Face aux saignements de la ménopause

Publié le 19/11/2021
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Les métrorragies péri- et post-ménopausiques sont des motifs fréquents de consultation. La prise en charge doit éliminer les causes organiques et être adaptée aux demandes de la patiente.
Il faut viser à ne pas multiplier les examens, sans rater une cause tumorale

Il faut viser à ne pas multiplier les examens, sans rater une cause tumorale
Crédit photo : phanie

Un tiers des consultations gynécologiques concernent des saignements utérins anormaux, et 70 % de ces consultations ont lieu en périménopause. Dans cette tranche d’âge, les étiologies se partagent principalement entre les fibromes sous-muqueux (14 % des cas), les polypes (23 %), l’hypertrophie endométriale (11 %) ; dans près de 54 % des cas, il s’agit d’une cause fonctionnelle.

L’évaluation du retentissement des saignements se fait, comme pour tout saignement utérin anormal, à partir du score de Higham (anormal si > 100) et d’une NFS. L’échographie pelvienne, idéalement en 3D, est l’examen de première intention. Elle peut être complétée par une IRM pelvienne en cas de fibromes Figo 2 et plus, pour établir une cartographie précise. Le collège national des gynécologues obstétriciens français, dans ses récentes recommandations de 2021, prône la biopsie de l’endomètre s’il mesure plus de 12 mm et en présence de facteurs de risques (> 45 ans, obésité, nulliparité, diabète).

Plusieurs options thérapeutiques

En l’absence de cause organique retrouvée, le traitement repose en première intention sur les stérilets à base de lévonorgestrel et en deuxième intention sur les progestatifs (progestérone micronisée, dienogest) et les agents antifibrinolytiques. Les macroprogestatifs, à risque de méningiome, ont vu leur utilisation drastiquement diminuée. Ils peuvent néanmoins être utilisés, après information et consentement éclairé de la patiente, pour une durée la plus courte possible et avec une réévaluation annuelle du rapport bénéfice risque.

Le traitement chirurgical peut être proposé soit après échec des traitements médicaux, soit en première intention selon la volonté de la patiente. Il s’agit d’une résection de l’endomètre, l’hystérectomie étant en général proposée en dernière intention, bien qu’elle soit acceptable d’emblée si la patiente le souhaite.

Après la ménopause, une démarche raisonnée

Les métrorragies représentent encore de 5 à 10 % des consultations en post-ménopause ; 60 % ne sont pas secondaires à une pathologie, mais dues à l’utilisation d’un THS ou une atrophie, et 40 % sont liés à une pathologie organique.

Le cancer de l’endomètre représente 13 % des causes de métrorragies post-ménopausiques chez les patientes de 60 à 65 ans. L’interrogatoire et l’examen clinique permettent d’affiner la démarche diagnostique, en recherchant les facteurs de risque, iatrogéniques notamment.

L’exploration des métrorragies post-ménopausiques doit tenir compte de leur délai d’apparition par rapport à l’aménorrhée. Le risque de cancer augmente avec le temps. Il est raisonnable de réserver les explorations aux saignements survenant plus de 12 mois après l’aménorrhée. L’idée est de simplifier les explorations et le traitement des métrorragies tout en ciblant les patientes à risque de cancer.

Là encore, l’échographie pelvienne est l’examen de première intention. Après un épisode de métrorragie, une échographie pelvienne montrant un endomètre de moins de 4 mm et une hydrométrie de moins 3 mm ne nécessite pas systématiquement de vérification histologique, car très faiblement associées risque de cancer. Une simple surveillance peut être instaurée.

Au-delà de ces valeurs, une biopsie de l’endomètre et des examens de seconde intention, comme l’hystéroscopie diagnostique ou l’hystérosonographie sont nécessaires.

En cas d’endomètre supérieur à 11 mm ou de polype supérieur à 20 mm sur l’échographie pelvienne, le risque associé de malignité augmente significativement et nécessite une prise en charge chirurgicale.

L’hystéroscopie opératoire doit être privilégiée au traitement radical quand cela est possible. En effet, son taux de complications est faible (2 % de perforations, 0,5 % de transfusions et 0,2 % de plaies digestives), comparativement à celui des (2 % de plaies vésicales, 0,5 à 1 % de plaies urétérales, 0,3 % de déhiscences vaginales et 0,2 % de plaies digestives), sans compter les suites opératoires beaucoup plus contraignantes que l’hystéroscopie opératoire.

Le cas des THS

Certaines situations sont particulières : la survenue de métrorragies post-ménopausiques dans les 6 mois suivant l’instauration d’un traitement hormonal substitutif (THS) ne nécessite pas d’exploration, pas plus que celles proches de l’arrêt des progestatifs, en cas de THS séquentiel. Après 6 mois de THS continu, les métrorragies nécessitent en revanche une exploration par échographie pelvienne et biopsie endométriale.

Il faut également rester vigilant en cas de métrorragies ou hydrorrhées sans pathologie endométriale. Un cancer tubaire peut être incriminé.

À noter enfin : en l’absence de métrorragies post-ménopausiques, l’échographie pelvienne de dépistage a un faible rendement dans le diagnostic d’anomalie endométriale et doit donc être proscrite.

Présentations du Pr Pierre Leguevaque et de la Dr Anna Gosset

Dr Marie Carbonnel

Source : Le Quotidien du médecin