URPS 2015 - Les médecins libéraux votent jusqu’au 12 octobre

Un scrutin, trois enjeux

Publié le 05/10/2015
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Crédit photo : S TOUBON

C’est parti. Les 116 267 médecins libéraux en activité inscrits sur les listes électorales et répartis en trois collèges (60 058 généralistes, 15 496 spécialistes de « bloc opératoire » et 40 713 autres spécialistes) sont invités à voter par correspondance pour désigner leurs 870 élus régionaux. Les médecins ont reçu leur matériel (bulletins, enveloppes) pour ce scrutin par correspondance qui s’achèvera le 12 octobre (minuit). Les résultats seront proclamés à partir du 16 octobre. L’enjeu est triple : syndical, politique et régional.

Quelle hiérarchie dans chaque collège ? Quelle représentativité ?

Les élections professionnelles sont le seul moment où se mesure l’audience de chaque syndicat (un critère de représentativité), ce qui explique le climat actuel de surchauffe et de surenchère.

Ce baromètre des URPS est jugé fiable car près d’un médecin sur deux participe généralement au scrutin, ce qui en fait un taux de participation correct. Les syndicats se disputent donc le leadership et les places d’honneur dans chaque collège avec un suspense à tous les étages. La question est de savoir si la hiérarchie actuelle sera bousculée, et dans quelles proportions.

Chez les généralistes d’abord, où la compétition est rude, MG France qui avait recueilli 30 % des voix en 2010, juste devant l’UNOF (CSMF), conservera-t-il cette première place si convoitée ? Dans le deuxième collège des plateaux techniques (appelé à disparaître en tant que tel en 2020), Le BLOC va-t-il réitérer sa performance précédente lorsqu’il avait recueilli, à la surprise quasi-générale, 57 % des voix des chirurgiens, anesthésistes et obstétriciens ? Chez les autres spécialistes enfin, le traditionnel leadership de l’UMESPE-CSMF (51 % des suffrages en 2010) sera-t-il contesté ou confirmé ? Quid aussi de la FMF et du SML qui misent beaucoup sur ce scrutin pour valider leur positionnement de rejet absolu de la loi de santé ? Union Collégiale enfin parviendra-t-elle à peser ?

Les résultats seront passés au crible car, au-delà du score de chaque organisation, ils dessineront la nouvelle cartographie syndicale. « Ce sont des élections extrêmement importantes avec la question aussi du rapport de forces entre les syndicats traditionnels les plus structurés, la CSMF et MG France, et les autres forces plus nouvelles ou plus agressives », analyse le Dr Claude Pigement, ancien « monsieur santé » du PS. « On va se compter », résume plus prosaïquement un leader.

Quelle majorité pour quelle politique ?

Même si la question de la stratégie future est peu évoquée pour l’instant, elle arrivera sur le tapis dès le lendemain des résultats. Sur la base du nouvel échiquier syndical, quelles seront les majorités et les alliances syndicales possibles ? Pour soutenir quelle politique de santé et négocier quelle convention ?

Même si tous les syndicats font campagne contre la loi de santé et le tiers payant généralisé, les approches restent différentes sur la place du généraliste, de la médecine spécialisée libérale, de la nomenclature, de la diversification des modes de rémunération ou de l’exercice regroupé... « Un raz-de-marée des plus "ultras" changerait la donne car le jeu démocratique ne pourra être ignoré », pronostique un spécialiste du secteur.

Lorsqu’il ouvrira les négociations avec les syndicats déclarés représentatifs pour conclure la nouvelle convention, le directeur de l’assurance-maladie, Nicolas Revel, ne pourra ignorer les forces en présence, en raison des règles qui s’imposent en matière d’accord conventionnel et de droit d’opposition (lire ci-contre). Ceux qui auront gagné les élections – ou seront en mesure de construire des alliances – seront en position favorable pour peser.

Dans les super-régions, quels élus face aux ARS ?

Au-delà de l’enjeu syndical et politique, les élections permettent d’abord de désigner démocratiquement pour cinq ans des élus locaux de terrain qui portent la voix des médecins libéraux et font avancer des projets locaux souvent originaux (lire ci-contre).

La réforme territoriale (effective au 1er janvier 2016) ne simplifiera pas la situation des médecins libéraux car les « parlements médicaux » que sont les URPS-ML devront se faire entendre dans des territoires parfois gigantesques (Aquitaine/Limousin/Poitou-Charentes par exemple) et défendre les intérêts des praticiens face à des ARS aux prérogatives renforcées. Moins d’élus, davantage de déplacements, autant de contraintes... « L’un des enjeux est de désigner des élus suffisamment aguerris pour exister face à l’administration », expose le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF. À l’échelon régional, grâce à l’esprit d’ouverture des élus, les URPS jouent d’ailleurs souvent un rôle fédérateur de la profession, assez loin des querelles syndicales nationales.

Cyrille Dupuis

Source : Le Quotidien du Médecin: 9438