Grève, appel aux patients : à La Rochelle, les médecins font des vagues contre la loi de santé

Publié le 28/08/2015

Réunis ce vendredi à l’ouverture de l’université d’été du PS à La Rochelle, les leaders du SML, de la FMF et du BLOC, trois syndicats représentatifs des médecins libéraux, accompagnés de l’association UFML, ont appelé les professionnels à l’arrêt « total et illimité » d’activité à compter du 3 octobre pour protester contre la loi de santé.

Contrairement à la CSMF et à MG France, qui réclament un aménagement de la loi par amendements, notamment lors de son passage au Sénat à partir du 14 septembre, ces organisations demandent l’abrogation pure et simple du texte. Faute de quoi, elles brandissent le risque de blocage sanitaire.

Appel aux patients

« Nous allons relancer le combat avant la fin de l’année, car le parcours parlementaire de la loi de santé n’est pas terminé, explique le Dr Éric Henry, patron du SML. Après des mois de mobilisation, notre but désormais est que les patients nous aident afin que l’État se réveille ! »

« Les chirurgiens et spécialistes de bloc opératoire seront mobilisés dans le blocage sanitaire de cet automne si rien ne change, renchérit le Dr Bertrand de Rochambeau, coprésident du BLOC. Les dysfonctionnements qui minent l’hôpital seront demain ceux des cliniques si cette loi passe. »

Alors que les élections professionnelles se profilent, les trois syndicats s’efforcent d’unir leur voix pour faire plier le gouvernement. Ils misent aussi sur le soutien des patients en argumentant au-delà de la suppression du tiers payant généralisé, réforme qui cristallise la grogne médicale mais bénéficie du soutien majoritaire des usagers.

Refus du commerce des données de santé

À La Rochelle, sous une tente blanche placée à 100 mètres de l’entrée de l’université d’été du PS, un peu à l’écart, les médecins ont donc tenu un discours offensif d’une heure qui a attiré une trentaine de badauds et une poignée de journalistes.

Dans leur ligne de mire : la « commercialisation des données de santé » (article de loi sur l’open data), « l’accès de l’Assurance-maladie aux comptes bancaires de patients pour récupérer les franchises », « l’étatisation du soin », l’emprise des « grands financiers » (Google, Amazon, etc.), la mise en place de réseaux mutualistes...

« Nous avons besoin d’une réforme de notre système de santé mais pas de celle-là, tempête le Dr Jean-Paul Hamon, de la FMF. Cette loi va étouffer les médecins en exercice et décourager les jeunes pousses. Les patients eux-mêmes sont en danger, tous doivent le savoir ! »

Le Dr Jérôme Marty, à la tête de l’UFML, se réjouit de l’éveil des consciences. « Avant, les médecins étaient dans une lecture superficielle de la loi, ils commencent à se rendre compte de ce qui se trame en plus de la généralisation du tiers payant. Nous sommes plus nombreux à être en colère qu’il y a six mois ! »

Les coordinations, bras armé du mouvement

Outre l’appel à l’arrêt d’activité des soignants libéraux à partir du 3 octobre, les syndicats prévoient d’autres actions pour relancer un « grand mouvement national », sans date précise à ce stade.

Parallèlement, une marche « pour la santé pour tous » reliant Chalon-sur-Saône à Château-Chinon est programmée du 11 au 13 septembre, sous la houlette de divers collectifs médicaux. Et le 19 septembre, le collectif des patients contre la loi de santé porté par la Nantaise Réjane Thomasic organisera des cafés-rencontres entre professionnels et patients (le lieu reste à définir).

Dans les territoires, les 50 coordinations médicales existantes, en plein essor (elles étaient 30 au début de l’été), doivent faire office de bras armé de la contestation, veulent croire certains leaders. « Partout, on assiste à des levées de boucliers qui nous rendent dangereux », témoigne le Dr Patrick Guenebeaud, généraliste dans les Hautes-Pyrénées, représentatif des quelque « 300 médecins libéraux en colère » de son département.

Campagne sur les réseaux sociaux

Le SML va lancer de son côté une campagne « virale » de communication via les réseaux sociaux auprès des patients. Ces derniers seront appelés à se prendre en photo avec leur médecin traitant avec le slogan « Je suis citoyen, je suis contre la loi de santé ».

Tandis que les médecins assurent le « show » pour les habitants de La Rochelle, curieux mais pas forcément convaincus, l’ex député socialiste Olivier Véran (Isère), passe aux abords du barnum médical. « Cette année, les médecins ont pris la place de la CGT », s’amuse-t-il en faisant référence à l’emplacement assez excentré, loin des caméras, de leur conférence de presse. Puis, commentant plus sérieusement la présence des médecins à La Rochelle : « Je ne sais pas si leur mouvement peut repartir. Le travail parlementaire n’est pas terminé avant la commission mixte paritaire et la seconde lecture à l’Assemblée. Le texte peut donc encore évoluer. »

De notre envoyée spéciale Anne Bayle-Iniguez

Source : lequotidiendumedecin.fr
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