus souvent dus à des apnées centrales ou obstructives du sommeil (associées à un moins bon pronostic), ou une association des deux, mais peuvent aussi être liés à des troubles anxieux, à un syndrome dépressif, à une congestion pulmonaire de décubitus ou paroxystique ou enfin être la conséquence du traitement diurétique responsable d’une diurèse nocturne. Les recommandations précisent les possibles prises en charge thérapeutiques (oxygénothérapie nocturne, pression positive continue…). La ventilation servo-adaptée, pendant longtemps préconisée, n’est pas indiquée en cas  d’apnée centrale prédominante dans l’IC à fraction d’éjection altérée car elle s’accompagne d’une augmentation de la mortalité de toutes causes et cardiovasculaire.

D’après les communications du Pr Michel Komajda, Paris et du Dr  Maxime Guenoun, Marseille

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du médecin: 9553