Dr Jérôme Marty (UFML) : « La profession doit balancer un grand coup de pied dans le marigot »

Publié le 25/08/2015

Crédit photo : S. Toubon

Agitateur du monde médical, le généraliste de Haute-Garonne, président de l’Union française pour une médecine libre (UFML, association née du mouvement des médecins pigeons), explique sa stratégie d’alliances pour les élections professionnelles (URPS) du 12 octobre. Il appelle à l’arrêt d’activité de la médecine libérale à compter du 3 octobre pour obtenir l’abrogation de la loi de santé !

LE QUOTIDIEN - Vous éreintez souvent les syndicats médicaux traditionnels, et pourtant on vous retrouve candidat éligible sur une liste FMF aux URPS, tandis que plusieurs dizaines de médecins adhérents de l’UFML figurent aussi sur des listes du SML ou du BLOC. Où est la cohérence ?

Dr JÉRÔME MARTY - C’était la seule voie possible. Depuis trois ans, l’UFML se bat sans relâche pour la protection, l’indépendance, les valeurs, la survie de la médecine libérale. On a démontré les énormes dangers de la loi de santé et prévenu les médecins de ce qui allait leur tomber sur la figure. Les syndicats ont eu du retard à l’allumage mais aujourd’hui tout le monde, globalement, a compris les dangers de ce texte. Pour autant, je note qu’il y a trois structures syndicales, à savoir la FMF, Le BLOC et le SML, qui défendent clairement le retrait intégral de la loi, ce qui est notre position. Nous avons donc décidé de les aider, localement, tout en gardant notre liberté de parole et d’action.

C’est pourquoi nous sommes sur des listes FMF dans le premier collège, avec Le BLOC dans le deuxième collège (spécialités de plateaux techniques) et aussi sur quelques listes SML. Au total, une cinquantaine de médecins de l’UFML ont rejoint des listes syndicales en position éligible. Car nous voulons des élus.

 

Quel objectif poursuivez-vous ?

On ne va pas se mentir : les élections professionnelles 2015 se joueront d’abord autour du combat déterminé contre la loi de santé. Pour la première fois, la profession doit faire le choix de son avenir. Soit on se dirige sur la voie d’une médecine administrée et c’est la fin de l’exercice libéral, soit on se bat et on change le système actuel pour l’améliorer. Notre stratégie, c’est d’avoir des élus mobilisés et de peser non seulement sur la politique de santé, mais aussi sur le fonctionnement des unions régionales et sur les syndicats eux-mêmes !

Vous entrez dans le système avec l’espoir de le réformer ?

Aujourd’hui, et encore plus avec la loi de santé, le système est pieds et poings liés aux ARS et à l’État. Les URPS elles-mêmes sont devenues des chambres d’enregistrement, la gouvernance régionale n’existe pas. Le bilan conventionnel est accablant : des tarifs à 23 euros, des jeunes qui ne s’installent plus, un burn out qui explose... Les deux syndicats principaux, la CSMF et MG France, portent une lourde responsabilité. Si demain, par exemple, l’ensemble FMF/SML/Le BLOC est largement majoritaire dans les URPS, la voix des médecins en colère portera davantage et nous pourrons commencer par réformer totalement les URPS, ou même les supprimer...

Ne serait-il pas plus logique de créer votre propre syndicat ?

Nous nous sommes posé la question mais lancer un sixième syndicat aboutirait à morceler encore plus la profession. Je crois davantage en l’homme. C’est pourquoi, par exemple, nous soutenons le président actuel du SML [le Dr Éric Henry NDLR] qui essaye manifestement de faire bouger les choses, malgré le passif de ce syndicat dans le bilan. La profession doit se réveiller et balancer un grand coup de pied dans le marigot ! Si on reprend les mêmes hommes, on aura les mêmes effets. Je précise que je n’ai rien contre les adhérents de la CSMF. J’ai moi-même été élu sur une liste CSMF en 2010, j’ai été pendant des années secrétaire général de la CSMF 31...

La mobilisation contre la loi de santé peut-elle trouver un nouveau souffle en cette rentrée ?

Très clairement, oui. Les retours du terrain montrent un changement de ton. Le phénomène des coordinations est intéressant, cela amène une certaine fraîcheur, de nouvelles idées et de nouvelles têtes dans le combat. Des coordinations ont fleuri tout l’été, il y en a une cinquantaine.

Dès vendredi, nous serons à La Rochelle à l’université d’été du PS pour réclamer l’abrogation de la loi.

Une marche entre Chalon-sur-Saône et Château-Chinon est programmée les 11, 12 et 13 septembre, à l’initiative régionale du collectif MST 71, et cet événement doit avoir une audience nationale.

Surtout, nous appelons aujourd’hui officiellement à un arrêt total d’activité des soignants libéraux jusqu’à l’abrogation de la loi, à compter du 3 octobre, pour une durée indéterminée : fermeture des structures libérales, arrêt des vacations des libéraux dans les hôpitaux publics. Nous n’avons plus d’autre solution. Nous ne voulons pas exercer la médecine qu’on veut nous imposer.

 

Propos recueillis par Cyrille Dupuis

Source : lequotidiendumedecin.fr
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