Depuis juillet 2009, le dépistage prénatal de la trisomie 21 se fonde sur la mesure de la clarté nucale entre la 11e et la 13e semaine d’aménorrhée et le dosage des marqueurs sériques du 1er trimestre : bêta-HCG (hormone chorionique gonadotrophine) libre et PAPP-A (pregnancy associated plasma protein-A).
Le résultat de ce dépistage combiné est exprimé en risque. Avec le seuil de 1/250 proposé en France, la sensibilité du dépistage combiné est de 86 % et le taux de faux positif de 5 %. « Ce dépistage est à l’origine d’un nombre très élevé de prélèvements (amniocentèse ou biopsie choriale) et de pertes fœtales, d’un enfant sain sur 100, rappelle le Pr Israël Nisand (Strasbourg). Cette situation ne peut plus être de mise alors que nous disposons désormais d’un test de dépistage prénatal non invasif (DPNI) beaucoup plus pertinent ». L’analyse de l’ADN fœtal dans le sang maternel a en effet une sensibilité de 99,3 % et une spécificité de 99,7 %, avec un taux d’échec de 0,9 %. « Le recours au DPNI ne permet pas de s’affranchir d’un geste invasif pour confirmer le diagnostic, mais il permet de réduire de 95 % le nombre de prélèvements et de 99 % les pertes fœtales, souligne le Pr Nisand. Il doit donc prendre la place des marqueurs sériques, mais pour l’instant, le DPNI n’est pas remboursé. Son prix a certes nettement baissé, mais reste de l’ordre de 390 euros et n’est pas accessible à toutes les femmes. Il est ainsi en pratique surtout proposé aux femmes à risque qui peuvent payer, ce qui est inéquitable ».
« Il n’est pas non plus acceptable éthiquement de proposer le DPNI aux seules femmes qui ont un dépistage combiné « classique » positif », alors que ce dernier ne dépiste que 85 % des anomalies, poursuit le Pr Nisand. Le test le plus sensible doit être mis en première ligne pour toutes les femmes ». Et ce d’autant plus que cette stratégie est économiquement pertinente, comme l’a souligné une étude menée aux États-Unis (1).
La France est en retard par rapport aux pays voisins, qui sont passés assez rapidement au DPNI. La Haute Autorité de santé a été saisie par la Direction générale de la santé (DGS) pour évaluer la pertinence d’intégrer le DPNI dans le dépistage de la trisomie 21. Après une première phase d’évaluation ayant conclu fin 2015 à une révision des modalités du dépistage de la trisomie 21, les conclusions du 2e volet de cette évaluation, qui porte sur les enjeux éthiques, économiques et organisationnels, sont attendues. Le changement des modalités de dépistage va en effet entraîner des modifications des structures de dépistage, qui s’appuient aujourd’hui sur l’expertise de biochimistes et de cytogénéticiens, et à l'avenirsur celle des bio-informaticiens.
« Si le DPNI avait été disponible plus tôt, le dépistage combiné actuel n’aurait pas été développé. Nous espérons une prise en charge la plus large possible, afin de pouvoir proposer le DPNI à toutes les femmes », conclut le Pr Nisand.
D’après un entretien avec le Pr Israël Nisand, hôpitaux universitaires, Strasbourg
(1) Song K et al. J Matern Fetal Neonatal Med. 2013 Aug;26(12):1180-5
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