Décryptage génétique

Vers une prévention des fibromes ?

Publié le 31/10/2019
Article réservé aux abonnés
Une meilleure compréhension des mécanismes cellulaires de la formation des fibroléiomyomes utérins devrait conduire à une meilleure prise en charge.
Des essais thérapeutiques pourraient être débutés prochainement

Des essais thérapeutiques pourraient être débutés prochainement
Crédit photo : Phanie

Chez les femmes de 18 à 44 ans, 30 % des hystérectomies sont réalisées pour fibroléiomyomes utérins (FLMU), en faisant la première cause de cette intervention. Et 20 % des femmes de 15 à 54 ans qui sont hospitalisées en gynécologie le sont en raison d’un ou plusieurs FLMU. Le pic d’incidence est entre 45 et 50 ans, avec un taux d’hospitalisation qui chute de 62 à 31/10 000 entre les tranches d’âge 45-49 ans et 50-54 ans.

La grossesse a un effet protecteur et au contraire le risque est augmenté (RR = 2 à 3) chez les femmes noires.

Une mutation génétique somatique des cellules souches, dont sont issues cellules musculaires lisses myométriales matures, ou des fibroblastes, explique le développement des fibromes, qui ne peut se faire que sous l’effet paracrine des estrogènes et de la progestérone. Celle-ci, et les progestatifs, stimulent la croissance des fibromes par l’intermédiaire de facteurs de croissance, du développement de leurs récepteurs, et de la stimulation des cellules conjonctives. Cela explique le rôle thérapeutique des modulateurs des récepteurs à la progestérone – SPRM comme ulipristal acétate.

Plusieurs formes syndromiques

Chez les femmes en particulier de moins de 35 ans porteuses de FLMU (20 % des cas), il faudra rechercher des causes génétiques ; surtout si, en détaillant les antécédents, on trouve des fibromes dans la famille ou des hamartomes cutanés.

La mutation de la fumarate hydratase peut être responsable du syndrome de Reed, qui expose à un risque de cancer du rein à cellules claires. Les mutations de COL4A5 sont retrouvées également dans le syndrome d’Alport. Dans le syndrome de Proteus (« elephant man »), la mutation AKT1 augmente la synthèse de la molécule mTOR, qui favorise la croissance cellules musculaires lisses. La mutation de PTEN du syndrome de Cowden fait aussi intervenir les intermédiaires AKT1, PI3K et mTOR.

La perte de l’expression du répresseur de transcription et du suppresseur de tumeur, Rest (ou NRSF pour restrictive element-1 silencing transcription factor) entraîne l’activation d’une protéine post-transcriptionnelle, GPR10, qui stimule la signalisation en aval via PI3K/AKT/mTOR et d’autres mécanismes de prolifération cellulaire, de croissance et de survie. Or GPR10 est exprimé dans plus de 90 % des FLMU.

En 2013, Miika Mehine et al. ont établi le génome entier de plusieurs fibromes. Parmi les gènes impliqués dans leur développement, c’est MED12 que l’on retrouve muté le plus souvent (70 % des fibromes). La découverte récente de l’action du système Rank-RankL devrait aussi permettre des essais thérapeutiques avec les inhibiteurs de ce système déjà utilisé dans le traitement de l’ostéoporose (dénosumab).

Université de Nantes, GH Elsan St-Herblain

Session « Actualité des fibromes utérins »

Pr Patrice Lopes

Source : Le Quotidien du médecin