Bannir l’homéopathie de la médecine ? Les syndicats de médecins disent non !

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Publié le 23/03/2018
HOMEOPATHIE

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Crédit photo : PHANIE

Une centaine de médecins ont ravivé cette semaine la polémique autour de l’homéopathie. Dans une tribune très critique, ils fustigent cette pratique qu’ils placent au rang des « fake médecines », la jugeant inefficace, voire dangereuse. Ces praticiens en appellent au Conseil national de l’Ordre des médecins et lui demandent de prendre des mesures radicales contre l’homéopathie.

Faut-il exclure l’homéopathie du champ de la médecine et ne plus autoriser les praticiens qui y recourent à faire état de leur titre de médecin, comme ils le souhaitent ? « Le Quotidien » a posé la question aux principaux syndicats de médecins. Réponses.

Dr Jean-Paul Ortiz (CSMF) : « Un médecin homéopathe est d’abord un médecin »

On peut discuter de l’efficacité de l’homéopathie dans telle ou telle pathologie. Mais aujourd’hui, on sait qu’il y a un certain nombre de médecins qui utilisent ce type de démarche. Ces alternatives à la médecine allopathique méritent d'être étudiées, évaluées de façon scientifique. On sait que ça donne des résultats, peut-être dans des cas où d’autres solutions pourraient aussi fonctionner. À partir du moment où le médecin est conscient des limites des possibilités thérapeutiques qu’il emploie, on n’a aucune raison de les dénigrer et de les interdire. Un médecin homéopathe est d’abord un médecin qui est formé à l’allopathie. L’homéopathie est un des éléments supplémentaires, peut être inutile diront certains mais encore faut-il l’évaluer, qui lui permettent de bien prendre en charge ses patients. On est dans une fausse polémique.

Dr Jean-Paul Hamon (FMF) : « Je ne vois pas pourquoi on s’énerve là-dessus ! »

De mémoire, l’effet Placebo fonctionne dans de 40 % des cas et, ce qui est certain, c’est que la toxicité des traitements homéopathiques est nulle. On aimerait pouvoir en dire autant de toutes les thérapeutiques classiques. Ma position personnelle est faite de pragmatisme. À partir du moment où les médecins homéopathes ne traitent pas toutes les pathologies par homéopathie, je ne vois pas pourquoi on leur refuserait le titre de médecin qu’ils ont de toute façon obtenu par leurs études. Le premier principe de la médecine est de ne pas nuire : l’homéopathie et l’acupuncture sont dans ce cas. À partir du moment où 40 % des patients vont mieux sans effets secondaires, je ne vois pas pourquoi on s’énerve là-dessus. La France se certifie en médecins, l’hôpital est en souffrance, les jeunes ne s’installent plus : ça c’est l’urgence !

Dr Jérôme Marty (UFML-S) : « On ne peut pas barrer tout ça d’un trait de crayon »

Pour ce qui est de l’acupuncture, de la mésothérapie, de l’homéopathie, on ne va pas s’opposer à ces médecines à exercice particulier, alors même que certains CHU, certains hôpitaux et certaines cliniques les utilisent de façon tout à fait transparente, notamment dans les thérapies d’accompagnement en oncologie, en palliatif, en traitement de la douleur… Des milliers de médecins y ont recours, des centaines de milliers de patients y ont accès. On connaît tous l’effet placebo, l’effet tranquillisant que ça peut avoir sur certains patients notamment en pathologies lourdes. On ne peut pas barrer tout ça d’un trait de crayon. Mais il faut encadrer ces pratiques, que quelqu’un ne puisse pas revendiquer le rôle d’allothérapeute alors qu’il ne fait que de l’homéopathie ou de l’acupuncture. Ce serait tromper les gens. Ça ne veut pas dire non plus qu’il ne doit pas y avoir un débat sur ces pratiques. Elles doivent faire l’objet d’une évaluation scientifique comme la médecine conventionnelle.

Dr Jacques Battistoni (MG-France) : « On peut critiquer l’homéopathie, mais pas les homéopathes en général »

On peut peut-être critiquer l’homéopathie dans certains cas, mais pas les médecins homéopathes en général. Il y a plein de généralistes qui font de l’homéopathie. Je pense qu’ils le font de façon honnête, que c’est une corde supplémentaire à leur arc, que c’est pour eux un moyen supplémentaire de prendre en charge leurs patients. À MG-France, on n’a pas à jeter l’opprobre sur une catégorie de la profession. Concernant l’homéopathie en elle-même, chacun peut avoir son avis sur le sujet. La revue « Prescrire » dit que c’est un placebo optimisé, je trouve que c’est une assez bonne définition. Je pense que c’est surtout un traitement qui ne présente aucun risque, et ça, c’est quand même précieux.

Dr Philippe Vermesch (SML) : « L’homéopathie rend service »

L’homéopathie est faite par des médecins, capables de poser des diagnostics, au même titre que les confrères signataires [de la pétition contre l’homéopathie, NDLR]. Ils n’embarquent pas leurs patients sur des pistes de traitement qui ne sont pas pertinentes. L’homéopathie rend service, beaucoup de patients se sentent soulagés. La question est celle du bien-être. Le but de la médecine est-il de prescrire des traitements prouvés scientifiquement ou de soulager les patients ?


Source : lequotidiendumedecin.fr
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