Génériques, PMF

Une prescription sous influence

Publié le 27/04/2015
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Négocier fait perdre du temps

Négocier fait perdre du temps
Crédit photo : PHANIE

Les patients chroniques

profitent-ils de leur consultation de renouvellement pour régulariser leur automédication ? Pour tenter de répondre à cette question, Claire Huchet s’est penchée sur « les ordonnances suggérées lors des consultations pour réévaluation de traitement long cours », dans le cadre d’un travail de thèse soutenu entre autres par l’Agence nationale de recherche et le département de médecine générale de la faculté de médecine de Nantes. Menée par des étudiants en 5e année de médecine, cette étude quantitative par observation directe en cabinets a permis de recueillir de mai à juin 2013 et 2014 pas moins de 1 386 observations chez 90 praticiens généralistes exerçant en Loire-Atlantique et en Vendée dans le cadre de consultations pour renouvellement d’ordonnance.

Dans un cas sur cinq, le patient a formulé une demande médicamenteuse supplémentaire au cours de cette consultation. Une demande acceptée par le médecin dans neuf cas sur dix, et sans même discuter d’interactions médicamenteuses ou de posologie dans 35 % des demandes.

Plus de 80 % de ces requêtes relèvent principalement de la sphère générale (regroupant douleur et allergie de façon non précisée par le patient), digestive, cutanée, ostéoarticulaire ou psychologique. Parmi les médicaments les plus demandés par ces patients figurent des antalgiques (22,8 %), AINS (12 %), psycholeptiques (7,8 %), dermocorticoïdes (6 %), anti-histaminiques (4,1 %) et antifongiques dermatologiques (4,1 %). Plus de quatre traitements demandés sur dix relèvent de prescriptions médicales facultatives (PMF), remboursables dans 80 % des cas lors d’une prescription. Et 10 % des demandes sont non-médicamenteuses (de type soins kiné, examens complémentaires…). Pour expliquer les réponses très majoritairement positives du praticien, Claire Huchet évoque plusieurs pistes : un manque de temps face à une demande qui arrive en fin de consultation ou l’ancienneté du symptôme ayant entraîné la demande, le praticien reproduisant alors une prescription antérieure.

Non-substituables

S’agissant des médicaments génériques, un autre travail de thèse présenté par la Dr Sandra Coste, généraliste exerçant à Toulouse, a montré les principaux facteurs qui entrent en compte en consultation dans le cadre des prescriptions « non-substituables ». Une étude qualitative impliquant 18 médecins généralistes de Haute-Vienne a mis en évidence, côté patient, des résistances systématiques ou argumentées sur un effet indésirable ou un manque d’efficacité lié à ces produits, avec à la clé des demandes récurrentes de non-substitution au médecin, acceptées, sans que cela relève forcément du choix de ce dernier. « Ce que les médecins reprochent notamment aux génériques, c’est le temps perdu à la négociation pour les faire accepter auprès de certains patients. Ce temps à passer à parler des génériques est mal vécu et contraint l’utilisation », souligne la Dr Coste. Les caractéristiques du patient peuvent aussi influencer le médecin, en particulier son type de pathologie et surtout son âge lorsqu’il s’agit de seniors. « Certains critères vont freiner l’utilisation de génériques comme la variabilité de la délivrance en pharmacie, qui peut aboutir à des phénomènes de confusion », indique la Dr Coste. Lorsque les patients acceptent, voire réclament le générique, « le moteur principal, c’est l’économie pour la Sécurité Sociale », résume-t-elle.

D’après une table ronde « prescription : Ordonnance et délivrance » et des communications de la Dr Sandra Coste et Claire Huchet

Source : Le Quotidien du Médecin: 9407