Prescription en DCI : le serpent de mer

Xavier Bertrand relance le débat sans faire de vagues

Publié le 18/02/2011
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Crédit photo : S. toubon/« le quotidien »

« JE PENSE qu’il faudra un jour imposer la prescription en DCI [dénomination commune internationale]. C’est à vous [les parlementaires] de faire cette proposition, mais je vous dis d’ores et déjà que j’y donnerai un avis favorable. » Ainsi s’est exprimé Xavier Bertrand lors de son audition par la mission parlementaire de l’Assemblée nationale sur le Mediator (lire aussi ci-dessous). L’obligation de prescrire (en tout ou partie) en DCI est un des serpents de mer de la médecine libérale. L’accord conventionnel de 2002 demandait aux médecins de réaliser 25 % de leurs prescriptions en DCI, mais force est de constater que cet objectif n’a pas été atteint, puisque le taux n’a jamais vraiment dépassé le seuil de 10 %. Fin 2007, un amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (le PLFSS 2008), finalement repoussé, entendait faire obligation aux médecins de prescrire en DCI pour les patients en ALD. L’année d’après, le PLFSS toujours (2009) introduisait un amendement obligeant les médecins à rédiger leurs ordonnances en DCI dès lors qu’existerait un générique correspondant. Le texte sera également abandonné.

Voilà donc Xavier Bertrand qui revient à la charge mais avec cette fois, semble-t-il, plus de chances d’être entendu. Car, signe des temps, les médecins ne semblent plus rebutés par le projet, sans doute aidés en cela par les progrès des logiciels professionnel qui intègrent de plus en plus souvent cette fonction.

« Ni chaud ni froid ».

À la Fédération des médecins de France (FMF), le Dr Jean-Paul Hamon démarre par une question en forme de boutade : « Y aura-t-il une taxe pour ceux qui refuseront ? » Mais sur le fond, il ne voit pas trop d’inconvénient au projet, pourvu que les doutes soient levés sur certains médicaments signalés récemment par l’AFSSAPS. Tel ce médicament contre l’hypothyroïdie dont le générique ne serait pas la copie parfaite. « Les problèmes d’hypothyroïdie se soignent au moyen de médicaments très précisément dosés, continue Jean-Paul Hamon. Dans ce cas précis, je préfère donc prescrire le princeps plutôt que le générique. » Si le Dr Hamon trouve quelque chose à redire, ce serait plutôt dû à « une nouvelle obligation qu’on veut imposer aux médecins ».

À l’UNOF (branche généraliste de la Confédération des syndicats médicaux français – CSMF), le Dr Michel Combier assure que cette disposition ne lui ferait « ni chaud ni froid » tant qu’il s’agira de prescrire des molécules anciennes. « Le problème, précise-t-il, se rencontrera pour les nouvelles molécules auxquelles les logiciels devront s’adapter ». Malgré tout, Michel Combier ne voit « pas l’intérêt de la mesure, ni en termes de santé publique, ni en termes d’économies » puisque le pharmacien substitue déjà dès qu’un générique existe.

Au Syndicat des médecins libéraux (SML), on, est carrément favorable à cette idée. Pour Roger Rua, le secrétaire général, « la profession a évolué et la majorité des médecins est prête à le faire ». Il assure même que cette mesure pourrait simplifier la vie des médecins qui ne seraient plus obligés de retenir tous les noms de princeps et de génériques. Roger Rua s’étonne juste du fait que Xavier Bertrand « refile la patate chaude » aux parlementaires en leur suggérant de déposer eux-mêmes une proposition de loi.

Même tonalité à MG-France où le président Claude Leicher rappelle que son syndicat avait proposé l’idée dès 2002. « A l’époque, c’était le gouvernement qui n’avait pas voulu », s’amuse-t-il avant de préciser que cette initiative « arrive en retard », étant donné que « cela ne ferait qu’entériner une pratique de plus en plus courante ». Claude Leicher rappelle que la prescription en DCI permettrait notamment de simplifier les contrôles de prescription en matière de pharmacovigilance.

 HENRI DE SAINT ROMAN

Source : Le Quotidien du Médecin: 8909