Détresses vitales

Prévenir l’arrêt cardiaque intrahospitalier

Publié le 06/06/2013
Article réservé aux abonnés
1370481408438009_IMG_106366_HR.jpg

1370481408438009_IMG_106366_HR.jpg
Crédit photo : s toubon

DE NOMBREUSES études existent sur la prise en charge de l’arrêt cardiaque extrahospitalier. Beaucoup moins sur l’arrêt cardiaque intrahospitalier, qui présente une spécificité tant du point de vue épidémiologique que dans sa prise en charge, qui se révèle complexe à cause de la pluralité des causes possibles. En effet, si l’arrêt cardiaque extrahospitalier relève essentiellement d’une origine cardiaque, il n’en est pas de même pour l’arrêt cardiaque intrahospitalier dont les causes sont nombreuses : cardiaques, bien sûr, mais aussi respiratoires, neurologiques ou infectieuses. Ainsi, une étude de 2006 (1) montre que 40 % des causes des arrêts cardiaques intrahospitaliers chez l’enfant comme chez l’adulte sont d’origine médicale non cardiaque. Au sein de l’hôpital, l’arrêt cardiaque est responsable d’une mortalité de 70 à 90 % selon les études.

La prise en charge pour l’urgentiste et pour le réanimateur est donc complexe. Différentes publications ont montré que près de 60 % des arrêts cardiaques intrahospitaliers sont prévisibles et que la pathologie qui amène à l’arrêt cardiaque a pu évoluer pendant plusieurs heures voire plusieurs jours avant l’arrêt. Il est donc important de mettre en œuvre une prévention efficace des détresses vitales. Face à la diversité des causes responsables, il est difficile de cerner une typologie du patient susceptible de faire un arrêt cardiaque intra-hospitalier. « C’est davantage au niveau organisationnel, face à la dégradation clinique d’un patient qu’il faut travailler, déclare le Pr Pierre Michelet (Marseille). La définition des critères d’alerte est essentielle. En fait, la problématique ici n’est pas tant le traitement de l’arrêt cardiaque, qui bénéficie bien entendu d’une prise en charge quand il survient, mais de sa prévention ».

Chaîne de survie.

En France, en 2004 et 2006, les sociétés savantes dont la Société française d’anesthésie réanimation et le Collège français des anesthésistes réanimateurs ont édité des recommandations pour contribuer à mettre en place une organisation optimale de la prise en charge de l’arrêt cardiaque au sein de l’hôpital (2, 3). Cette organisation comporte plusieurs items dont la validation et la diffusion d’une procédure dite de « Chaîne de survie», la constitution et l’organisation d’une équipe dédiée, la mise en place d’un numéro de téléphone unique permettant de déclencher l’intervention de l’équipe, la présence de défibrillateurs dans chaque unité ainsi que celle de chariots d’urgence, la formation aux urgences vitales. « À Marseille, déclare le Pr Michelet, nous répondons progressivement à ces exigences, c’est long mais le travail porte ses fruits. Tous les services nous appellent et nous intervenons dans la majorité des cas en moins de 5 minutes. La détresse respiratoire représente 30 % des appels, l’arrêt cardiorespiratoire 25 %, la détresse neurologique 20 %. Après intervention pour arrêt cardiaque, une étiologie cardiaque a été diagnostiquée dans 48 % des cas, une étiologie non cardiaque dans 58 % des cas. En termes de résultats, une prise en charge lors de la survenue d’une détresse vitale est associée dans notre expérience à une mortalité de 25 % à 48 heures. Ce résultat est à comparer à la mortalité observée lors de la survenue d’un arrêt cardiaque extrahospitalier qui est régulièrement supérieure à 90 % à 48 heures (4). ».

Il est donc essentiel de détecter les signes de détresses vitales, savoir alerter la Chaîne de survie intrahospitalière en cas de dégradation. Ceci doit être une volonté politique intrahospitalière.

Entretien avec le Pr Pierre Michelet, pôle réanimation urgences SAMU hyperbarie, hôpital de la Timone, Marseille.

(1) Inay M et al. JAMA 2006;295:50-57.

(2) Recommandations pour l’organisation de la prise en charge des urgences vitales intra hospitalières. Conférence d’experts. 2004.

(3) Critères d’évaluation et d’amélioration des pratiques professionnelles : Prise en charge de l’arrêt cardiaque en établissements de soins. 2006.

(4) Toutain A, Tobarias J, Bisbal M et al. Evaluation d’une chaîne de survie intrahospitalière dédiée à la prise en charge des détresses vitales. Ann Fr Med Urgence 2012;2:84-92.

 Dr BRIGITTE MARTIN

Source : Le Quotidien du Médecin: 9248