La e-santé au service des populations défavorisées

Vaccins, prévention : l'Afrique et l'Asie misent sur les nouvelles technologies

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Publié le 20/07/2017
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Ils sont entrepreneurs, professionnels de santé, ingénieurs ou chefs de projet : tous ont choisi de s'emparer des nouvelles technologies pour améliorer la santé et les conditions d'accès aux soins des populations précaires de leur pays africains et asiatiques.

À Lavaur (Occitanie), les lauréats se sont retrouvés pour présenter leur initiative et recevoir leur prix. « Deux tiers des projets sont liés à la santé maternelle et infantile, explique Béatrice Garrette, directrice de la Fondation Pierre Fabre, qui a créé l'observatoire en 2015. Il y a une surmortalité des mères en couches et des enfants de moins de cinq ans, particulièrement dans les zones difficiles ou isolées. Ces initiatives permettent aux populations d'être mieux informées et sensibilisées ».

Khushi Baby, l'un des projets lauréats, a été lancé en Inde pour résoudre les difficultés d'administration de la vaccination chez les enfants. Un pendentif doté d'une puce est remis à la famille et permet de stocker les données liées à la santé du nourrisson, les vaccins réalisés, derniers rendez-vous médicaux, motifs, etc. Les informations sont accessibles uniquement pour le personnel soignant grâce à une appli mobile. Le collier a été réfléchi. « Le fil est noir, d'un point de vue culturel, cela éloigne les mauvais esprits. Il est très bien accepté par la population », explique Mohammed Shahnawaz, son concepteur.

Le mobile pour toucher les populations

Sur le continent africain, les entrepreneurs misent sur le taux élevé de pénétration du mobile (46 % de la population, soit 500 millions d'individus). Ainsi, l'application HOPE permet de sensibiliser les Sénégalais au don du sang. Grâce à un système de SMS et d'appels vocaux dans les langues locales, elle permet aux structures de transfusion sanguine du pays de créer des réseaux interconnectés de donneurs volontaires en cas de besoin urgent de sang. « Au Sénégal, seulement 0,45 % de la population donne son sang. La population se méfie, elle a des préjugés », explique Evelyne-Inès Ntonga, entrepreneuse sociale. Avec cet outil, le donneur peut suivre son don (dont le nombre a triplé en un an). Evelyne-Inès Ntonga est à la recherche de financement afin de déployer le dispositif dans les hôpitaux du Sénégal.

Du côté du Népal, Rajendra Poudel a conçu Amakomaya, cinq vidéos ludiques sur la grossesse à destination des femmes et de leur famille vivant dans des milieux très isolés. « C'est un accès au savoir qui présente les bons gestes et les notions d'hygiène », précise Rajendra Poudel. Les vidéos (pas besoin de connexion) mettent l'accent sur la nécessité de consulter un médecin. « Le gouvernement a beaucoup investi dans les structures de soins mais certains villages ne savent pas qu'elles existent car c'est à plusieurs jours de marche », souligne-t-il.

Nerf de la guerre

Le financement reste l'étape la plus délicate. La plupart des projets perçoivent une aide des ONG ou de l'OMS pour la phase d'expérimentation. L'Observatoire de la e-santé répartira 120 000 euros aux lauréats qui bénéficieront d'un accompagnement. Mais ces coups de pouce restent insuffisants pour le déploiement à grande échelle. « La e-santé est un secteur dynamique dans les pays du Sud mais qui a besoin d'être structuré et de l'aide de l'État pour pérenniser les projets », analyse Béatrice Garrette.

Le Rwanda est l'un des rares pays africains à avoir adopté une stratégie de e-santé dès 2008 puis un plan de développement en 2012. Le ministère de la Santé prend en charge l'application Rapid SMS, programme permettant aux agents de santé communautaires d'organiser des visites de professionnels dans les districts. La livraison de poches de sang dans des zones reculées grâce à un drone est en phase d'expérimentation. « En 15 minutes, nous livrons aux hôpitaux, en particulier dans des situations d'urgence en cas d'accouchement compliqué », explique Erick Gaju, coordinateur e-santé national du Rwanda.

 

De notre envoyée spéciale Sophie Martos

Source : Le Quotidien du médecin: 9597
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