Dr Claude Leicher*  « La gestion de la crise a été plus simple là où il y avait des CPTS »

Par
Publié le 29/05/2020
Article réservé aux abonnés

Quel a été, selon vous, l’apport principal des CPTS durant cette crise ?

Dr Claude Leicher : Ce qu’elles ont fait d’essentiel, c’est mettre en place des mesures de protection de la partie la plus fragile de la population. Parce que les professionnels se connaissaient, parce qu’ils étaient organisés, ils ont pu notamment séparer le flux de patients âgés, qui sont les plus à risque, des autres. D’autre part, là où l’épidémie paraissait arriver relativement fortement, elles ont été un lieu de mise en œuvre extrêmement rapide de centres Covid. La gestion de la crise a été plus simple là où des CPTS étaient sur pied ou en projet, tout simplement parce que nous avions les moyens de communiquer entre professionnels.

La gestion de la crise aurait-elle été meilleure si les CPTS avaient été plus matures ?

Dr C. L : Ceux qui avaient un doute sur l’intérêt des CPTS ont désormais compris leur rôle essentiel. Des choses aussi simples que le fait d’avoir le mail des infirmiers, pharmaciens, dentistes, ont complètement changé la donne. Mais soulignons que le maître mot a été le bénévolat. Si nous avions eu une dotation spéciale pour assumer certaines missions, cela nous aurait facilité les choses.

Comment cette dotation aurait-elle pu fonctionner ?

Dr C. L : Nous faisons cette proposition : inscrire, dans les textes, un mandat de santé publique territorial qui permettrait que dans de telles situations, le gouvernement puisse mandater les CPTS pour organiser la prise en charge dans le secteur ambulatoire. Nous aurions donc une ligne de crédit, via l’ACI (accord conventionnel interprofessionnel, négocié avec l’Assurance maladie, NDLR). Ce ne sont pas forcément des moyens considérables, mais cela donnerait la possibilité d’avoir quelqu’un qui s’occupe de la logistique, pour l’approvisionnement en masques par exemple.

Vous proposez donc de transférer certaines compétences des ARS vers les CPTS ?

Dr C. L : Absolument. Je pense que l’un des principaux enseignements de cette période, c’est que c’est à partir du terrain que les choses s'organisent au mieux. Le niveau régional ou le niveau départemental ne sont pas forcément les bons sur ces sujets comme sur d’autres, notamment en matière de santé publique ou de prévention. Les municipalités, qui ont beaucoup aidé à la mise en œuvre des centres Covid, le savent bien : elles n’ont officiellement pas de compétences en matière de santé, mais quand il manque un médecin dans un village, la population se tourne vers le maire. Il y a donc toute une articulation entre territoires de santé et élus locaux à penser. Il faut, au moins sur certains sujets, arrêter de parler de décentralisation, et parler de territorialisation.

*président de la Fédération des CPTS

Propos recueillis par Adrien Renaud

Source : Le Généraliste: 2913