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Dossier

31e Congrès français de rhumatologie

Arthrose, au-delà des traitements pharmacologiques

Publié le 11/01/2019
Arthrose, au-delà des traitements pharmacologiques

Arthrose
DR P. MARAZZI/SPL/PHANIE

Pour sa 31e édition, le congrès français de rhumatologie a accordé une large place à l’arthrose. Avec notamment plusieurs communications sur les approches non médicamenteuses, dont les bénéfices sont de mieux en mieux documentés. Des sujets inédits ont aussi été abordés, comme les effets musculo-squelettiques des nouveaux anticancéreux ou le lien entre PR et THM.

En l’absence de médicaments capables de freiner le développement de l’arthrose, les approches non pharmacologiques, exercice physique en particulier, occupent une place centrale dans la prise en charge de cette maladie. Lors du récent congrès de la Société française de rhumatologie (Paris, 9-11 décembre) le Pr Yves Henrotin (Liège) a présenté les dernières publications dans ce domaine.  

Les bienfaits de l’activité physique confirmés

L’arthrose s’accompagne d’une kinésiophobie, responsable d’un déconditionnement physique, lui-même facteur d’aggravation des symptômes. Cette inactivité pourrait expliquer au moins en partie les comorbidités observées au cours de la maladie. Le suivi de la cohorte Nhanes (52 000 patients) indique qu’une gonarthrose radiologique est associée au risque de décès par diabète (HR : 2,04) et maladie cardiovasculaire (HR : 1,43) (Mendy A. 2018), tandis que dans la cohorte française Khoala, les maladies cardiovasculaires (OR : 2,6) et le syndrome métabolique (OR : 1,7) sont associés à l’évolution structurale à cinq ans de la gonarthrose, mais pas de la coxarthrose.
« Les patients arthrosiques peuvent bénéficier des quatre grands types d’exercice physique, a souligné le Pr Henrotin : exercice cardio-respiratoire aérobie, assouplissement pour améliorer l’amplitude articulaire et éviter les flexums, exercice contre résistance pour le renforcement musculaire et exercice de reprogrammation neuro-musculaire (tai chi, par exemple) pour améliorer le contrôle sensori-moteur et l’équilibre. »

Plusieurs études récentes soulignent le bénéfice prolongé obtenu grâce à ces programmes. Une vaste étude danoise non contrôlée (13 000 patients) confirme ainsi la corrélation entre faible activité physique et douleurs de la gonarthrose. Elle souligne l’efficacité très prolongée (puisqu’elle persiste encore après un an) de deux séances hebdomadaires d’exercice neuromusculaire pendant six semaines, quel que soit le niveau d’activité physique initial (Skou ST 2018). Dans une autre étude, cette fois randomisée, des exercices neuromusculaires se sont montrés significativement supérieurs à des conseils sur les antalgiques et les AINS, tant sur les scores de douleur et fonctionnel que sur la qualité de vie (Holsgaard-Larsen A. 2018).

Les orthèses marquent des points

Les orthèses articulées sont incluses dans les recommandations internationales Oarsi, mais leur niveau de preuve reste fragile. Plusieurs travaux récents apportent des données en leur faveur. C’est le cas de l’étude contrôlée française Rotor portant sur une orthèse de décompression équipée d’un système permettant de moduler le varus et le valgus, pour stabiliser le genou et modifier les points de pression (Thoumie P. 2018). La réduction des scores de douleur atteignait -  41,35 chez les 32 patients qui ont porté l’orthèse, contre - 15,37 chez ceux qui recevaient les traitements habituels (p < 0,0001). L’absence de double aveugle ne permet pas, toutefois, de faire la part de l’effet placebo. Même remarque pour une autre étude française présentée au congrès, qui indique l’intérêt d’une genouillère articulée sur mesure (Odra) dans l’arthrose fémoro-tibiale interne : 41 % des patients avaient une réponse satisfaisante à un an (notamment Eva<30/100), contre 27 % seulement dans le groupe contrôle. à noter que 13 % des patients ont dû abandonner la genouillère en raison d’effets secondaires cutanés. Par ailleurs, ce type d’orthèse est contre-indiqué en cas d’antécédents de phlébite.

Enfin, un essai randomisé récent (Reichenbach S. 2018) retrouve une amélioration algo-fonctionnelle de l’arthrose du genou grâce au port quelques heures par jour de chaussures biomécaniques équipées sous la semelle d’inserts convexes réglables, pour effectuer un renforcement neuromusculaire. Les résultats ont été évalués par rapport à des chaussures identiques mais avec des inserts plans. Le score de douleur Womac moyen était de 4,1 chez les 220 patients au début de l’étude. Après 24 semaines, la différence entre les deux groupes était de 1,34 en faveur de la chaussure biomécanique.

Ondes de choc

Deux études rétrospectives menées chez des sujets souffrant de gonarthrose (Kang S. 2018 / Sansone V. 2018) suggèrent aussi l’efficacité des ondes de choc extra-corporelles. Après deux séances à une semaine d’intervalle, les auteurs retrouvent une diminution des scores symptomatiques et une disparition de l’œdème osseux.

La piste nutritionnelle

Par ailleurs, les bienfaits du régime méditerranéen semblent s’étendre aux articulations. Une analyse de la cohorte américaine Osteoarthritis Initiative indique, IRM à l’appui, qu’il est associé à une meilleure architecture du cartilage du genou (Veronese N. 2018). Une autre analyse de la même cohorte conclut de même pour la vitamine D.
Enfin, l’étude Copra présentée en session poster (Henrotin Y.) illustre l’efficacité d’un extrait de curcuma bio-optimisé (Flexofytol®) dans la gonarthrose. Avec notamment, dans cet essai randomisé en double aveugle contre placebo, une diminution de la douleur, un effet bénéfique sur l’évaluation de la maladie par le patient et une réduction des consommations d’AINS à un et trois mois de traitement.

Dr Isabelle Leroy