Dermatite atopique

Trop de patients insuffisamment traités

Publié le 16/05/2013
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Crédit photo : PHANIE

LA PRÉVALENCE de dermatite atopique (DA) semble atteindre un plateau dans les pays industrialisés, autour de 20 %. Ce plateau de prévalence traduit sans doute la pression maximale des facteurs environnementaux sur les facteurs génétiques.

Le diagnostic est clinique. Aucun examen complémentaire n’est nécessaire.

La dermatite atopique apparaît habituellement dans la première année de vie, en général vers 3 mois. Le prurit est souvent important et responsable de troubles du sommeil. La DA évolue par poussées sur un fond de sécheresse cutanée permanent (xérose). Les lésions sont érythémateuses, suintantes, puis croûteuses. Une allergie alimentaire associée à la DA doit être suspectée, principalement chez le nourrisson (allergie aux protéines du lait de vache). La DA persiste rarement chez le grand enfant et s’aggrave à l’adolescence. Un début tardif à l’âge adulte est possible, mais rare, et doit faire éliminer une autre dermatose prurigineuse (gale, eczéma de contact…).

Les arguments diagnostiques sont notamment les antécédents d’atopie chez un parent du premier degré et, chez le grand enfant, il existe parfois des antécédents personnels d’allergie alimentaire, d’asthme ou de rhinoconjonctivite allergique.

Les surinfections cutanées bactériennes (staphylocoque doré) sont fréquentes.

Dermocorticoïdes : importance du suivi.

Les soins locaux quotidiens sont indispensables. Les émollients sont utilisés dans le but de restaurer la fonction barrière de la peau et de lutter contre la xérose cutanée. Ils entraînent également une épargne cortisonique. Ils doivent être utilisés quotidiennement. Le patient doit pouvoir mener une vie la plus normale possible et les mesures d’éviction trop contraignantes sont à éviter.

Les dermocorticoïdes (forts ou modérés) sont le traitement topique de référence des poussées. Une seule application quotidienne, le soir sur chaque lésion active, est nécessaire jusqu’à amélioration. Dans les formes plus sévères, un traitement d’entretien par une, voire deux applications de dermocorticoïdes par semaine peut être nécessaire. « Des consultations systématiques de suivi sont nécessaires, notamment pour évaluer l’adhésion au traitement et lutter contre la corticophobie : près de 80 % des patients ont peur des effets secondaires des corticoïdes, a déclaré le Pr Franck Boralevi (Bordeaux). De nombreuses études ont montré que la qualité du suivi proposé a un impact sur l’adhésion. » Il faut conseiller d’appliquer les dermocorticoïdes sur une peau encore un peu humide, après un bain bref à une température inférieure à 37 °.

Dans les formes graves, la ciclosporine peut être indiquée (3-5 mg/kg/jour) : sa durée de prescription est limitée en raison des risques rénaux et d’hypertension artérielle. De nombreuses biothérapies (omalizumab) font actuellement l’objet d’études dans des formes sévères chez l’adulte.

L’enjeu de la prévention.

Les traitements et mesures préventives sont encore décevants. Les probiotiques per os semblent avoir un intérêt préventif modéré mais réel (réduction de 20 à 30 % du risque) (1). L’âge optimal auquel ils devraient être administrés est probablement très précoce : dès la naissance, voire pendant la grossesse. Cependant, la population cible n’est pas clairement définie, ainsi que la composition précise du probiotique optimal.

La dermatite atopique est une maladie polymorphe, qui regroupe probablement des sous-groupes de malades aux pronostics très différents. Actuellement, on ne sait pas quels patients pourraient bénéficier de traitements spécifiques pour réduire le risque des complications ou d’associations morbides (asthme, allergies alimentaires, dermatite atopique persistante). Reconnaître précocement des malades à risque sur des données phénotypiques, biologiques et génotypiques est un enjeu d’avenir important, ouvrant l’ère de la médecine stratifiée ou personnalisée (2).

D’après les communications du Pr Franck Boralevi (Bordeaux) et du Pr Sébastien Barbarot (Nantes)

(1) Pelucchi C et al. Probiotics supplementation during pregnancy or infancy for the prevention of atopic dermatitis : a meta-analysis. Epidemiology 2012 may;23(3):402-14.

(2)Bieber et al. Atopic dermatitis : a candidate for disease –modifying strategy. Allergy. 2012 Aug;67(8):969-75.

CHRISTINE FALLET

Source : Le Quotidien du Médecin: 9242