Un nouveau souffle pour le scanner

Par
Publié le 29/10/2021
Article réservé aux abonnés
S’il est excessif de multiplier les radiographies standards ou la TDM dans l’asthme ou la BPCO non compliqués, le scanner peut être intéressant pour évaluer plus précisément leur sévérité.
Des mesures automatiques pourraient permettre d’identifier des patients adressés pour un autre motif

Des mesures automatiques pourraient permettre d’identifier des patients adressés pour un autre motif
Crédit photo : phanie

Dans l’asthme, la place de l’imagerie dépend du stade de la maladie. La radiographie standard est le plus souvent normale en dehors des crises, les anomalies les plus fréquemment retrouvées étant l’épaississement des parois bronchiques et/ou une hyperinflation. En revanche, en cas de crise sévère, des anomalies radiologiques majeures peuvent être observées dans un tiers des cas lors de l’admission aux soins intensifs. « La radiographie est inutile, sauf dans les crises graves ou faisant craindre une complication du fait d’une fièvre supérieure à 37,8°C, d’une altération de l’état général, de comorbidités, d’une chirurgie récente, de la prise de drogues injectables. On recherche en particulier un pneumothorax, très rare (0,2 à 2,5 % des crises), mais dont la mortalité est de 27 % », avertit le Pr François Laurent (service d’imagerie thoracique et cardiovasculaire, CHU de Bordeaux). La radiographie thoracique est indiquée en urgence dans ces cas qui peuvent nécessiter parfois un scanner sans injection.

Les images de l’asthme mieux corrélées à la clinique

En dehors des crises, le scanner pulmonaire a un intérêt en pratique, essentiellement dans les asthmes sévères résistant aux traitements, lorsqu’ils sont associés à un tabagisme ou à une BPCO, ou encore pour le diagnostic différentiel. Il permet de rechercher des lésions avancées, comme un épaississement des parois bronchiques, des bronchectasies ou des impactions mucoïdes, qui traduisent des anomalies des bronches proximales ou des micronodules centrolobulaires, un aspect en mosaïque, un piégeage expiratoire, témoins d’une atteinte des voies aériennes distales.

On commence à connaître un peu mieux la corrélation entre certaines anomalies et la sévérité de la maladie. L’épaississement des parois bronchiques et les dilatations sont associés de façon variable, selon les études, à l’atteinte fonctionnelle et la durée de la maladie. On ne sait toujours pas s’ils correspondent à des manifestations histologiques causales de l’asthme sévère ou s’ils traduisent la progression de la maladie.

Les dilatations sont fréquentes et d’incidence variable. On avait déjà la notion que les impactions mucoïdes, proximales ou distales, étaient partiellement réversibles et associées à un asthme sévère, mais leur importance a été très récemment soulignée, puisqu’un score, établi à partir des données scanographiques, a été corrélé à l’éosinophilie et à l’obstruction bronchique. La mise en évidence du trapping demande la réalisation de coupes complémentaires en fin et en cours d’expiration ; il est fréquent chez les asthmatiques mais non spécifique, car on le retrouve aussi chez les fumeurs.

Des mesures automatiques de l’épaississement bronchique, de l’atteinte des voies aériennes distales et du piégeage sont utilisés dans les essais pour l’évaluer objectivement l’effet des traitements.

Enfin, le scanner des sinus peut être indiqué. Il est classique de rechercher une polypose au niveau nasal ou sinusien, qui peut bénéficier d’un traitement spécifique. Mais, chez l’asthmatique, il montre souvent des anomalies assez banales, type épaississement des muqueuses sinusiennes, qu’on peut rencontrer chez des patients asymptomatiques ; aussi ces lésions ne doivent-elles être interprétées qu’en fonction de la clinique.

Un intérêt pas assez exploité dans la BPCO

La radiographie standard n’a pas d’intérêt pour le diagnostic positif de la BPCO. « La TDM n’est pas réalisée systématiquement mais elle devrait avoir sa place dans le bilan des formes sévères », souligne le Dr Gael Dournes (service d’imagerie thoracique et cardiovasculaire, CHU Bordeaux). Elle recherche des bronchectasies, qui ont des implications diagnostiques et thérapeutiques, puisqu’elles sont plus volontiers associées à des infections chroniques, où les traitements usuels peuvent être en échec et où il peut être intéressant d’associer des antibiotiques au long cours comme des macrolides. Les impactions mucoïdes sont plus nombreuses en cas de BPCO que chez le sujet normal ou le fumeur sans BPCO.

La quantification de l’emphysème par l’imagerie devrait passer dans la pratique car elle est liée à la sévérité de l’atteinte et permettrait d’identifier des BPCO chez des patients adressés pour un autre motif. On recherche aussi des anomalies interstitielles liées au tabagisme, qui pourraient être associées à une plus grande sévérité. Le scanner doit aussi permettre de détecter un cancer bronchopulmonaire, dont le risque est multiplié par 6 en cas de BPCO, ainsi qu’une hypertension pulmonaire.

Session 15 111-V4

Dr Maïa Bovard Gouffrant

Source : Le Quotidien du médecin